Il n’y a pas que les vainqueurs qui ont souffert de la seconde guerre mondiale, les bombardements alliés aussi ont laissé leur empreinte dans la mémoire nipponne. Isao Takahata, dix ans au moment des faits, avait sans doute à cœur de se joindre au concert des souvenirs collectifs. Basé sur un roman local connu pour être inadaptable, Le tombeau des lucioles est un conte pessimiste, sombre, triste, désespéré, cruel, pénible, funeste, sinistre, enfin vous voyez. Il nous entraine sur les pas de deux gosses, un frère et une sœur, pris sous les feux d’une guerre qu’ils ne pourront jamais comprendre. Fuyant la menace qui plane dans le ciel en se terrant sous abris, mendiant à qui voudra quelques légumes, une poche de riz, ils s’accrochent à leurs restes d’enfance ; autour, les grands cherchent juste à survivre. Troc dans les marchés noirs, hôpitaux surchargés, bûchers aux morts, immeubles en ruine, le réalisateur brosse un quotidien irrespirable. Et pour cela, il choisit un graphisme traditionnel, sobre, tout en symboles et en douceur paradoxale. On est loin des tornades ébouriffantes du concurrent Miyazaki : le but ici n’est pas d’en mettre plein les mirettes, mais de les emplir de larmes. Et là-dessus, le cinéaste met le paquet. Un peu trop même, peut-être.