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GéDéon
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3,0
Publiée le 21 décembre 2024
En 1927, Abel Gance signe une gigantesque fresque historique en retraçant le parcours de Napoléon. Compte tenu de son impressionnante durée (plus de sept heures de pellicule), ce long métrage a été coupé en deux parties lors de sa restauration. Le premier chapitre évoque l’adolescence de Bonaparte jusqu’à son ascension militaire, tandis que le second développe sa relation amoureuse avec Joséphine de Beauharnais jusqu’à la campagne d’Italie. En raison des imposants frais financiers, le réalisateur n’eut jamais la possibilité d’achever le tournage de la vie de l’empereur. Néanmoins, cette œuvre constitue une référence tant la mise en scène est fulgurante. Entre les centaines de figurants, la reconstitution d’époque et les innovations technologiques (par exemple, l’utilisation de trois caméras permettant de produire des images panoramiques), cette épopée se contemple telle une peinture animée. Bref, une grande expérience cinématographique au service de l’Histoire.
La seconde partie de "Napoléon vu par Abel Gance" explore avec intensité les tumultes de la Révolution française et l'ascension progressive de Napoléon Bonaparte. Le film s’ouvre sur des scènes marquantes liées à la violence révolutionnaire, soutenues par des effets de montage rapides et audacieux qui renforcent la tension dramatique. Les innovations techniques, telles que les surimpressions et les travellings fluides, témoignent de l’avant-gardisme de Gance, repoussant les limites du cinéma muet pour immerger le spectateur dans le chaos révolutionnaire. Cependant, le rythme narratif est parfois ralenti par des scènes excessivement détaillées. Malgré ces faiblesses, cette deuxième partie demeure une œuvre magistrale, à la croisée de l'art et de l'histoire, avec des centaines de figurants mobilisés pour recréer l’effervescence de cette époque. Une expérience à ne pas manquer pour les passionnés d’histoire et de septième art.
Deuxième partie consacrée à l'ascension militaire et à la naissance de l'amour, dans laquelle Abel Gance déploie son inventivité pour en faire un spectacle à la limite de la fantasmagorie, entre les filtres de couleurs et les mouvements de caméra, les collisions d'images à la signification lourde. Dans ce tourbillon, la figure d'Albert Dieudonné est transcendée et écrase tout sur son passage, avec une palette d'expressions qui s'accordent totalement avec le personnage. L'emphase est au rendez-vous jusqu'aux dernières minutes dans ce spectacle total.
Génie du cadrage et de la lumière, inventeur, précurseur, visionnaire, Abel Gance livrait au monde son chef d'oeuvre intercontinental en 1927. Des fragments jaunis et figés dans les mémoires des cinéphiles, après ce travail inouï de restauration, surgit un ouvrage vivant, lyrique mais aussi ponctué de légèreté parfois et souvent d'humour, construit comme une fresque de Delacroix. Grâce à l'excellence et à la minutie des différents corps de métier attelés à la restitution de l'oeuvre, grâce à une coordination aussi exemplaire que pour la restauration de Notre Dame de Paris, le sauvetage de ce monument absolu du cinéma repasse à la postérité pour un nouveau bail, éternel ose-t-on espérer cette fois ! La musique, remarquable pot-pourri orchestré et admirablement dirigé, est à la hauteur de l'ouvrage visuel. Un nouveau chef d'oeuvre, collaboratif cette fois, est né.
En 1921, Abel Gance est déjà un réalisateur français reconnu et célébré depuis le succès de « J’accuse » (1919) dont le titre est inspiré du célèbre article d’Émile Zola paru le 13 janvier 1898 dans « L’Aurore » en faveur du Capitaine Dreyfuss convaincu d’intelligence avec l’ennemi. Le film sorti juste après la fin de la Grande Guerre qui en fait son théâtre d’action sur fond de romance amoureuse tragique a été parfois perçu par la critique comme délivrant un mélange peu orthodoxe et assez confus entre pacifisme et patriotisme. Après avoir assisté en 1921 à une projection de « Naissance d’une Nation » de D. W. Griffith, Gance fut fortement impressionné par la dimension épique du film. Sur le même principe Abel Gance envisage à son tour de rendre hommage à l’épopée napoléonienne, l’Empereur étant mort cent ans plus tôt à Sainte-Hélène, le 5 mai 1821. Une épopée qu’il conçoit sur huit épisodes englobant l’ensemble du parcours du grand homme encore héros national à l’époque. Abel Gance a conçu un projet s’élevant à 20 millions de francs pour l’ensemble des huit épisodes. Le tournage du premier film avec ses trois premiers épisodes (La jeunesse, La Terreur et Arcole) dépassant les 17 millions de francs ajoutés à la faillite de son bailleur de fond principal (l’Allemand Hugo Stinnes), anéantit malgré le succès rencontré en salles, la poursuite de l’œuvre gigantesque entreprise . Les décennies passant, le film amputé et plusieurs fois remonté, est devenu un mythe notamment en raison du nombre de versions et de restaurations qui se sont succédé. Avant la restauration lancée en 2008 par la Cinémathèque Française sous l’égide du chercheur et cinéaste Georges Mourier, Henri Langlois et Marie Epstein en ont proposé une version de 19 bobines à la Mostra de Venise en 1953 suivis par l’historien anglais spécialiste du cinéma muet Kevin Brownlow avec pas moins de trois versions (1979,1983 et 2000) et enfin Bambi Ballard qui déjà commandité par la Cinémathèque Française en présenta une autre en 1992. Francis Ford Coppola grand admirateur du film et de son réalisateur affirme que pas moins de 19 versions auraient été en circulation. Cette quête d’une version définitive entoure le film d’une part de mystère qui fera beaucoup pour son aura. La dernière en date dont on ne peut affirmer qu’elle sera la dernière a été projetée séquencée en deux films de respectivement 3h51 et 3h21. « Napoléon » joyau d’un cinéma muet français jouissant d’un prestige moindre que celui du cinéma allemand des Fritz Lang, Wilhelm F. Murnau, Robert Wiene, Paul Wegener ou du cinéma américain des D.W Griffith, Erich Von Stroheim, Charlie Chaplin et Frank Borzage a été diffusé en intégralité sur une chaîne de télévision nationale avant une exploitation sur support DVD prévue en 2025. En un siècle on ne peut que constater combien l’image de Napoléon a évolué au fil des travaux d’historiens de diverses obédiences ne retenant parfois que l’image d’un dictateur omniscient et obsédé par son propre reflet, le tout au mépris de la vie humaine. Le travail d’Abel Gance notamment pour cette période, la plus glorieuse couverte par les trois épisodes en question, ne remonte donc pas à la surface sur une mer très calme. Assurément pour apprécier le travail titanesque d’Abel Gance en ce XXIème siècle de toutes les incertitudes, il faut regarder le film en le replaçant dans le contexte de son époque. Exercice qui semble de moins en moins à la portée de tout un chacun alors que le bond de géant effectué par le progrès technique pousserait certains à penser que l’histoire désormais commence à l’ère du numérique. Muet, son film trop long, Abel Gance aurait sans doute gagné à plus de concision afin de donner plus de force à son épopée qu’il étire en de nombreux passages notamment lors de la première partie consacrée à l’enfance et à la jeunesse du futur général dont on comprend rapidement que Gance entend convaincre que sous le mioche moqué par les plus grands que lui, couve déjà le génie tactique du pont d’Arcole (l’épisode un peu naïf de la bataille de boules neige dans la cours de l’école de Brienne). Cette partie forcément moins documentée de la vie de Napoléon ne méritait pas autant d’attention de la part d’un réalisateur qui se disperse quelque peu ayant recours à des personnages fictifs superfétatoires qu’il emmènera jusqu’au bout des sept heures de projection. Heureusement la jeune fille de boulanger transie d’amour pour le jeune écolier sera interprétée adulte par la très gracile et photogénique Annabella. L’apparition sur l’écran d’Albert Dieudonné finalement choisi après que Ivan Mosjoukine a refusé le rôle de Napoléon, permet au film démarré en mode mineur de prendre enfin son envol. Complétement investi, l’acteur déjà âgé de 38 ans conscient de tenir ici le rôle de sa vie apporte toute sa fougue et la noirceur d'un regard que Gance ne se prive jamais de filmer en gros plan. Parallèlement au parcours chaotique du jeune Bonaparte au sein d’une armée ankylosée, scandé par des retours en Corse pour contrer les acoquinements de Pascal Paoli (son ex-mentor) avec les Anglais, Gance suit les soubresauts de la fièvre révolutionnaire qui monte jusqu’à l’acmé de la Terreur où Robespierre (Edmond van Daële) et Saint Just interprété par Abel Gance lui-même s’activent à faire couper les têtes qui dépassent. Les moments les plus importants prennent la forme de tableaux grandioses rappelant ceux du peintre Jacques-Louis David lui-même député de la Convention. Une esthétique romantique de la part d’Abel Gance, rendant parfaitement ce que l’imaginaire peut retenir de ces moments de catharsis où la violence prend presque systématiquement le pas sur les bonnes intentions du départ. A partir de la seconde partie, les longueurs sont moins pesantes, le récit retrouvant toute sa force, porté par un Dieudonné en apesanteur. Quand la campagne d’Italie inaugure la période de gloire de celui à qui plus rien ne résiste, arrive alors très à propos le procédé nommé « Polyvision » par son créateur Abel Gance épaulé par André Debrie, ancêtre du Cinémascope qui permet d’obtenir grâce à trois caméras projetant sur trois écrans différents, une image trois fois plus large tout à fait adaptée aux scènes de bataille. L’effet est saisissant, voyant Napoléon à cheval sortir d’un écran pour entrer dans un autre. Belle manière de finir cette entreprise qu’on ne pourrait plus concevoir aujourd’hui où les projets de films se construisent essentiellement sur des bases marketing. Artiste d’un autre temps, quelquefois décrié souvent controversé, Abel Gance a réussi le tour de force de faire encore parler de lui alors que son chef d’œuvre est bientôt centenaire. De quel réalisateur français contemporain parlera-t-on en 2124 ?
Jusqu'à présent, je n'avais jamais eu l'occasion, ni surtout le courage, de visionner le célèbre "Napoléon" d'Abel Gance. J'étais perdu devant les multiples versions et remontages qu'il en existe, et effrayé par la durée gargantuesque de chacune d'elles. En 2024 sort cette restauration, issue d'un travail de fourmi de 16 ans (!) commandé par la Cinémathèque Française. Visant à reconstituer la "Grande Version" présentée en 1927, couvrant essentiellement les années 1792-1796. Et d'une durée de plus de 7 heures... Voilà enfin l'occasion de s'y mettre, et en full HD s'il vous plait ! Et bien... waouh. Le défaut évident est la durée très luxueuse, qui en rebutera plus d'un. Certains passages auraient pu/du être écourtés. Tels que le prologue sur l'enfance à Brienne. Ou le début de la deuxième partie, après le siège de Toulon, où il y a un passage à vide, Napoléon étant en retrait de l'intrigue. Les restaurateurs ont voulu préserver les idées d'Abel Gance de l'époque plutôt que de mettre le rythme au goût du jour. Soit, ça s'entend complètement. Pour le reste, "Napoléon" mérite parfaitement sa réputation de must du cinéma muet et du cinéma français. Abel Gance livre un film aussi audacieux que monstrueusement ambitieux, tant sur la forme que le fond. Avec de nombreuses séquences qui prennent aux tripes. La première Marseillaise entonnée devant une foule, en pleine Révolution. Une poursuite endiablée à cheval, avec caméra à l'épaule et traveling : totalement dingue pour l'époque. Divers montages presque psychédéliques, sur les affres de la Révolution, dont une scène de fantômes très réussie. Le siège apocalyptique de Toulon. Et bien sûr toute la dernière demi-heure, tournée en polyvision (3 écrans / caméras agencés), soit en format 4:1 complètement délirant. De quoi permettre des plans de fous bien avant le cinémascope, et des expérimentations lyriques barrées. A côté, l'écriture du personnage est très intéressante. On est clairement dans un portrait iconique, Napoléon étant présenté comme une figure d'autorité (sur)naturelle, un génie militaire, et un despote éclairé, motivé par la propagation des idées de la Révolution. De nombreuses citations historiques tentent de nous faire croire que ce qui est à l'écran est la vérité. Toutefois ce parti pris très fort est ostensiblement assumé. Pourtant il y a aussi des passages qui rendent Napoléon très humain, avec de l'humour inattendu. Dont le volet de séduction de Joséphine, où Napoléon apparait comme un parfait ahuri ! Albert Dieudonné tient clairement là le rôle de sa vie... et de sa mort (il sera enterré avec un costume de Napoléon). Par ailleurs, le film ne se prive pas pour livrer une peinture au vitriol de la boucherie que fut la Révolution. Sans aucune pitié pour Robespierre, Danton, ou Marat, affichés comme des fous furieux. Bref, c'est un beau portrait d'une figure marquante, doublé d'une fresque historique d'ampleur sur des années terribles. La cerise sur le gâteau étant la magnifique restauration. De bons choix de musique, et une qualité d'image incroyable pour une oeuvre qui a pratiquement un siècle. Foncez à l'assaut des 7 heures !
Une œuvre opératique et par moments hypnotisante, emprunte d'une modernité assez stupéfiante pour un film de 1927.
Des flottements et des longueurs par-ci par-là (en particulier dans sa 2e partie, un peu moins passionnante), ce qui est presque inévitable dans un film muet de plus de 7h.
Une odyssée cinématographique dotée d'une ampleur indéniable et d'une réalisation frôlant parfois l'expérimental (le triple écran panoramique, assez dingue), remise aujourd'hui en lumière dans sa version intégrale d'origine grâce à un travail de restauration titanesque de plus de 16 ans.
Un très gros (presque trop gros) morceau de 7e Art que je suis bien content d'avoir enfin pu découvrir, même si personnellement, des œuvres comme «L'Aurore» ou «Metropolis» me parlent et me touchent davantage (pas assez fan de Bonaparte sans doute ^^).
Merci au Ciné St Leu d’Amiens de nous avoir présenté le film « Napoléon vu par Abel Gance » en 2 parties, l’une de 3 h 51 et l’autre de 3 h 27 allant de l’école de Brienne au début de la campagne d’Italie en 1796. Cette épopée dans sa « grande version » est inédite et n’a jamais été vue depuis 1927, car elle est le fruit d’une aventure de 16 ans sans précédent dans l’histoire de La Cinémathèque Française, avec une version remastérisée en 5K conforme aux souhaits initiaux d’Abel Gance… Une reconstruction menée par Georges Mourier et dotée d'une partition musicale d’une grande qualité de Simon Cloquet-Lafollye, enregistrée par les orchestres de Radio France. Sur le plan cinématographique, on ne peut que saluer les prouesses d’Abel Gance avec ces mouvements de caméras (travelling, balançoire…), ses images superposées (jusqu’à 16 images) et ce superbe triptyque pour la campagne d’Italie. Dieudonné est excellent avec son regard hypnotique aquilin et sa force de conviction. Certes quelques longueurs et mièvreries de nos jours et quelques libertés prises avec l’Histoire… mais aussi quelques passages drôles comme celui du « thermomètre de la Terreur » et de ce greffier avalant les dossiers de condamnés ou encore une bataille de polochons qui a surement donné des idées à Jean Vigo pour « Zéro de conduite » (1933). Un chef-d’œuvre du cinéma mondial créé en réponse au fameux « Naissance d'une nation » de D. W. Griffith, sorti lui en 1915.
Au même niveau que la précédente partie, ce second volet de Napoléon reprend au lendemain de la victoire française à Toulon (1793), embrassant la vie du général nouvellement promu jusqu'à la campagne d'Italie, en 1796. Contrairement au premier portrait réalisé par Gance, ici, Napoléon n'est plus un inconnu. Il n'est plus "personne", au contraire. Auréolé de sa victoire sur les forces coalisées, il entre dans le grand monde. Son nom est connu, commence à être respecté. Le souffle épique, toujours aussi important, est renforcé par toutes les scènes ou le général est entouré de militaires ou d'hommes politiques, qui tous sans exception, en viennent à le respecter. Albert Dieudonné brille encore une fois de mille feux, il est, ce Napoléon. Avec toute son autorité et son sang froid, lors de l'insurrection royaliste, comme avec sa part la plus "humaine", face à Joséphine et à ses enfants. Napoléon Bonaparte appréciait beaucoup les enfants, et Joséphine était probablement l'amour de sa vie. Eléments que l'on retrouve dans cette partie. La vulnérabilité de l'homme et son humanité sont révélées plusieurs fois : il se laisse aller à des jeux d'enfants, ne sait que dire face à la femme qui fait battre son cœur, perd ses moyens, et passe des heures avec elle ; le tout est très humoristique. Mais, cette partie, c'est également un final extraordinaire, ou le procédé du triple écran inventé par Gance fait des merveilles, permettant de restituer la masse des hommes de la petite armée d'Italie. La rencontre entre Napoléon et son état major est un chef d'œuvre de cinéma ; son discours aux troupes est épique à souhait. Une partie bien mieux rythmée, finissant sur un Ave Verum Corpus magnifique et ce triple écran, bleu, blanc, rouge. Et Napoléon, marchant inexorablement vers son destin, bousculant l'ordre établi, le monde. Une merveille.
Magique. Les acteurs sont sublimes. Les idées de réalisation du génie. Belles symboliques. Le triptyque final à couper le souffle. Quelle intelligence et ce il y a cent an! Un grand merci pour tout ce travail de restauration. Un bonheur aussi d'etre emporté par la musique. Moment merveilleux.
Légèrement inférieure à la première partie. Ici on connaît des longueurs avec des scènes répétitives et pas toujours intéressantes. Les quelques moments intenses et puissants de la première partie sont ici absents. Pour un film qui malgré un splendide triptyque final s'avère vieillissant et hors temps.
Cette seconde partie est dingue, surtout si on pense à la date de réalisation. La fin du film avant le triple écran est fantastique et la musique est extrêmement réussie. Évidemment la musique a été créée en 2023 mais elle est parfaite. Après on pourra toujours reprocher le côté un peu trop hagiographie, surtout pour quelqu'un comme moi par forcément fan de Napoléon.
Waooh🤩Quelle œuvre! Et quel final avec ce triple écran magnifié par un splendide accompagnement musical. Pas spécialement fan de l’Empereur, j’ai particulièrement apprécié la partie de son enfance où son arrogance et sa confiance sont déjà bien ancrées. J’ai aimé aussi aimé la partie savoureuse où il joue les amoureux maladroits. Et la partie en Corse où on le voit chouchouté par sa famille. Et ces deux Marseillaise… Du grand ouvrage. Qui plus est pour 1927… Ridley Scott peut aller se rhabiller.
La seconde partie de ce chef-d'oeuvre reconstitué est aussi monumentale que la première. Abel Gance est autant à l'aise dans le romanesque (étonnante Gina Manès en Joséphine de Beauharnais) que dans les scènes d'action : la polyvision (ancêtre du Scope et du split screen) et utilisée en fin de narration reste impressionnante, près d'un siècle après la sortie initiale de ce long métrage fleuve. Bravo à la Cinémathèque française, au CNC et à leurs partenaires pour cette colossale et magnifique restauration.
L'histoire de Napoléon Bonaparte, de son enfance à l'école militaire de Brienne jusqu’à sa première campagne d’Italie.
L'Empereur Bonapart est l'un des personnages historiques les plus représentés sur les écrans, avec plus de 700 apparitions (selon l’historien et critique de cinéma Antoine de Baecque), quoi de plus normal qu’il ait eu droit à un biopic si tôt après la création du cinématographe par les frères Lumière.
Après un travail titanesque de 16 ans (et au budget colossal de 4M d’€) mené par Georges Mourier dès 2007 pour reconstruire et restaurer ce film mythique mais disparu ou plutôt charcuté en de multiples versions qui ne ressemblaient en rien à l’oeuvre d’origine (il a fallu récupérer des éléments conservés dans des archives éparpillés aux quatre coins du globe), le grand public à enfin la possibilité de découvrir l’oeuvre tel que l’avait imaginé son réalisateur près d’un siècle plus tôt (et que les spectateurs n’avait pas revu depuis sa première présentation en mai 1927) tout en respectant scrupuleusement le matériau d’origine, à savoir, sa colorimétrie, son cadre de projection et les teintes d’origines.
Au commencement, il existait 3 versions (officielle) du film, la première appelée “Opéra” d’une durée de 4h, la seconde appelée “Apollo” d’une durée de 9h30 et une troisième (qui est la version définitive) appelée “Grande Version” d’une durée de 7h. C’est sur cette dernière que la Cinémathèque française a réalisé la restauration (d’autres versions ont circulé dans le monde, notamment celle de la Metro-Goldwyn-Mayer, totalement charcutée au montage puisqu’elle ne dure plus que 2h).
Abel Gance réalise ici une oeuvre phare dans l’Histoire du 7è Art, une fresque épique et démesurée (un tournage étalé sur deux ans et un montage qui aura nécessité une année entière) avec laquelle il ne cessera d’innover en cherchant à se surpasser et tout cela se ressent à l’image. Sa mise en scène est novatrice et bon nombre de séquences sont à couper le souffle (surtout pour un film qui s’apprête à fêter ses 100 ans !). On pense bien évidemment à la séquence culte du triptyque final dit “Le Départ de l’Armée d’Italie” selon le procédé conçu par le réalisateur, de projection en triple écran, qu’il nommera plus tard “Polyvision” ou bien les poursuites avec caméras déportées sur les chevaux au galop, plans kaléidoscopiques, les multiples surimpressions, la caméra harnachée à un balancier, les cadrages à hauteur d’enfant, les split-screen,…
Le travail de restauration (en 5K) est une pure merveille et rend un vibrant hommage au travail titanesque orchestré par son réalisateur. Abel Gance n’ayant donné aucune instruction quant à l’accompagnement musical de sa version définitive, la Cinémathèque française l’a confiée au compositeur Simon Cloquet-Lafollye et le résultat est tout simplement sublime et vient parfaitement accompagner les 7h de projection.
On est pris au coeur du film, de part son histoire, sa fougue, sa mise en scène endiablée et virtuose et ses acteurs si charismatiques (bien que le jeu puisse prêter à sourire, car cinéma-muet oblige, le surjeu était de rigueur), avec en premier lieu Albert Dieudonné qui incarne Napoléon à la perfection. Si la durée du film peut en réfréner certains, cela reste une expérience à vivre, de même que les 7h de Guerre et Paix / Война и мир (1966) de Sergueï Bondartchouk (où il était là aussi question de Napoléon, mais dans une moindre mesure), c’est quelque chose à vivre au moins une fois dans sa vie (et sur grand écran de préférence).