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Nelly M.
99 abonnés
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4,0
Publiée le 22 octobre 2012
Il n'y a guère que le "je ne sais pas" d'un peu faiblard dans les dialogues de ce classique où rayonne Michèle Morgan à ses débuts, visage fatal, silhouette de femme bien faite, face à Raimu le débonnaire, un marchand de vélos sans histoire, intériorisé (par bonheur délesté des poussées théâtrales qui le rendirent un peu cabot par la suite). Embourbé pourtant entre paternalisme et dérapage viril. C'est toujours équivoque, assez culotté au plan des moeurs pour un film d'entre-deux guerres... L'intrigue de départ tient parfaitement la route, renforcée par deux prétendants et la jalousie de madame. Tous à leur façon perdent le nord... Le spectateur aussi, qui se surprend à devenir sceptique concernant cette angélique créature, trop renversante pour ne pas avoir été envoyée par le diable ! L'ambiguïté est à son comble vers l'issue des plus scabreuses... et qui réussit pourtant à convaincre de son bien-fondé.
Parlons d'abord des acteurs puisque dans ce film Raimu crève encore une fois l'écran de son talent. En revanche Michèle Morgan peine à être à la hauteur (17 ans au moment du film mais elle en fait 10 de plus !), Carette est transparent et les seconds rôles sont dans l'ensemble assez fade mais les amateurs de chansons rétro auront reconnu la belle Lyne Clevers en prostituée, témoin au procès. La mise en scène est assurée sans temps mort et avec un bon sens de la progression dramatique. Le scénario est bancal, c'est du Marcel Achard, auteur doué mais peu méticuleux, ainsi nous n'aurons jamais la réponse à certaines questions laissées en suspens pendant le procès, ainsi la scène de l'église est malhabile (Carette n'avait nul raison de s'y rendre) et la situation de Morgan dans le magasin de Raimu n'est pas parfaitement exploitée.spoiler: Passons aussi sur la fausse fin, Achard et Allegret n'ont pas voulu que ça finisse en drame , il n'aurait plus manqué que ça ! Malgré ses défauts le film se regarde sans déplaisir (grâce à Raimu) mais ça n'a rien de génial.
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3,5
Publiée le 17 septembre 2019
L'angèlique Michèle Morgan fait chavirer les coeurs dans ce classique attendrissant du cinèma français d'avant guerre! L'immense Raimu saura faire preuve de flaire en tournant à ses côtès et en acceptant d'interprèter le rôle titre! Avec le "Gribouille" de Marc Allègret, Morgan dèbute pied au plancher au cinèma dans ce joli drame plein de tendresse, d'après Marcel Achard! Raimu y tient brillamment le rôle d'un brave commerçant que le sort dèsigne pour être jurè dans un procès d'assises! Le sort de la jeune accusèe le touche, puis le bouleverse! il fera son devoir jusqu'au bout et pourtant il est interdit au jurè de parler du procès même en famille! spoiler: Acquittèe, il l'engage dans son commerce (« Au rendez-vous des cyclistes » , toute une èpoque malheureusement rèvolue), ce qui ne manque pas de provoquer une multitude de conflits dans sa propre famille! Les cours d'assises deviennent à cette èpoque le dècor de prèdilection! Et le père Raimu en connait un rayon dans ce domaine! A l'amour n'est que facile excuse surtout quand on se nomme "Gribouille" et qu'on n'a d'yeux que pour la future actrice du mythique "Quai des brumes"...
« Vous avez sur eux la meilleure influence! » On retrouve toute l’ironie de cette phrase quand on assiste à l’aveuglement de leur amour. Le drame est pourtant imprévisible jusqu’à la dernière scène où l’amour ne va pas triompher. Beau portrait d’un Raimu désarmé.
Le film en lui même n'est pas inoubliable, Raimu assure le spectacle à moindre frais et le scénario joue un peu avec le doute et les préjugés sans chercher cependant à trop élever le niveau de la réflexion. Non c'est surtout la naissance d'une étoile du cinéma en la personne de Michèle Morgan qui joue très bien en plus d' illuminer le film.
1937, ça fait loin. Michèle Morgan, un peu moins déjà. Elle avait alors dix-sept ans – un de moins que sur le Quai des Brumes qui lancera une carrière de soixante ans. Ce lien est déjà surnaturel entre nous & Gribouille, tenu par Raimu, cet homme ”grand, gros et l’air bonhomme”, comme il le dit lui-même, né en 1883 : ce sont trois siècles qui se superposent & qui nous contemplent.
On se morigènerait à trouver cela si étonnant si l’on n’y trouvait pas également matière au travers des dialogues. Le florissant cinéma d’avant-guerre convoyait un langage surtout parisien & souvent teinté d’argot qui s’est prêté pendant une décennie à l’oralité artistique (entre le parlant & la guerre), ce qu’on découvre ici comme au détour d’une découverte trop humble, d’une œuvre semblant destinée à recevoir l’étonnement & la reconnaissance avant de retomber aussi vite dans l’oubli.
Le vocabulaire châtié se mêle en cour de justice à des sous-entendus doublement explicites – par leur contenu & leur clarté – au-dessus desquels le noir & blanc tour à tour sous-exposé puis surexposé, presque surnaturel, semble un effet spécial de mauvais goût comme il est tellement décalé avec le discours. Les gags sont discrets mais le verbe est soutenu, & le discours d’avant-garde est si suranné qu’on a moyen de le trouver brillant pour sa manière de voir juste un quart de siècle dans le futur, comme si l’œuvre pouvait servir à la mesure précise de l’attardation subie en France à cause de la guerre – ça doit être mon état d’esprit du moment car j’ai tenu le même discours pour L’Opéra de Quat’sous de Pabst, vu deux jours auparavant, mais le lien y est bien.
Sans doute Gribouille est-il trop humblement brillant, trop indécis quant à adopter des chapitres de longue haleine (comme le tribunal) ou des scénettes de famille. On ne s’y retrouve pas car Raimu & Morgan préfigurent un des premiers chocs générationnels du cinéma dont l’alchimie ait fonctionné à merveille. Il nous reste l’attendrissement de voir qu’on ne savait pas en tirer tout le potentiel, & la perplexité rapport à la paternité de cette comédie sans quiproquos ni outrance : proto-cinéma français ou branche stylistique éteinte ?
Le personnage, charmant mais larmoyant, de Michèle Morgan donne un tour mélodramatique quelque peu artificiel et désuet au film.Et s'il n'était quelques mimiques bienvenues de Raimu, le procès qui ouvre le film serait réellement ennuyeux. C'est d'ailleurs, en dehors de la troublante et glaciale physionomie de Michèle Morgan, la présence de Raimu qui donne toute sa valeur, en tout cas son intérêt, à l'histoire. Le comédien exploite ici la dualité qu'on lui trouve chez Pagnol, une attitude empreinte de gravité et désamorcée par la fantaisie méridionale. On regrettera que, ayant recueilli la jeune femme acquitée, ce brave commerçant témoigne assez mal, d'un point de vue psychologique, de son paternalisme ambigü. Le drame qui se dessine alors est un rien complaisant et prévisible, en dépit que Raimu, dans un rôle fait pour lui, provoque quelques scènes vraiment amusantes.
C’est le troisième film que Marc Allégret a sorti en 1937, et c’est peut-être la cause de l’impression de bâclé qui s’en dégage : scénario et dialogues souvent improbables, Raimu qui en fait trop, psychologies des personnages vacillantes, longue scène du procès caricaturale avec effets comiques faciles… Seule l’impeccable Michèle Morgan tire son épingle du jeu.
Il faut rendre justice à ce film qui soulève de nombreuses questions pourvu que l'on veuille se les poser avec le réalisateur ( décision d'un jury, confiance en l'individu, en ses proches, a priori social, "ethnique" , bonté , duplicité, doute, amour passion ou conjugal ...) qui le fait à travers un récit exemplaire , touchant , teinté d'humour , où Raimu excelle en face de M. Morgan séduisante dans une situation qui préfigure Théorème de Pasolini. Noir et blanc , ambiance petite bourgeoise et mise en scène d'époque, agréablement surannées; questions intemporelles .