Mercano el Marciano
Un film de Juan Antin
Dessin animé un tantinet corrosif, Mercano el Marciano est le premier long-métrage prometteur d’un metteur en scène argentin. Un véritable ovni, que nous avons découvert en avant-première à Fantastic’Arts cuvée 2004.
Sélectionné dans le cadre de la compétition du long-métrage d’animation du Festival du Film Fantastique de Gérardmer 2004, Mercano el Marciano a rencontré un écho favorable parmi les festivaliers. Cette réaction était méritée, tant le film se démarquait de ce que l’on a l’habitude de voir dans le genre animé. Il sera d’ailleurs intéressant de voir ce que le réalisateur élaborera à l’avenir avec un budget plus conséquent.
Mercano est un sympathique petit Martien en forme de concombre ( !). Egaré sur Terre, il cherche désespérément à rejoindre sa planète. A la suite d’un accident, le vaisseau personnel de Mercano s’est en effet vu irrésistiblement attiré par la planète bleue, sans pouvoir faire machine arrière. Le petit Martien en a assez de végéter, et aimerait bien quitter les sous-sols dans lesquels il s’est réfugié. Après avoir volé un micro-ordinateur portable dans un grand-magasin, il entreprendra de le brancher à une source d’énergie (voir la manœuvre !) afin de contacter ses amis restés sur place.
A peine a-t-on vu quelques images que l’on perçoit la volonté du réalisateur. Le ton est donné, le contexte fantastique permettra de véhiculer des idées contestataires bien actuelles. La technique d’animation simple et les dessins rudimentaires n’ont qu’un but –avant de nous distraire- celui d’exprimer une critique de la société. Les dessins ont beau être rudimentaires, ils n’en sont pas moins expressifs. Les mimiques ainsi que les sons émis (voir les borborygmes que poussent les Martiens, excellents !!!) amènent le sourire, puis nous font penser à tel ou tel travers de la société. La solidarité n’est pas à l’honneur, pas plus sur Mars que su Terre. Pour preuve, lorsque Mercano, esseulé, demande de l’aide à ses amis Martiens, il n’obtient que le spectacle décourageant de ces derniers se gaussant lourdement de son infortune.
D’autres dysfonctionnements sont illustrés, avec le même bonheur. Ainsi le personnage du chauffeur de taxi qui fait aussi le psy d’appoint. Il renvoie au dénuement dans lequel vit une grande partie de la société argentine, et qui se voit obligée d’exercer deux activités afin de survivre. Tout y passera ensuite, de l’Amérique latine obnubilée par les chimères de la chirurgie esthétique et ses cliniques de la beauté à l’univers des multinationales et le lobby pharmaceutique. Au beau milieu de ce chaos, Mercano va-t-il se laisser contaminer, va-t-il permettre aux Terriens d’exploiter ses idées, voire envahir sa planète ?
Avec Mercano el Marciano, Juan Antin a donné le jour à un petit film d’animation gentiment décapant. Malgré des moyens limités, sa compréhension et son illustration de la société passent très bien par l’intermédiaire de ses dessins sans fioritures. C’est d’ailleurs probablement le côté basique de ces derniers qui lui a permis d’exprimer d’autant mieux ses idées.