« Le barbare et la geisha » fut délaissé par John Huston pour préparer « Roots of Heaven », son assistant et John Wayne terminèrent le film. Plus tard il le renia en les accusant d’avoir dénaturé ses intentions (?). Au vu de la copie existante le spectateur est frappé par la précision des costumes, des décors, des dialogues et du scénario inspiré par l’histoire qu’Ellis St. Joseph tira de la relation entre le premier consul américain et une geisha interprété par la très belle Eiko Ando (seul rôle au cinéma, cette danseuse fut choisie par Huston pour sa taille, 1,70 m). Certes, le récit est arrangé pour offrir une fin ambiguë à cette histoire d’amour. Dans la réalité le consul ne revint jamais et Okichi, espionne dévouée, rejetée par tous, y compris ses proches, finit par se suicider. L’élision de cet aspect tragique lors du générique final, permet au réalisateur de placer le film sur deux plans. En premier la description d’un Japon, fermé sur lui-même et hostile à toute présence gaijin. Cette partie est remarquablement mise en scène et le combat symbolique du consul terrassant d’abord un géant, puis se faisant battre à plate couture par un gringalet utilisant les arts martiaux est simplement magistral. De même, les différents seigneurs japonais représentant chacun un courant, sont analysés de manière précise et concise. Ainsi le rôle du gouverneur Tamura (Sō Yamamura parfait) offre toutes les ambigüités et contraintes de clan d’un pays peinant à sortir de la féodalité. Moins heureux est l’autre plan, consacré à la relation amoureuse. Si la découverte du consul et de la geisha des univers respectif de l’autre est très travaillée (treize ans après la fin du conflit et deux bombes atomiques, il ne fallait pas commettre d’impair), la passion développée manque d’inspiration, voir de flamme, offrant un aspect congelé à ce qui aurait du être un grand plat. John Wayne convenait peu à ce rôle (Marlon Brando était le premier choix) et malgré Sam Jaffe, la partie japonaise, de la geisha au Shogun (Hiroshi Yamato, qui a l’âge que Tokugawa Iemochi devait avoir au moment de la rencontre) et malgré, ou à cause, de la superbe photographie de Charles G. Clarke et les décors somptueux, le film se regarde trop souvent comme un album d’image.