J'ai hésité à lancer ce film dans mon lecteur DVD. En effet, une chose que je n'avais pas vu lorsque j'avais passé ma commande, c'était la durée du film : 2h40. C'est un peu long je trouve pour un film d'un réalisateur que je n'adore pas non plus (enfin je n'avais vu que deux films de lui), mais si déjà j'avais déboursé 10 euros pour le DVD, autant que je le voie non ?
Bon il faut dire que les deux films (parce que oui il y a une suite directe s'appelant Jeanne la pucelle, les prisons) durent ensemble presque 6 heures, du coup c'est quand même un sacré investissement temporel.
J'ai donc vu cette première partie et j'ai vu un film comme on en voit rarement, bourré de bonnes idées, mais pas complètement convainquant non plus. Je m'explique. Dès le début, j'ai adoré cette photographie sans artifice, sans lumière artificielle, on sent la nature, on sent une austérité qui vient de cette absence d'éclairage artificiel, et c'est rudement beau. L'image, les acteurs ont une singularité qui est due à cet éclairage naturel. C'est rare de voir ça au cinéma. Si je devais rapprocher ce film d'un autre, je dirai que ça ressemble légèrement à Lancelot du Lac de Bresson, mais en mieux (pas que je n'aime pas le Bresson).
C'est à dire on est dans quelque chose d'austère, de très lent, avec très peu de moyen, sans effets spéciaux numérique ou autre, les batailles ne sont pas filmées de manière à être jouissives, elles sont justes là, filmées en plan fixe, parfois avec un léger mouvement de caméra. Il plane alors une atmosphère vraiment étrange, à la fois très naturelle et réaliste à cause de cette photo, des décors naturels etc, mais également assez surnaturel à cause des situations, des dialogues, de la mise en scène, c'est assez difficile à décrire comme atmosphère, mais ça vaut le coup d'être vu.
Je pense que l'on peut découper ce premier film en deux, une première partie où Jeanne tente de convaincre des gens de l’amener près du dauphin du roi de France pour le faire sacrer roi à Reims, et une autre faite de batailles. J'avoue préférer le début du film, où justement on voit un sujet très pieux, traité de manière banale, profane, c'est à dire Jeanne qui va recevoir des illuminations divines, parler à la foule, aux gens pour les convaincre. Mais la mise en scène va traiter ça de manière anodine, comme si de rien n'était, sans que ça dénote de l'ensemble. Tout passe par le jeu de Bonnaire. Elle est parfois juvénile, souriante, avec un vocabulaire familier, et puis tout à coup elle rayonne, sort une tirade dans un français châtié et convainc des gens. Et je trouve ça assez brillant de la voir changer de nature complètement d'une scène à l'autre.
Après c'est le genre de parti pris qui ne plaira pas à tout le monde, cette austérité poussée à l'extrême, mais quelque part c'est envoûtant.
Après une fois qu'elle a vu le futur roi de France, j'aime un peu moins le film, même si quelques scènes valent très largement le détour, je trouve que l'intérêt du film se dilue un peu, et c'est très dommage. Même si la dernière demi-heure reste vraiment pas mal du tout, il y a quelques baisses de régime où j'ai un peu décroché.
Néanmoins, ça reste quelque chose à voir, parce que c'est vraiment singulier comme film, comme expérience. Je ne suis pas certain d'enchaîner tout de suite avec la seconde partie, encore plus longue, mais je suis content d'avoir vu ce film, c'est une oeuvre intéressante et assez perturbante par moment à cause de cette simplicité visuelle, on se croirait chez Rohmer par moments.