Un film qui inspire tant la contemplation que la fascination. Avec "Barrage", Raphaël Jacoulot dresse un tableau très austère, ou comment une mère ne conçoit pas au plus profond d'elle même de voir son fils grandir et s'émanciper. Une première oeuvre réussie, des acteurs très sobres, une atmosphère lugubre, inquiétante, un scénario convaincant, qui n'emprunte pas la voie triviale de la "mamma" italienne envahissante sous le registre de la comédie, loin aussi de tout sentimentalisme primaire. Non, avec Barrage, on est au-dessus de cela : le rapport mère/fils est dépeint sous un aspect à la fois psychologique, dramatique, et même surréaliste. On apprécie ainsi la métaphore de l'eau, qui inonde peu à peu cet univers ostracisé, noyant le personnage de la mère (bien campée par Nade Dieu) dans la paranoïa, la folie, l'angoisse, la mélancolie. Le fils n'est plus qu'un objet manipulé à souhait par sa mère, qui, par une réclusion forcée dans une maison isolée, se coupe du monde vivants (fait matérialisé par un vrai barrage), en proie à la déperdition. L'inquiétude générale du récit est renforcée par des airs violoncelle raisonnablement distribués, et surtout par un environnement naturel vaste, rachitique, mais pénétrant. Bref, un sujet pertinent, une intrigue prenante, un premier film convaincant.