Jean-Paul Le Chanois, avec «L’Ecole buissonnière» (France, 1948), met en scène la méthode moderne de l’éducation défendue dans un ouvrage d’Elise Freinet. Pour se faire, Le Chanois dispose une dialectique afin de révéler la méthode révolutionnaire du nouvel enseignant (Bertrand Blier). Relevant un vieux maître d’école partant à la retraite, M. Pascal entend expérimenter, dans un petit village rural, les derniers moyens d’enseignement. Captivant ses élèves à travers des travaux singuliers, le nouveau maître voit très vite les pères et hommes du village se liguer contre cette transformation. Les mères restent à distance, ne se mêlent pas au conflit, où si l’occasion se présente, elles inclinent davantage du côté de l’instituteur puisqu’il réussit à rendre épanouis leurs enfants. Sur un cadre classique, celui de la société du début XXème, Le Chanois dispose de nouveaux éléments sur un plateau politique sclérosé. Dans la mesure du possible, le film dispose une certaine inventivité narrative en organisant le monde selon la dichotomie qui partage le village. La lutte pour l’éducation, dans un lieu si semblablement reculé du monde, prend des allures de révolte entre conservateur et visionnaire. Le Chanois, juif d’origine, ayant vécu en France pendant l’Occupation, révèle, au travers de «L’Ecole buissonnière» l’espoir d’une France, encore meurtrie par la soumission nazie, qui tendrait non plus vers un sombre passé, celui de Vichy, mais plutôt au-devant de l’avenir, dans l’esprit d’enfants épanouis. En évoluant dans le registre du cinéma français des années 40, Le Chanois, bien que faisant montre d’une ingénieuse disposition narrative, ne s’efface pas devant les carcans. Certes, aucun cinéaste ne peut se défaire de toutes les conditions de production qui le conditionne mais le problème de la majorité du cinéma français de cette période est de se contenter de cette situation. Le Chanois vise à s’en dégager, la tentative est plaisante.