Situation plutôt inhabituelle qu'un remake américain d'un film français, aucun des deux ne semblant d'ailleurs avoir réellement rencontré son public, de façon plutôt injuste à chaque fois. Pour être totalement honnête, j'ai préféré la version de Pierre Jolivet, « Force majeure » : malgré des insuffisances, le dilemme y était plus implacable, poignant, « impossible ». Ici, bien que les enjeux soient strictement identiques, cela a un peu tendance à tergiverser, à prendre des « chemins de traverse », diluant la densité du modèle. Pour autant, « Loin du paradis » ne démérite pas : même si ce n'est pas toujours à bon escient, l'intrigue est plus développée, proposant des situations nouvelles et s'offrant des libertés, lui évitant d'être un banal copier-coller. Les tourments intérieurs des personnages ont beaux être les mêmes, ils sont présentés de façon différente, dans un contexte différent. De plus, l'interprétation est à nouveau à la hauteur, à l'image d'un très solide Vince Vaughn et de Joaquin Phoenix, dont on a développé le rôle pour l'occasion, sans oublier l'excellente Anne Heche, dans un registre très différent mais tout aussi convaincant qu'Alan Bates, celle-ci occupant une place beaucoup plus importante dans le récit. Après, Joseph Ruben était-il le meilleur choix derrière la caméra pour ce projet ? J'en doute fortement. Ça manque de personnalité, d'intensité, cédant parfois à quelques effusions sentimentales typiquement hollywoodiennes. Mais le scénario a le grand mérite de ne jamais trahir l'original
(même si on peut le craindre à un moment précis!)
, faisant ainsi preuve d'un certain courage quant
aux habituels « happy end » presque forcés
. Cette nouvelle version s'imposait-elle ? Je ne sais pas. Au moins a t-elle permis à un public étranger de découvrir cette histoire peu banale sur un cas de conscience qui l'est tout aussi peu, développant (inégalement) l'intrigue et les protagonistes par ses trente minutes supplémentaires : honorable.