Rogue
Un film de Greg Mc Lean
Il y a six mois, Rogue avait été sélectionné dans le cadre de la compétition officielle du Festival du Film Fantastique de Gérardmer. Pour sa quinzième édition, Fantastic’Arts avait proposé à son public un éventail très large de ce que le Septième Art peut avoir de plus bizarre.
Dans le genre, Rogue Faisait partie de la catégorie toujours populaire des grosses bébêtes très méchantes et affamées. Une facette du Fantastique qui séduit depuis longtemps les amateurs, parallèlement à une réorientation du genre vers des productions plus subtiles. Le bestiaire du Fantastique est d’une richesse inépuisable ; il a déjà donné vie à des crocodiles et autres alligators géants mangeurs d’homme, au cœur de la forêt tropicale ou au milieu de célèbres mégalopoles d’Amérique du Nord. Rogue se propose quant à lui de nous faire partager une petite croisière idyllique sur les eaux sauvages du Kadaku National Park, au cœur d’une Australie resplendissante.
Il y a de cela deux ans, le réalisateur australien nous avait déjà favorablement surpris avec un Wolf Creek d’anthologie. Il nous invite aujourd’hui à une ballade d’un autre genre dans son Australie natale. Le film s’ouvre sur les grands espaces australiens, majestueux. Un reporter américain, Pete Mc Kelly, doit partager l’embarcation d’un groupe de touristes, son journal l’ayant envoyé faire un papier sur les célébrités du coin, les crocos et les paysages. A priori, malgré sa belle gueule, Pete n’est pas sympathique. Désabusé, cynique, presque méprisant, il n’a pas fait trois pas sur la terre australienne que déjà il peste sur son nouvel environnement. Tout le gêne, l’incommode, les mouches, et la chaleur aussi, et quand il jette son regard d’Américain bon teint alentour, on sent qu’il est habitué à son petit confort.
Face à lui, le commandant de bord, Kate, incarne le capital sympathie de l’équipe, une femme indépendante, volontaire, qui connaît les lieus dans les moindres recoins. Elle fera le lien entre la nature, somptueuse et hostile, et le groupe de touristes. Ceux-ci nous sont présentés dans une première partie, qui tire un peu en longueur, mais ce dernier point est vite oublié, tant les paysages sont magnifiques. La mise en scène de Greg Mc Lean ne fait pas preuve d’originalité, mais s’appuie sur une bonne technique. La caméra sait donner du relief aux scènes, et rend le huis clos plus pesant. Au bord d’une rivière, les touristes se retrouvent bloqués sur une île de petite taille alors qu’un crocodile géant a déjà commencé sa chasse. Petit détail, l’île va bientôt être engloutie par la marée. Alors que la nuit tombe, le clair-obscur fait surgir des ombres inquiétantes.
Pas de grande surprise, une fois le décor planté, les membres du groupe vont se faire gober de ci de là par l’insatiable créature. La seconde partie s’avérera un peu moins prévisible, et permettra aux comédiens de tirer leur épingle du jeu, même si le héros restera le méchant saurien, retors et furtif à souhait, malgré sa taille incroyable.
Dans le rôle du cynique reporter, le comédien Michael Vartan apporte son physique de séducteur et fait même évoluer le personnage. Pete Mc Kelly est un héros qui s’ignore, un faux-désagréable qui prendra le risque de sauver l’héroïne alors qu’il pourrait égoïstement s’en tirer tout seul. Ce serait en effet tellement plus simple !!! Face à lui, Radha Mitchell est tout à fait convaincante dans le rôle d’une femme forte, figure qui détonne dans un monde majoritairement conduit par des hommes. Elle y a gagné sa place, sans perdre de sa féminité. Faisant jeu égal avec les solides baroudeurs du bush australien. Son expérience sera bien utile au petit groupe dont elle a la responsabilité, mais il lui faudra ce petit quelque chose de plus afin de survivre pendant les 95 minutes que dure le film.
Greg Mc Lean avait vraiment frappé fort il y a deux ans avec son Wolf Creek. Le souvenir est toujours là. Avec Rogue, il reste dans le genre, mais change de registre. Ici le monstre n’est plus un homme, mais un animal de gigantesques proportions. La menace n’est plus la même, mais le résultat ne diffère que légèrement. Au final, rares seront les survivants.