La phrase d’accroche sur l’affiche de l'époque (Le vert paradis des amours enfantines… – issue d’un poème de Baudelaire, Moesta et errabunda) est d’une ironie assez cruelle, au regard du drame qui se joue dans le film. Car, si les deux jeunes protagonistes incarnent l’innocence de l’enfance, si leur amitié et leurs jeux sont imprégnés de tendresse et font jaillir une certaine poésie, leurs vies, marquées par la guerre, la mort, la rudesse ou la bêtise des adultes, est tout sauf un vert paradis. Ces enfants imitent les jeux des adultes avec la mort, mais, eux, ne connaissent ni hypocrisie, ni rancœur. Ils inventent un univers où la mort, qui embrasse tout être vivant, quel qu’il soit, doit être belle. Jolie idée que celle du cimetière des animaux. Et jolie façon de parler du deuil à hauteur d’enfant.
Cette adaptation d’un roman de François Boyer, devenue un classique du cinéma français, traverse le temps avec une belle simplicité, un sentiment de tristesse tempéré par une drôlerie légère, et quelques accents déchirants (les « Michel ! Michel ! » criés par la petite Paulette à la fin du récit). La composition incroyable de Brigitte Fossey (alors âgée de 5 ans) et la célèbre musique de Narciso Yepes contribuent au lyrisme d’un ensemble qui n’est cependant pas parfait : clichés sur le monde paysan et sur les « Parisiens », interprétation inégale, réalisation et montage un peu « raides »…
Ces Jeux interdits sont considérés comme l’œuvre la plus populaire et la plus émouvante de René Clément, au sein d’une filmographie qui, au-delà de sa qualité, a parfois été qualifiée de froide et hétéroclite.