Les Trois Frères n’a pas seulement confirmé la notoriété des Inconnus (du moins, à l’époque, car vu les critiques concernant sa suite…). Le long-métrage a également lancé la carrière de cinéaste de Didier Bourdon, qui, par la suite, à plutôt enchaîner les réalisations (Le Pari, L’Extraterrestre, Les Rois Mages, Sept ans de mariage). Madame Irma fait partie de cette filmographie croissante, composée exclusivement de films comiques. Est-ce pour autant que Madame Irma, réalisé par un ex-Inconnu (ici, en collaboration avec Yves Fajnberg), soit une bonne comédie française ?
À chaque interview, Didier Bourdon décrit ses propres films comme des portraits de certains côtés de la vie quotidienne : Sept ans de mariage abordant le thème de la vie de couple, le futur Bambou (2009) l’animal de compagnie. Avec Madame Irma, c’es le chômage dont veut parler Bourdon. Via ce cadre qui se retrouve du jour au lendemain licencié et qui, pour protéger sa famille du besoin, décide sur un coup de tête de jouer les diseuses de bonne aventure. Le tout en secret, afin de continuer à gagner de l’argent. Un postulat qui avait de quoi susciter un certain enthousiasme. En effet, le film promettait de retrouver un Bourdon de l’époque des Inconnus, c’est-à-dire un comédien qui aimait se déguiser, se maquiller, s’abandonner à son personnage pour faire rire. D’autant plus qu’ici, il est question d’un homme devenant une femme. Une thématique humoristique qui a plutôt bien fonctionné dans le milieu culturel (La Cage aux Folles, Tootsie, Certains l’aiment chaud).
Il est donc fort dommage de voir que le film ne voit pas plus loin que le bout de son nez. D’accord, Didier Bourdon est à l’aise à jouer les fausses divinatrices et c’est assez rigolo les premières minutes. D’accord, il y a des passages drôles qui surviennent de temps en temps. Mais cela s’arrête au simple stade du sourire sur le visage. Le film usant de ressorts comiques milles fois vus (et un peu trop présents dans la bande-annonce) sans chercher à les renouveler. Et sans les utiliser à bon escient pour en tirer un scénario qui aurait pu se montrer bien plus original que cela. Se limitant à l’éternel thème du licencié se reconvertissant dans un métier improbable afin de continuer à vivre sa vie. Retrouvant du coup des personnages qu’ils nous semblent connus de bout en bout (le copain qui critique mais aide et se tait quand même, la femme qui soupçonne une liaison, la femme du copain complètement psychorigide…).
Sans oublier que cette comédie préfère rester dans ses pantoufles (se contenter de son postulat) au lieu de se permettre quelques envolées (montage hystérique, bande-son décalée qui aurait renforcé l’effet comique…). Nous nous retrouvons donc avec un long-métrage, certes sympathique, mais au combien mollassonne du point de vue technique. Avec des plans totalement fixes, ne donnant aucun panache à l’ensemble. N’arborant que des musiques dites « classiques » du genre de la comédie. Rien qui puisse sortir Madame Irma du lot ! Il y a bien quelques effets de mise en scène (comme cette caméra qui tourne sur elle-même tout en se rapprochant de la boule de cristal), mais vu que cela n’apporte rien au film, on reste surpris par leur présence dans le film.
Ne reste plus que le casting du film, qui nous permet de revoir réunis Didier Bourdon et son compère Pascal Légitimus (Bernard Campan continuant sa carrière de son coté). Cependant, c’est Bourdon qui tire la couverture à lui tout seul. Lui qui s’amuse sous sa tonne de maquillage (perruque, rouge à lèvres, robe, chaussures à talon, collants, prothèses mammaires, faux ongles…). Lui qui, en clair, attire tous les regards ! De ce fait, on en oublie très rapidement les autres comédiens qui servent plus à faire de la figuration qu’autre chose. Un constat qui s’applique également à Légitimus, qui va jusqu’à surjouer un peu trop pour montrer qu’il est là. Sans succès…
Petite comédie, donc. Bon enfant, mais vite oubliable, qui n’arrive pas à raviver la flamme qui brûlait chez les Inconnus. Soit leur humour n’est plus d’actualité et il serait temps qu’ils le modernisent, soit ils cherchent à faire autre chose mais devraient plutôt revenir sur leurs bases. Il suffira de voir Les Trois Frères – Le Retour pour répondre à cela, en espérant tout de même retrouver nos Inconnus et non des comédiens qui se contentent de peu pour poursuivre leur carrière.