Stephen Frears met en scène la Reine dAngleterre et son prime minister, Tony Blair, tous les deux encore aux affaires quand le film sétale sur les écrans : cest un premier sujet détonnement pour le spectateur français, qui sera surpris tout le long du film, par le cérémonial dun autre âge entourant la famille royale, par la fascination inhérente à cette forme de pouvoir, par la façon de montrer les deux personnages, parfois très proches, parfois statues de cire.
Le propos, sans être passionnant, refuse toute simplification, et insuffle suffisamment d'ambiguïté pour que lon reste lesprit ouvert du début à la fin. Lessentiel de laction repose sur la gestion de la crise suivant le décès de Diana, le silence de la famille royale...
Le premier ministre paraît être le seul à exprimer de la tristesse, il est montré comme ayant du coeur, et puis peu à peu, sans aucune lourdeur scénaristique, on comprend que tout cela est factice. Le personnage est manifestement plus intéressé par la peine du peuple que par le décès lui-même. Il cherche à plaire, il se mêle au déluge de compassion spontanée, il profite du désarroi des Britanniques et au final, la vision de Stephen Frears ne le rend pas très sympathique.
La Reine, au départ monstre froid, indifférente, inhumaine, parvient paradoxalement à nous émouvoir, probablement parce quelle est un vrai personnage de cinéma, décalée, assumant son incompatibilité avec la détresse populaire, fascinante et exerçant cet étrange charme en premier lieu sur le personnage de Tony Blair. Il est dailleurs étonnant, au vu des préjugés que lon peut avoir sur ce dernier, que sa seule colère montrée dans le film, sincère et véridique (?), est une défense de la Reine et de linstitution monarchique.
Il est peu probable que le film attire en France autant de spectateurs quen Grande Bretagne, mais cest incontestablement un très bon Stephen Frears.