Le lendemain de ma présentation de ce film en cinéclub, je découvre un téléfilm sur France 2 qui confirme ce que j’avais ressenti sur l’importance de cette première semaine de septembre 97, qui a suivi la mort de Lady D, quant à l’avenir de la royauté britannique.
Après avoir subi tous les déboires des années précédentes – avec en point d’orgue l’année 92 qualifiée par elle-même d’annus horribilis- la reine Elisabeth 2, va rebondir après 45 ans de service, et retrouver la proximité avec « son » peuple, conquis à juste titre pendant la guerre, mais largement entamée par son refus de prendre le tournant de la modernité (un gros mot pour le clan royal).
Connaissant l’histoire, je penser m’ennuyer un peu durant cette troisième projection. Bien au contraire, grâce à l’excellente interprétation de Helen Mirren, mais aussi de M. Sheen en jeune Tony Blair, j’ai vibré de nouveau à ce jeu du chat et de la souris, sur le mode « tu commandes mais je te conseille, je serai toujours légitime et toi éphémère ». Quelle performance d’acteurs – à l’exception de la reine-mère qui me semble éloignée de sa vraie personnalité.
Certains personnages de la famille d’Elisabeth sont bien sûr caricaturaux, voire antipathiques, mais le cœur de film-documentaire est le cheminement personnel d’une femme, pétrie de certitudes, sanglée dans le devoir, capable de dissimuler ses émotions en toute circonstances, mais qui va réaliser qu’elle est en train de louper un train qui ne repassera pas deux fois.
Il faut oublier tout notre culture franco-révolutionnaire, donneur de leçons, pour observer avec détachement et un étonnement toujours renouvelé l’adhésion séculaire du peuple britannique à la Couronne, son attachement démesuré pour une princesse volage mais touchante et moderne, comme il l’avait pu l’être en d’autre temps pour les Beatles.
Il nous est inconcevable d’imaginer que c’est Blair lui-même qui siffle la fin de la récré, impressionné, timide au début puis décidant au final en homme d’état capable de décoder les médias et de sentir les enjeux politiques de la situation.
Les anglophobes irréductibles s’ennuieront sans nul doute et ricaneront en entendant les sottises proférées par Philips, ou en voyant la Reine s’incliner devant un cerf tué la veille à la chasse.
A l’opposé, cette scène m’a renvoyé la même émotion qu’une scène similaire dans le Deer Hunter – Voyage au bout de l’enfer-, lorsque de Niro, ouvrier de la sidérurgie, chasse une dernière fois avant de partir au Vietnam. Respecter l’adversaire pour ne pas devenir la proie ? Elisabeth seule dans les merveilleux décors naturels de l’Ecosse, se laisse à pleurer pour la première fois.
Et viendra s’incliner sur la dépouille de Diana, à pied, au milieu des gens ordinaires.
Le vent a tourné, la modernité s’est engouffrée dans le palais figé de Buckhingham. 20 ans plus tard, The Queen est redevenue plus populaire que jamais, a préparé Williams a suivre sa lignée, et l’a autorisé à faire un mariage d’amour …cette fois-ci.
Stephen Frears mêle habilement images d’archives et composition, pour en faire un récit à nouveau palpitant, particulièrement pour ceux qui ont vécu en Angleterre un certain temps, et seront du coup beaucoup plus attentif à toutes ces incongruités qui donnent le charme fou de ce pays, qualifié habituellement d’exotique et de passéiste. Pas si simple en réalité.
Déc 16 – V3 en vo
habile programmation en télévision le jour du jubilé officiel de la reine. Si probablement le scénario pousse un peu loin les dialogues entre Blair et Elisabeth 2, le fond prend toute sa crédibilité avec le recul du temps et que l'on sait maintenant que la popularité maximum retrouvée après l'épisode mort de Diana est une réalité, incompréhensible pour la majorité d'entre nous.
juin 22 - TV4 .