Les cliquetis d’une horloge, objet du temps, sonnent dans la pénombre d’un écran noir. Tout va très vite s’accélérer dans le tunnel temporel de «Youth without youth» (USA, 2007) de Francis Ford Coppola. L’odyssée de ce linguiste universitaire dans l’espace temporel de son inconscient est l’occasion pour Coppola, sur son retour, d’ériger une expérience nouvelle. Nouvelle en un sens, par son format vidéo haute-définition. L’esthétique du film se voit donc libéré par une aisance de tournage, fournissant un format cinématographique plus malléable. La révolution numérique est en marche, bien que le fantôme de la pellicule hante encore le terrain du film. Notamment lors de la scène en Inde où une caméra de 1960 filme, le bruit de la pellicule s’adjoignant au monde enregistré. Comme le cinéma qui s’acquitte de contraintes grâce à la «légèreté» du numérique, Dominic Matei (Tim Roth), personnage central, se dégage de son enveloppe corporel pour naviguer dans le fleuve du temps. La scène est belle quand Matei, frappé par un coup de foudre spectaculaire et outrageusement numérique, gît calciné sur le parvis en même temps que s’embrase la toile de son parapluie, n’exposant plus que les os de l’objet, que l’essence de l’être. Le voyage, on peut même parler d’odyssée, de l’homme dans son inconscience permet au temps de se ralentir. A un tel point qu’il recule. C’est ainsi que Matei rajeunit, revient sur ses erreurs, refait sa vie. Le film ne serait que cet instant limitrophe à la mort où l’on voit, comme le dit l’expression, «sa vie défiler devant soi». Coppola donne la chance à son personnage, probablement comme il aimerait se la donner, de revenir sur ses erreurs pour ne plus les commettre. Matei doit, pour donner un meilleur aspect à sa vie, faire montre de sacrifice, perdre une deuxième fois son amour. Il n’y aura pas de troisième tentative, de troisième rose, pour la reconquérir. C’est bien là la question qui reste en suspens : où mettre la troisième rose ?