La bêtise de l'humanité serait donc responsable de notre chaos futur. C'est ce que le narrateur affirme, sûr de lui : Les bébés-cons peupleront la planète avec toujours plus d'entrain au fil des ans, transformant nos institutions dominantes en bordels désorganisés. Joe Bowers devient donc le liant entre notre présent et le 26ème siècle. Il est en quelque sorte nos yeux, notre bouche, notre pensée, qui constate avec un mélange d'étonnement et de dépit ce qu'est devenu la société américaine. Les effets de la disparition de la moindre éducation sont fatals : Des hôpitaux déshumanisés où la négligence prime, une justice portée sur le profit et les préjugés et un ensemble soumis aux lois de la télé-réalité, et à ces show grandiloquents qui réunissent tous les américains devant leur poste de télévision. Plus d'eau, plus de livres, mais juste la prédominance de la violence, du sexe, et de l'argent.
Joe arrive dans ce nouveau monde inconscient, insouciant et innocent. Il est considéré par ses congénères comme ils se considèrent tous les uns les autres : Un déchet. Et Joe n'est pas venu seul, il est venu avec Rita, une prostituée qui a peur de son maque : Upgrayedd. Et il rencontre un avocat, Frito, avec qui il est d'abord en conflit car il a bousillé sa maison avec un tas de déchet pendant qu'il regardait Own My Balls, mais après c'est cool ils sont potes parce qu'il lui a promis 80 milliards de dollars. Et il fait un tour en prison, rencontre le président rasta des USA, Camacho, et fait un show dans l'arène de Réhabilitation contre Mr. Beef et se bat contre des véhicules godés. Oui, comprenons-le bien, Idiocracy n'est ni logique, ni explicatif, mais démonstratif. Il nous montre ce qu'il veut nous montrer de cette société inconnue que nous découvrons ébahis, les scènes burlesques s'offrant à nous en nous ballotant vers une issue incertaine. En se privant tout regard profond sur la société, la réalité des fonctionnements mondiaux etc., et en se concentrant sur la présentation de quelques domaines bien précis (hôpital, justice, prison...) nous sommes clairement devant un film séquentiels. Tout repose sur le rapport du passé au présent, du contraste, de l'humour qui découle du rapport de l'intelligence moyenne (celle de Joe) à la non-intelligence, et l'ensemble est donc structuré à la manière d'une suite de sketchs. Cette suite continue se révèle comme une boite de chocolats, certains sont délicieux, d'autres nous collent un peu sur les dents, mais ça vaut le coup.
Bref, le personnage principal, dans son isolement au sein de cet univers hostile, va se retrouver maître de beaucoup de choses malgré lui. Son intelligence supérieure, à défaut de l'aider, semble dans un premier temps le condamner. Car une chose est d'être intelligent, l'autre est d'en faire quelque chose, et avec toutes les attentes qui sont placées en lui, l'erreur est proscrite. Loué comme un messie, le peuple attendant le miracle Bowers, il ne fait que retarder l'échéance de la désillusion pour s'enfuir avec Rita vers leur passé commun, l'an 2005. Cette société est vu comme perdue, condamnée, malsaine, et le seul et unique souhait des deux personnages est de la quitter au plus vite. Pourtant le film base vraiment sa construction sur la croyance en la destinée suprême, c'est presque le cheminement d'un film de super-héros, ce dernier héritant d'un pouvoir supérieur, reniant son présent et se rabattant sur son passé, avant d'accepter son destin car : "Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités". Comme chaque super-héros digne de ce nom, son identité change elle aussi : Au revoir Joe Bowers, bonjour Not Sure.
Mais avant cela la quête c'est de retrouver la machine à faire voyager dans le temps, qui existe, dixit Frito. Entre-temps il s'agit de survivre dans un univers où tout va trop vite, et où l'on peut se faire carboniser pour un oui ou pour un non.
En fin de compte, tout le monde se voit offrir une deuxième chance, Joe et Rita se voient offrir l'opportunité de trouver enfin leur place dans un monde, et ce monde là se voit l'opportunité de retrouver ses origines, même si, en confondant Hitler et Chaplin, le chemin est encore long, très long.
La folie de cette société déjantée contient son lot d'hilarités, qui sont cependant trop hétérogènes. Idiocracy c'est un film bête mais drôle, ou du moins à moitié drôle. Le burlesque est grandiose en soi car il n'exige ni réalisme, ni crédibilité, ni logique. Inutile donc de se pencher sur toutes les facettes de l'an 2500 qui collent sans véritablement coller, l'essentiel est de se laisser transporter, comme dans un manège, et découvrir avec innocence les surprises qu'on nous a concocté. J'en mets une moitié de note, inventif mais pas trop, drôle mais pas trop, con mais pas trop, pas mal mais pas top.