« The grey fox » de Phillip Borsos constitue une véritable pépite à découvrir. Ce réalisateur canadien trop tôt disparu (1953-1995) qui à la suite de ce film fera une courte apparition à Hollywood pour un film plus formaté, livre un western d’une sobriété exemplaire qui entreprend de dresser très finement le portrait romancé de Bill Miner, un voleur de diligence surnommé « Le renard gris » ou « le gentleman cambrioleur » en raison de la politesse dont il faisait preuve lors de ses attaques à mains armées. Plusieurs fois arrêté et emprisonné, Bill Miner a dû se reconvertir dans l’attaque de chemin de fer au début du XXème siècle. La légende lui attribue même la première attaque de locomotive qui eut lieu le 10 septembre 1904 à Silverdale en Colombie Britannique à seulement 40 kilomètres de Vancouver. L’aura de Miner prenant de l’ampleur avec le temps, on prétend qu’il aurait été à l’origine de la célèbre expression « Haut les mains ! ». Phillip Borsos et son scénariste John Hunter ramassent certains événements de la biographie forcément parcellaire de Miner pour dresser un portrait qui tout en entretenant la légende, restitue l’atmosphère d’une époque et la liberté qui était celle de ces hommes ayant choisi une vie hors-la-loi et aventureuse. Le choix de Richard Farnworth, ancien cascadeur spécialisé dans le western et reconverti acteur, s’avère particulièrement judicieux. Encore très alerte à 62 ans, Farnworth qui a déjà tourné avec Clint Eastwood dans « Josey Wales hors-la-loi », apporte tout son flegme et son assurance à ce bandit certes très réfléchi et calculateur mais que rien ne peut ramener à une vie dans les rails, préférant galoper juste à côté avec son cheval pour stopper la locomotive qui roule dessus. Même l’amour sincère qu’il éprouve pour une jeune photographe féministe (Jackie Burroughs) ne le fera pas complétement changer de mode de vie. Le tout filmé de manière somptueuse par le chef opérateur anglais Frank Tildy qui venait de mettre en lumière « Les duellistes » de Ridley Scott (1977), constitue une immersion totale dans les paysages grandioses du Canada et dans une époque qui semble désormais bien lointaine et presque irréelle. Cette formidable prestation ne constituera pas le point d’orgue de la modeste carrière de Richard Farnworth puisque juste avant sa disparition en 2000, David Lynch fera appel à lui pour « Une histoire vraie » qui voyait un vieil homme entreprendre un voyage de 386 kilomètres sur une tondeuse à gazon pour rendre visite à son frère malade. Jusqu’au bout, l’acteur aura été un homme libre, qui se sachant condamné par la maladie, préférera mettre fin à ses jours le 6 octobre 2020. Deux films marquants dans une filmographie ramassée, tous les acteurs de second plan ne peuvent peut-être pas en dire autant.