Comme je suis d'humeur sociable aujourd'hui, je traîne sur le Net et je me regarde le nombril en relisant des textes que j'ai écrit ici ou ailleurs.
Et ici - enfin là où je me suis fendu d'un avis ou d'une critique sur un bouquin ou un film - je m’aperçois que plutôt que d'estimer le support en argumentant pour illustrer ma note, je me fends le plus souvent d'une mise en contexte finalement assez nombriliste.
Mais je sais pourquoi.
Déjà, parce que parler des acteurs et de leur filmo, du réal et de ses œuvres passées, de la façon dont le truc est cadré ou la structure musicale structurée, il y a ici des gens beaucoup mieux placés que moi pour le faire - ou s'y essayer.
Ensuite, se positionner sur ce que l'auteur a voulu dire - ou faire dire - et les références plus ou moins cachées qui renvoient à de nébuleuses théories philosophiques, complotistes, WOKistes et autres machins-en-istes, je suis passé à coté : moi, j'ai juste regardé un film, couillon que je suis (bon OK, c'est probablement aussi inhérent au genre de films "peu exigeants" que je regarde... :-)).
Donc moi mon truc, c'est le contexte et ce que le film m'évoque !
Et ça expliquera aussi souvent un décalage avec un critique plus jeune.
A ce titre, the Thing est probablement un super exemple, et je m'explique : si je regardais the Thing aujourd'hui - et devais l'estimer de façon un peu clinique sans le remettre "dans son jus" - je pense que je lui collerais un 7 ou un 8.
Pourquoi je lui colle 5 étoiles ?
Laissez moi reprendre la main en le remettant dans son contexte et vous allez comprendre...
En 1982, j'habite en province et je suis un "jeune adulte", ce qui veut dire que je ne vote pas encore mais que j'ai déjà des copines, une mobylette et une bande potes. C'est l'époque ou on fait des soirées en dansant sur de la new wave, du rock et du ska, des jeux de rôles sur table, et où on écume les vidéo-clubs naissants pour s'enquiller 4 ou 5 films - idéalement un mélange comique/horreur/action/porno - à la suite, le samedi soir.
A l'époque, je lis aussi beaucoup de comics, de bouquins style SF/polar/fantasy, mais coté magasines, Starfix n'existe pas encore et Mad Movies et l'écran fantastiques sont encore des fanzines qu'on ne trouve pas dans le Loiret.
Donc pour se tenir au jus niveau cinoche, c'est pas simple...
Alors on fait de la pêche à la grenade : on va voir au ciné globalement tout ce qui ressemble à un film de genre, et niveau qualité, ça va aller du Lac des morts vivants à Evil Dead...
En 1982, on connaît tous Carpenter grâce à son Halloween et on peine à se remettre (en bien !) de New York 1997. Imaginez quand on apprend que the Thing c'est le même réal avec à nouveau le mec qui incarnait Snake : c'est pas dur de convaincre la bande d'aller se faire la toile !
Quelle erreur...
Ma petite amie de l'époque a quitté la salle (et moi dans la foulée...) après la scène du chien, flanquée de trois autres copines (les deux survivantes n'osant même plus bouger pour s'échapper, sont restées terrées SOUS leurs blousons, les mains sur les oreilles). CA, c'est le retour concernant mon groupe direct d'amis. Dans la salle, c'était pareil : entre ceux qui se barraient en cavalant et ceux qui glapissaient des "mon dieuuuu" et autres "ça suffit, j'en peux plus..." (sans raison érotique aucune), c'était l'hécatombe !
En sortant, mes amis m'ont collégialement engueulé comme si c'était MOI qui avait fait le film.
Et ils se sont montrés encore plus désagréables parce que j'avais adoré.
Pas grave, je suis retourné le voir le lendemain avec une autre bande de copains alléchés par les retours terrifiants du premier groupe (pour le même résultat... :D)
Alors OK, c'était la province !
OK, c'était les années 80 !
Mais tout ça pour dire que - remis dans le contexte - the Thing a été un putain de choc thermique !!!
Déjà, côté effets spéciaux, comprenez qu'on avait JAMAIS VU CA !!!
Ici, pas de CGI de merde, que du méca bien palpable avec le raisiné qui gicle et la chair qui se déchire. C'était Rob Bottin au sommet de son art !
C'était... organique !
Crade !
C'était NOUVEAU !
Et coté suspense, c'était au top !
Un putain de Alien dans le froid !!!
AVEC SNAKE PLISSKEN QUI A DEUX YEUX, Z'MAGINEZ ?!
Avant the Thing, le film qui m'avait terrorisé était justement Alien.
Aussi un peu Evil Dead, même si le comique contrebalançait très intelligemment la tension.
Après the Thing, il n'y a plus eu d'équivalent.
J'ai adoré les Freddy, Hellraiser, Evil Dead 2 et consorts, dévoré les Cronenberg et les Carpenter qui ont suivi, tous les slashers à la noix qui sortaient en VHS... D'autant que ça n'arrêtait plus : les films de genre étaient enfin devenus des films qui rapportaient et il y en avait beaucoup et tout le temps !
Mais je n'ai plus jamais eu aussi peur au cinéma...
Et ça, ça vaut 5 putains d'étoiles !!!