Le film de Corneau est loin d'être mauvais. Mais Melville est une vache sacrée. On n'y touche pas. Halte au sacrilège! D’où sans doute le ton peu aimable de la critique envers "Le deuxième souffle". Pourtant, la reconstitution d'époque est plutôt sympa, night-clubs tout peluchés de rouge, rues typiques… Avec un petit clin d’œil au cinéma violent actuel : ces gouttes de sang qui s'éparpillent au ralenti comme des pétales de fleurs dispersés par le vent… Dutronc est magnifique (pourquoi ne le fait-on pas tourner plus souvent?), Blanc pas mal, les second rôles (Melki, Duval...) excellents. Hélas, restent les deux acteurs principaux, à commencer par la pauvre Belluci. Dans les journaux féminins, elle s'étale complaisamment sur sa beauté ma qué c'est un peu oune malédiction, mais bien sûr l'étendue de son talent de comédienne la fera oublier. On comprend qu'elle se sent prête à prendre la relève des brunes mythiques, Gardner, Taylor... Même pas en rêve, poulette! En photo, très bien, mais dès qu'elle joue, elle n'a plus rien, ni aura, ni présence, ni charme, ni même glamour. Non seulement elle joue comme une savate, mais elle a la séduction d'un rôti de veau bien bardé, bien luisant, mais qui ne tente personne. Vous rappelez vous qui jouait Manouche chez Melville? Christine Fabréga. Qui ça? Christine Fabréga. Ni jeune, ni belle, mais parfaite dans le rôle de fidèle compagne d'un truand ni jeune ni beau. On y croyait. Plus embêtant est le cas d'Auteuil. Finalement, le contre-emploi n'est pas forcément une bonne idée. Auteuil est un formidable comédien, sa présence repose beaucoup sur la mobilité, l'expressivité de son visage. Là, Corneau lui demande de jouer un personnage impassible. Eh bien non, on n'y croit pas. Il n'a pas l'air à l'aise, il a même l'air de se demander ce qu'il fait là... Pour une fois, Auteuil n'est pas bon. Donc ces deux points noirs, centraux dans la distribution, cela pèse gravement sur l'appréciation globale que l'on porte sur le film.