Fabian Bielinsky fait son retour avec un polar à peu près aux antipodes de son film précédent : la retenue se substitue au strass et aux faux semblants ,la morale irrigue des personnages qui n'étaient que des joueurs ,un récit trouble ,écorché remplace la mécanique d'horlogerie ...
Un grand film sur la violence d'abord :
le personnage que l'on suit est une ombre ,un taxidermiste silencieux ,effacé qui vit de cadavres d'animaux mais qui se refuse à les tuer ,qui élabore des braquages de haut vol mais qui se refuse à les entreprendre ,qui rêve d'aimer une femme mais qui ne peut aimer la sienne .
L'homme qui n'était pas là des frères Coen précipité par le cinéaste argentin dans une sombre histoire de meurtre et de braquage ,mis face à face à la violence ,le son assourdissant des détonations et des coups étant là pour nous rappeler qu'ici rien n'est gratuit ,et que tout est bien réel.
Cet homme est épiléptique,au cours de ces crises ,ou plutot dans le laps du temps qui les précède (el aura) il entrevoit une faille, un passage,un basculement possible vers quelquechose d'autre .
Le cheminement d'un homme vers ses pulsions et la révélation de ces frustations,la confrontation de l'image que l'on a de soi à ce que l'on est ,tel est le thème central de ce polar noir et triste.
Ce personnage c'est Ricardo Darin ,déjà dans les 9 reines,un acteur d'une vérité absolue qui délivre une prestation tout à l'économie ,de mots,de gestes mais pas d'émotion .Un polar atypique (récit,cadre,héros,personnages) mené à un rythme très bas ,un seuil oû ne survivent que les hautes densités ,et Bielinsky a du coffre et des nerfs ,alors on s'accroche car chaque plan est riche ,pèse ,marque ,on s'immerge,on baille un peu mais dans l'ensemble c'est atrocement maitrisé et en même temps tout à fait mystérieux .
A noter un final d'une rare ambiguité .
Un film noir,profond ,contemplatif et tourmenté à la fois ,une rareté !!!
A ne pas rater .