Dernier opus de la trilogie sur la Famille, "La nuit nous appartient", troisième métrage de James Gray, confirme le génie du metteur en scène ainsi que de sa peinture d'un New York toujours aussi sombre.
Scénario : N.Y., fin des années 1980. La mafia russe étend son pouvoir sur le marché de la drogue. Bobby, jeune patron d'une boîte de nuit branchée, va vouloir continuer son ascension. Mais c'est sans compter sur la police, comme son frère et son père, qui vont vouloir à tout prix coincer les russes.
Encore une fois, la machine est briguée pour un spectacle stylé et de qualité.
Le scénario, malgré une baisse de régime par rapport à "The yards", offre un niveau de lecture classieux qui n'est pas pour déplaire, car cela rappelle une délicieuse onctuosité, la patte Gray de "Little Odessa". Il y a donc cette part de radiographie d'un New York ténébreux et anxiogène à la "Little Odessa" mais aussi ce côté sombrement lumineux de Gray à vouloir décrire les tourments des personnages, très bien écrits, mais qui perdent de leur superbe par rapport au précédent volet sur la Famille.
Pour parler casting, dans la peau de Bobby, on retrouve Joaquin Phoenix, flippant et transcendant dans son jeu d'acteur, qui mène le film sur ses (étroites !) épaules. Tout comme Tim Roth l'avait fait sur le premier chef d’œuvre de maître Gray, mais avec plus de génie. Une grande interprétation (!) de la part de Joaquin, en somme. Mark Wahlberg est toujours de la partie, et dans un rôle tout aussi sobre que son précédent (il est ici le frère de Phoenix), se fait légèrement effacé par son aîné : il n'en est pas moins magistral ! Pour parler du père, c'est Robert Duvall qui endosse le rôle juste après James Caan. Avec Duvall, on peut dire que la famille est au complet et que le trio (Wahlberg, Phoenix et Robert) nous enivre par leur prouesse d'interprétation. Au cordeau ! En tutoyant tous les sommets... . Ces deux figures du "Parrain" semblent nous indiquer que le peintre de New York (Gray) est le nouveau Coppola du cinéma d'aujourd'hui. Pourquoi pas ? A leurs côtés, Eva Mendes ("Training day", "Cleaner" de Renny Harlin) se fait toute petite mais parvient à tirer son épingle du jeu. Bingo !
Pour parler technique ou esthétique, tout est toujours méticuleusement préparé et travaillé jusque dans les moindres détails : plans, montage, décors, couleurs, photo, musique, BO (comment ne pas reconnaître le cultissime "Let's dance" de Bowie, les Blondie... ?)... . Avec des anciens qui restent ; tels Clancy et Sano ; et des nouveaux qui apparaissent, Joaquin Baca-Asay et le regretté Wojciech Kilar (compositeur césarisé du "Pianiste", il avait travaillé pour Coppola, Campion, Wajda) qui dirige ici l'Orchestre philharmonique de Varsovie comme l'avait fait Dana sur "Little Odessa" ; James Gray, alors en pleine possession de son art, assoie son empreinte de metteur en scène confirmé sur ce drame intimiste (en comparaison que les personnages sont moins esquissés que dans les précédents Gray).
Pour conclure, "La nuit nous appartient" (2007) est un film policier porté par l'excellence du trio Phoenix-Kilar-Gray.
Deuxième chef d''œuvre du peintre new-yorkais. Accord parental souhaitable.
Spectateurs, prendriez vous une vodka russe en compagnie du futur... Commodus ?
A noter : Joaquin Phoenix et Mark Wahlberg sont les producteurs exécutifs du film.