In-Su est éclairagiste de concert. Un jour, il reçoit un appel : sa femme vient d'avoir un accident et elle est grièvement blessée. Quand il arrive à l'hôpital, il apprend qu'elle était dans la même voiture qu'un homme, lui aussi dans le coma. Avec l'épouse de ce dernier, ils récupèrent les effets de leurs conjoints et découvrent qu'ils étaient amants. Voisins de chambre dans l'hôtel en face de l'hôpital, ils s'évitent d'abord, chacun enfermé dans sa propre souffrance. Mais quand ils doivent se rendre aux obsèques d'un tiers victime de l'accident, confrontés à la violence du reproche, ils sont contraints de partager cette insupportable douleur.
Coincés dans une ville de province, partagés entre le devoir, la rancune et le chagrin, ils se rapprochent, redécouvrent la possibilité de sourire même furtivement, et finissent par s'aimer. Mais que deviendra leur amour quand les victimes se réveilleront ?
Ce thème a déjà été traité dans le cinéma récent : dans "L'ombre d'un soupçon", de Sidney Pollack, Kristin Scott-Thomas et Harrisson Ford suspectaient leurs compagnons décédés dans un accident d'avion d'avoir eu une aventure. Et Maggie Cheung et Tony Leung dans "In the Mood for Love" de Hong Kar Waï se rapprochaient après la découverte de la liaison de leurs conjoints.
Mais ici, la particularité de l'histoire réside dans le "risque" de voir sortir du coma les victimes de l'accident : elles ne sont pas mortes comme chez Pollack, mais elles ne sont pas non plus vraiment vivantes, comme chez Hong Kar Waï. In-Su et Seo-Young doivent s'occuper de leurs corps, en attendant de pouvoir déverser leurs reproches.
Et lors d'un premier repas au restaurant, un peu grisée, la timide Seo-Young lance comme une bonne plaisanterie "Et si nous couchions ensemble, rien que pour les embêter ?", et In-Su se contente de rire, un peu gêné... Pourtant moralement libérés du devoir de fidélité par l'adultère qui les a réunis, ils doivent quand même se cacher pour vivre leur amour dans une société corsetée par les codes sociaux et familiaux.
Il y a bien quelques longueurs, surtout aux deux-tiers du film. Mais cette langueur est peut-être nécessaire pour nous faire partager l'incertitude de la situation des deux héros, la répétition de ces journées dans une lumière bleutée, couleur universelle de l'hôpital. Les deux acteurs sont excellents : Bae Yong-jun, juvénile et lumineux, et Son Ye-jin, avec de faux airs de Zhang Ziyi, tour à tour soumise et mutine.
Et puis, quel plaisir renouvelé de voir ce cinéma asiatique, où l'on a compris que le plan fixe est la base de la narration, à partir du moment où on a quelque chose à raconter, au contraire de ces cinémas parkinsonniens où le tourbillon "virtuose" cherche à combler le vide !
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