Robert Wise est décidément un vrai touche-à-tout, malheureusement jamais reconnu au même titre que le seront Spielberg ou Kubrick. Guerre, science-fiction, drame, péplum... et entre deux classiques de la comédie musicale gentillette, il nous pond "The Haunting", une référence du cinéma d'horreur ! On y suit un scientifique qui embauche un petit groupe de personnes, pour mener un expérience paranormale, au sein d'une maison réputée hantée. Evidemment, leur séjour deviendra vite inconfortable. Passée l'introduction des plus inquiétantes, on peut reprocher au film son démarrage un peu lent ou son utilisation poussive de la voix-off. Mais une fois que les choses sérieuses commencent, Robert Wise se montre particulièrement à l'aise et inventif en matière d'horreur. Globalement, à l'inverse de son médiocre remake qui nous envoyait dans la figure une palette de CGI grand-guignol, cette version de 1963 mise tout sur le suggéré. Le réalisateur a compris que la terreur est beaucoup plus efficace quand elle vient de l'atmosphère et des réactions des acteurs, plutôt que d'effets spéciaux. Et à ce niveau, Robert Wise se lâche ! A commencer par les lieux, sinistres au possible. Un extérieur grandiloquent, presque organique (le manoir d'Ettington Park, photographié en infrarouge). Et des intérieurs étranges, construits pour les besoins du film. Peu d'angles droits, des pièces énormes dont les moindres recoins sont éclairés pour mettre mal à l'aise les personnages, des plafonds oppressants (là où les décors de studio n'en possèdent normalement pas), et une décoration rococo envahissante. Le tout filmé avec un panel de techniques anxiogènes, subtilement dosées : plans débullés, contre-plongées, double focales, travelings frénétiques malins pour l'époque, jeux de miroirs, et on en passe. Sans compter un montage qui perturbe volontairement le spectateur, l'empêchant de se repérer dans le temps ou l'espace (il est régulièrement difficile de dire s'il fait jour ou nuit). Un style dynamique et réfléchi, qui aurait pu facilement être un exercice de style stérile, mais il n'en est rien. "The Haunting" est un film d'horreur qui met réellement mal à l'aise, même des décennies après sa sortie, et dont quelques scènes restent en tête. D'autant plus qu'il propose des thématiques intéressantes, telle que la tension sexuelle entre une protagoniste fébrile (excellente Julie Harris), un scientifique protecteur, et une lesbienne féline (l'un des rares rôle lesbiens de l'époque qui ne soit pas négatif !). Mais surtout la folie, l'état d'esprit de la protagoniste se dégradant au fur et à mesure qu'avance l'intrigue (pour l'anecdote, Julie Harris souffrait réellement de dépression durant le tournage !). Une référence du genre, qui a peu vieilli.