"Mauvaise Foi" est un film qu'on aurait envie d'aimer, par le propos défendu par ses deux co-auteurs, le marocain Roschdy Zem et le juif Pascal Elbé, propos qu'on peut résumer à la réplique de Clara à sa mère qui lui demande ce que sera cet enfant, juif ou musulman, et qui répond "français". Malheureusement, ça ne prend pas. La faute sans doute à une invraisemblance du scénario, elle-même causée par la volonté de concentrer tout un débat de société sur deux personnes : Clara et Ismaël ne sont pas pratiquants, ils ont même une approche laïque de leur couple : "On avait dit : pas de religion", dit-il quand il découvre la mezouza à sa porte.
Et voilà que sur la simple pression, réelle ou supposée, de leurs environnements, ils deviennent brutalement -enfin, surtout Ismaël- de plus en plus intolérants. Roschdy Zem raconte qu'il avait prévu un film plus léger, et que cette tension s'est imposée au cours du tournage : dommage. Il aurait sans doute mieux valu continuer sur le ton de la pure comédie, et certaines scènes font mouche et nous laisse entrevoir le film que ça aurait pu donner, comme quand le prétendant arrive avec un bouquet de fleurs et que son futur beau-père (Jean-Pierre Cassel, excellent) le prend pour un livreur, ou le lapsus du même qui appelle Ismaël "Israël".
La crise entre notre Romeo et notre Juliette n'est pas crédible, et du coup elle décrédibilise toute l'histoire, construite sur le canevas classique de la comédie sentimentale : ils s'aiment, se disputent sur un quiproquo, et tout se met en travers de leur réconciliation, jusqu'au happy end. Et comme dans beaucoup de comédies françaises, on a parfois l'impression que le scénario n'est là que pour mettre en valeur certains bons mots. Il y a pourtant autour de cette trame démonstrative des à-côtés qui touchent juste : l'amitié entre Ismaël et Milou, son voisin de palier juif invité avec sa mère chaque année pour l'aïd, ou le personnage de Mounia, la soeur d'Ismaël et vrai garçon manqué, version beur de Jess, l'héroïne de "Joue-là comme Beckham". Mais cela ne suffit pas à donner du rythme à cette comédie somme toute assez poussive.
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