Harakiri est un film qui ressemble à première vue à bon nombre de films de samouraïs tels qu'on a pu en voir: reconstitution historique, noir et blanc, univers masculin, grandes familles japonaises,... Le film recèle également quelques combats magnifiquement mis en scène. Mais rapidement, Harakiri révèle sa vraie nature, qui le place bien au-dessus d'un simple film de genre. En effet, le réalisateur Masaki Kobayashi ne cherche pas simplement à s'immerger dans l'univers des samouraïs à l’époque Tokugawa, il a surtout cherché à interroger et critiquer les valeurs et traditions de cette époque. On devine que la critique porte jusqu’à l’époque moderne et à l'histoire récente du Japon, quand suicide et mort étaient présentés comme autant d’actes de courage.
Kobayashi critique avant tout l'attitude hautaine, voire méprisante, dont ont pu faire preuve ceux qui se croyaient membre d'une élite, respectueuse du bushido, par opposition avec ces samouraïs sans emploi (ronin) obligés de vendre parfois jusqu’à leurs lames pour survivre. Engoncés dans leur suffisance, les premiers ne peuvent voir la détresse des seconds.
C'est là qu'intervient le personnage magnifiquement incarné par Tatsuya Nakadai, qui vient éventer la vanité de ces nobles, plus courtisans que guerriers, se prétendant prêt à mourir au nom du bushido (chose bien aisée en temps de paix):
il déshonore trois des plus estimés samouraïs du clan en coupant leur chignon, et, loin de se donner la mort, ils se font porter malade pour que leur chignon repousse!
Finalement, le personnage de Tatsuya Nakadai, ancien combattant lors de l’ère Sengoku désormais révolue, est bien le dernier dépositaire de cet honneur que les nobles prétendent encore incarner. Mais loin d'en tirer une quelconque fierté, il sait se montrer humain et compréhensif, une leçon que la pauvreté et la souffrance lui ont dictés.
C'est là sans doute le principal message de ce film: ne jamais laisser les codes sociaux, le poids du groupe, de la renommée, venir étouffer notre humanité.