Lorsque l'on voit un film tiré d'une oeuvre romanesque, on a toujours tendance à faire la comparaison. Or, ici, celle-ci est loin d'être à l'avantage du film de J.D. Verhaeghe. En effet, il a voulu donner à l'histoire un côté réaliste, "terroir", et pour ce faire, il a gommé tout ce qui faisait la beauté et le charme du texte d'Alain-Fournier: le mystère, l'aventure, la passion. Ici, certes, les images sont jolies, mais sans épaisseur, et l'on suit le récit sans aucune passion... Et pourquoi avoir changé de 20 ans l'époque? Pourquoi avoir modifié la fin, créant là un grave contre-sens?
Que dire enfin de l'interprétation? A côté des solides P. Torreton, JP. Marielle et V. Stroh, dont les rôles sont assez peu importants, les trois personnages essentiels sont de vraies "erreurs de casting": Clémence Poésy est charmante, mais n'incarne en rien le charme acidulé d'Yvonne de Galais (ce que Brigitte Fossey réussissait fort bien dans la version 1967- très réussie- de Jean-Gabriel Albicocco). Nicolas Duvauchelle incarne un Meaulnes bien peu aventurier, et Jean-Baptiste Maunier, s'il sait au début du film être un François Seurel assez convaincant, ne peut résister aux problèmes de l'âge, et devient franchement ridicule affublé d'une moustache pour expliquer son passage à l'âge adulte, que le jeune acteur est loin d'approcher... Florence Thomassin, la mère de Meaulnes, minaude autant qu'elle peut, et le personnage de Frantz de Galais est à peine esquissé: pauvre Malik Zidi! Seul bon point dans cette interprétation hybride et décevante: le charme acide d'Emilie Dequenne, adorable Valentine.
Mieux vaut donc se replonger avec délices dans le superbe roman d'Alain-Fournier, ou encore essayer de voir ou revoir la version d'Albicocco. Lui , au moins, avait su rendre l'atmosphère du roman!!