En guise de premier passage derrière la caméra, Billy Bob Thornton se donne un rôle d’attardé criminel, un personnage qui réussit, après une introduction l’annonçant comme un être terrifiant, à se montrer si attachant qu’il deviendra un personnage mémorable. Le projet de ce film tenait visiblement à cœur pour l’acteur-réalisateur qui dut s’endetter pour présenter un court métrage d’introduction à Sundance qui lui permit de trouver un financement de la part de la Miramax. C’est sûrement moins pour le défi qu’était d’incarner cet individu complexe que Thornton a voulu tourner ce drame intimiste mais bien, comme le démontre l’introduction du personnage du beau-père homosexuel, pour démontrer la puissance nauséeuse des préjugés dans l’Amérique profonde. En allant filmer son histoire de complicité, un peu convenu et à la finalité prévisible, entre ce marginal et un jeune dans son Arkansas natal, le réalisateur capte avec justesse le malaise lié à son intégration dans un monde rural assez rude. Et, même si les courtes apparitions de Jim Jarmusch (qui venait de le diriger dans Dead man) et surtout de Robert Duvall sont mal exploités, c’est bien la qualité des acteurs, Thornton en tête, sa prestation étant tout bonnement exceptionnel, qui a réussi à faire de son long-métrage un succès public aux Etats-Unis injustement méconnu en France.