American Crime, American Horror Story... C'est "American" et c'est bien !

American Gangster, American Ultra, American History X, American Sniper, American Psycho... Au cinéma, de nombreux films américains utilisent dans leurs titres le mot "American". Critique ou apologie des Etats-Unis, il s'agit le plus souvent pour les réalisateurs de livrer une vision particulière de leur pays et de ses habitants. Plus ou moins acerbe, plus ou moins fine...

Cette tendance, qui a toujours existé dans les séries, est en train de revenir en force ces dernières années. Relancés par Ryan Murphy en 2011 avec son anthologie horrifique American Horror Story, ces titres à l'"American" se retrouvent désormais un peu partout, quitte à désarçonner le téléspectateur qui ne sait plus trop comment distinguer une série d'une autre.

Entre les vétérantes comme American Dad, les revivals comme We Hot American Summer, les petites nouvelles comme American Gods, celles qui ont été récemment annulées comme American Gothic et, surtout, entre les séries d'anthologie dont on parle le plus actuellement, comme American Crime Story ou American Crime, il y a en effet de quoi perdre le fil.

Si ces séries avec "American" dans le titre sont souvent anthologiques, cela n'a rien d'étonnant puisqu'elles proposent, chacune dans leur ton, d'évoquer la société et l'essence américaine, la culture, la tradition, le patriotisme, le conservatisme, le pluralisme, le racisme, les identités sexuelles, les communautés et de les confronter soit aux fantômes du passé américain soit aux déviances et aux crimes de son monde actuel.

Avec ces titres, les scénaristes peuvent s'attaquer, parfois violemment, à des problèmes de société inhérents aux Etats-Unis, en maniant l'ironie autour d'un rêve américain qui n'a plus vraiment lieu d'être.

Pour y voir plus clair et parce que ces séries en "American" méritent souvent le détour, voici une sélection de ce qui se fait de mieux aujourd'hui. Car même si on peut les confondre, ces quatre séries très différentes sont des petits bijoux, chacune à leur manière...

American Horror Story (2011)

Si Les contes de la crypte vous avait effrayés, American Horror Story va vous faire rendre l'âme. Depuis 2011, la série d'anthologie créée par Ryan Murphy et Brad Falchuk s'attaque à nos pires angoisses. Mais, si elle s'intitule AMERICAN Horror Story, c'est bel et bien parce qu'elle joue aussi autour de lieux ou d'histoires qui font partie de l'histoire ou du folklore américain...

Indépendante, chaque saison explore les cauchemars de ses contemporains au travers d'un décor, d'une époque, d'une thématique et d'un sous-titre différents. Murder House, Asylum, Coven, Freak Show, Hotel et Roanoke... En six saisons, on a eu droit à une maison hantée,un asile, un couvent de sorcières, au dernier des freak show, un vieil hôtel aux occupants surnaturels ou encore à une ferme coloniale où se trouvait la mystérieuse colonie de Roanoke avant sa disparition au XVIème siècle. 

Si ses saisons sont plus ou moins brillantes, American Horror Story fait valser avec brio sa troupe d'acteurs réguliers (Jessica Lange, Evan Peters, Sarah Paulson, Lily Rabe...) dans des rôles à chaque fois différents, aussi fous que tordus. La force du show réside aussi dans sa maîtrise du buzz et du marketing. A chaque saison ses teasers angoissants et ses affiches mystérieuses. Et la recette fonctionne puisque la série de FX est assurée d'aller jusqu'à une neuvième saison !

The Americans (2013)

Loin d'être une série dont on parle, The Americans poursuit pourtant son petit bonhomme de chemin depuis maintenant cinq saisons. De notre sélection "Americans", elle est la seule à ne pas être une anthologie, chaque saison suivant la même histoire et les mêmes personnages. Period drama se déroulant dans les années 80, cette série créée par Joe Weisberg, un ancien de la CIA, s'inspire d'une véritable affaire - des espions russes infiltrés parmi les Américains et qui posaient en tant que couple - et en tire une complexe peinture du pays, autant politique que culturelle. 

A la fois série d'espionnage, drame familial et histoire d'amour, The Americans nous plonge en pleine Guerre Froide, à l'époque de Reagan et nous expose des jeux politiques, aussi amoraux qu'ambigus. Personne n'est épargné, ni les Américains, dont les pratiques en termes de renseignements sont souvent inhumaines, ni les Russes qui n'hésitent pas à aller au bout en termes de sacrifices. 

Elizabeth et Philip doivent sans cesse jongler entre ce que leur morale leur impose et leurs missions mais aussi entre leur amour pour leur pays et l'attachement qu'ils ressentent malgré tout pour les Etats-Unis. C'est bien évidemment leurs deux enfants, élevés "à l'américaine", qui leur font également ressentir cette ambivalence car s'impose dans The Americans un énorme choc des cultures.

Comment, lorsqu'on a vécu la privation toute sa vie, peut-on vouloir priver ses enfants de la surabondance, matérielle et culturelle, offerte par l'Amérique ? Mais, comment ne pas vouloir aussi inculquer à ses enfants, choyés depuis leur naissance, ses propres principes, sa propre discipline ?

American Crime (2015)

Depuis trois saisons, cette autre série américaine anthologique - qui renouvelle chaque saison son intrigue et ses personnages - commence sur une tragédie. Un crime américain, comme nous le dit son titre, qui veut dire bien des choses par là...

Qu'il s'agisse d'un meurtre, d'un viol ou d'un accident, American Crime débusque le racisme, analyse les notions de classes sociales tout en s'attaquant à notre humanité et à la complexité de nos émotions et de nos réactions face à la différence et l'indifférence. A la fois brutale et émouvante, la série créée par John Ridley (scénariste de 12 Years A Slave) ne ressemble à aucune autre et c'est aussi pour ça qu'il est frappant de la retrouver sur un grand network et non pas sur une chaîne du câble. 

Pour la critique américaine, le plébiscite est total. Pour détruire ce qui reste du rêve américain, American Crime est aidée par des intrigues fortes mais aussi par un casting prodigieux. Saison après saison, les acteurs, magnifiques Felicity Huffman, Timothy Hutton et Regina King, changent de personnages et apportent des variations intéressantes autour des mêmes thématiques contemporaines.

American Crime Story (2016)

Dernière née dans la lignée des séries "American" en diffusion, si l'on ne compte pas American Housewife, American Crime Story a "légèrement" créé le quiproquo dans les conversations des uns et des autres. Spin-off d'American Horror Story, produite par Ryan Murphy, cette nouvelle série d'anthologie est pourtant bien différente. Elle ne s'est pas donnée pour mission d'explorer les peurs mais d'explorer saison après saison les plus grandes affaires judiciaires ou les plus grands scandales nés sur le territoire américain. A l'image de sa grande soeur, American Crime Story possède aussi un sous-titre à chaque saison. 

Extrêmement bien reçue, sa première saison, "The People Vs O.J. Simpson", relatait ainsi le plus grand procès des années 90, celui de la star de foot américain, accusée du meurtre de sa femme et de son potentiel amant. A l'écran, ce ne sont pas des inspirations, des légendes ou du folklore qui sont donc retranscrits mais de véritables faits réels et des personnes ayant réellement existé. 

A chaque saison, le challenge est donc de mettre en scène un évènement dont le public pense connaitre tous les tenants et les aboutissants et de lui offrir des éléments nouveaux et une perspective différente. Il s'agit de fouiller un passé mais aussi la culpabilité et la responsabilité des américains, citoyens ou dirigeants, face à ce passé. Il s'agit aussi d'analyser la célébrité telle qu'elle est érigée aux Etats-Unis, les rouages de la justice et bien évidemment le racisme.

Lors de la seconde saison, ce sont donc les conséquences de l'ouragan Katrina qui seront racontées. La troisième s'attaquera à relater l'affaire de l'assassinat du couturier Gianni Versace en 1997 quand la quatrième reviendra sur le célèbre scandale sexuel à la Maison-Blanche, impliquant Monica Lewinsky et Bill Clinton.