De quoi ça parle ?
Spencer James, un jeune athlète issu des quartiers difficiles de la banlieue sud de Los Angeles, est recruté par le prestigieux Beverly Hills High afin de rejoindre l'équipe de football américain du lycée. Tout en tentant de s'adapter à ce nouvel environnement très aisé, au sein duquel il n'est pas forcément le bienvenu, Spencer débute alors une nouvelle vie, qui le mènera petit à petit, mais non sans embûches, vers son rêve : devenir footballeur professionnel.
À quoi ça ressemble ?
C'est avec qui ?
Créée par April Blair, scénariste qui s'est illustrée dans le teen-movie et sur des séries comme Jane By Design ou Les Chroniques de Shannara, la nouvelle série ado de la CW introduit Daniel Ezra dans le rôle de Spencer James, acteur britannique que l'on a pu voir dans la mini-série Undercover ou encore dans The Missing. A ses côtés, on retrouve Taye Diggs (Private Practice, Empire) dans le rôle du coach du lycée de Beverly Hills, Samantha Logan, la fille du coach que Spencer ne laisse pas indifférente, vue dans Teen Wolf et 13 Reasons Why, et Cody Christian (Pretty Little Liars), membre de l'équipe de football qui ne voit pas d'un bon oeil le rapprochement entre Spencer et sa petite amie Leila (Greta Onieogou). Un casting solide avec un acteur principal prometteur ayant fait ses armes dans la fiction britannique, et plein de visages familiers pour les amateurs de séries adolescentes.
Ça vaut le coup d'oeil ?
Inspirée de la vie de Spencer Paysinger, joueur de foot américain repéré au lycée de Beverly Hills High et ayant joué pour les New York Giants, la série joue la carte du parcours initiatique du héros doté d'un grand talent issu d'un milieu difficile, repéré par un coach qui va lui servir de mentor et le tirer de sa condition en l'introduisant dans un milieu dont il ne maîtrise pas les codes. Le tout, revisité avec un héros afro-américain issu de la banlieue sud de Crenshaw se retrouvant plongé dans l'arène bourgeoise de Beverly Hills - deux mondes que tout oppose. Un terrain très familier et balisé auquel on peine à trouver un peu d'originalité, tant dans son sujet que dans sa présentation. All American déroule tous les codes de la série adolescente : les tensions à venir sont introduites dès le premier épisode entre Spencer et le fils du coach qui le voit comme un rival potentiel; le conflit entre les deux prétendantes du héros n'évite pas les stéréotypes (l'une, naturelle et complexe, est ignorée, tandis que l'autre, plus superficielle, obtient l'attention de Spencer). Le rapport élève-mentor entre l'athlète et son coach n'apporte également rien de nouveau dans sa configuration, d'autant plus qu'un développement plus lourd encore semble se profiler à la fin du pilote; enfin, la figure paternelle absente du héros est un schéma encore trop récurrent dans l'illustration des familles afro-américaines, auquel All American n'échappe pas. Les (trop) nombreux dialogues d'exposition de la série finissent par appuyer le propos jusqu'à l'usure; malgré de belles ambitions dans les thèmes qu'elle aborde, elle finit par manquer de subtilité en essayant de trop bien faire.
Toutefois, quelques variations dénotent dans ce schéma et rendent par moments la série agréable : le héros est parfois montré du point de vue des protagonistes féminins comme un objet de désir (nous n'irons pas jusqu'à parler de female gaze tant ces moments sont furtifs, mais c'est un début), et possède un sidekick LGBT, son amie Tiana (Bre-Z, également vue dans Empire), également aux prises avec le milieu dont elle est issue et l'envie de s'en sortir, et dont on espère qu'elle prendra plus de place dans les épisodes à venir. La série se sert des arènes de prédilection de l'adolescence américaine (sportifs, filles populaires et marginaux) pour les ancrer dans l'actualité et la brutalité du quotidien, ponctué par la violence des attaques à l'arme à feu, la difficulté de s'intégrer, et le rejet et la défiance subis par ceux qui aspirent à dépasser leur condition lorsqu'ils se retrouvent confrontés aux élites. Le rêve américain déconstruit, en quelque sorte. Malgré ces thèmes qui ambitionnent de faire de la série un drame social, et une bande-son ponctuée de hits rap californiens qui parleront aux amateurs (Snoop Dogg, Frank Ocean, DUCKWRTH...), le traitement des personnages et les dialogues plein de bons discours de la série lui donnent un ton trop léger, voire anecdotique.
La force de All American réside donc entièrement dans son propos qui est, pour reprendre une réplique du coach de Spencer, de "voir le terrain depuis tous les angles" : pour le héros, l'enjeu sera d'appliquer ce principe sur la pelouse mais aussi dans ce nouvel environnement, en prenant du recul pour observer les codes sociaux autour de lui afin de s'en affranchir. Malgré des thématiques ultra-rebattues, l'ancrage contemporain de la série et son casting solide mérite que l'on s'y attarde un peu, afin de savoir si l'essai sera transformé ou si elle n'évitera pas tous les écueils du soap à la Bevery Hills, qui semblent désormais un peu désuets dans l'actuel paysage des séries ado en pleine réinvention, à travers le pastiche (comme le fait Riverdale) ou le renversement des codes narratifs (13 Reasons Why, American Vandal).