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soniadidierkmurgia
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4,5
Publiée le 1 avril 2016
Un magnifique hommage de Romain Goupil à son copain d’enfance Michel Recanatti. C’est la troisième fois que je vois ce film à mi-chemin entre le drame et le documentaire. Par ce procédé si particulier Romain Goupil a réussi à créer un genre à lui seul. Si je m’y retrouve si bien c’est sans doute que moi aussi j’ai été adolescent aux alentours de ces années et que j’y hume un parfum qui m’est familier. On sent tout au long du film que Goupil s’en veut un peu et en tout cas ne s’explique pas n’avoir pas vu la fêlure profonde qui allait amener son meilleur pote à se suicider. Celui qu’on croyait le plus fort était en fait le plus malheureux et le militantisme pratiqué à outrance tel un sacerdoce était en réalité un exutoire à un mal être évident. Les témoignages se succèdent et on comprend que Michel était en réalité toujours seul au milieu des autres. Ce trop plein de sérieux qu’admirait Goupil était en réalité le refuge d’un jeune homme qui n’arrive pas à entrer facilement en contact avec les autres comme on peut le faire à cet âge. Le problème semble prendre une proportion dramatique quand Michel se confronte aux femmes qui semblent littéralement le paralyser. On apprendra qu’il n’avait vraiment jamais accepté que sa mère l’ai mis au monde dans une relation pré-nuptiale le laissant orphelin de son père. On ne comprend jamais vraiment les raisons d’un suicide et comme d’autres la tentative de Goupil est un peu vaine même si elle ne manque pas de panache. Sous le propos un peu grave du film on sent que l’ époque était vraiment chargée d’espoir et d’insouciance. A 40 ans de distance on se dit que le monde a pris un sacré virage. Au passage on voit que Romain Goupil n’oubliait jamais de se mettre en scène avec ses copains dans des mini saynètes rappelant les films de Max Seynett. Le cinéaste pointait déjà sous l’étudiant. L’ensemble donne un ton très nostalgique à ce film que je ne peux m’empêcher de trouver toujours aussi émouvant à chaque vision.
Ce documentaire assez curieux sur fond de mai 68 est assez plaisant au premiers abords. On y trouve des archives de l'époque impressionnantes et tout à fait variés. Le tout a donc tout pour réconforter le spectateur. Mais voilà, Mourir à trente ans montre vite ses limites. En effet, alors qu'on nous parle de la question du suicide au tout début, le film enchaîne par la suite dans une multitudes histoires et anecdotes, oubliant de temps en temps le sujet qui faisait pourtant débat. De plus, le montage est très brouillon et la réalisation très approximative. On passera les références toc propre au grand cinéma de Stanley Kubrick qui agaçent plus qu'elles n'enivrent. De plus, on a quelques fois beaucoup de difficultés à déscerner entre l'image d'archive et la reconstitution. Néanmoins, le tout est assez sympathique et communicatif. Au final, et même s'il n'emporte pas entièrement l'adhésion, le ton assez personnel du film arrive néanmoins à faire sortir de ce documentaire l'âme d'un cinéaste touchant de simplicité.
"Mourir à 30 ans" constitue un document exceptionnel sur la fin des années 60 et le début des années 70, un film engagé, vécu de l'intérieur. On n'y recherchera donc pas un bilan objectif et distancié de cette période clé, mais plutôt une vision personnelle, des valeurs pour lesquelles toute une jeunesse descendit dans la rue. 40 ans plus tard, on ne pourra que constater avec amertume combien les choses ont évolué. On ne trouve plus trace de cet engagement dans la jeunesse actuelle, en manque de repères. L'illusion de la gauche a fait faillite. Le capitalisme révèle chaque jour davantage ses disfonctionnements. Romain Goupil et ses amis n'avaient peut-être pas toujours raison, mais ils avaient des convictions fortes qu'ils défendaient de toutes leurs forces. Les jeunes d'aujourd'hui ne peuvent que les envier.
Caméra d'Or au Festival de Cannes 1982, César du meilleur premier film en 1983, Mourir à 30 ans est une œuvre très personnelle qui oscille avec une réussite certaine entre documentaire, autobiographie et fiction. Cet essai sur l'engagement, les mouvements lycéens et étudiants de 68, les jeux de pouvoir dans une organisation activiste, le cinéma, la construction de l'identité politique est aussi un hommage poignant à Michel Recanati, jeune leader trotskiste et ami de Romain Goupil, qui se suicida en 1978, à l'âge de 30 ans, après une série de déboires personnels et militants. Original, sensible et intelligent.