Récompensé par le Grand prix lors de la cérémonie de clôture du 71ème Festival de Cannes, BlacKkKlansman de Spike Lee évoque l'Amérique actuelle et notamment la montée du Suprémacisme blanc. (Re)découvrez à cette occasion notre entretien avec Spike Lee qui s'est avéré un exercice difficile. Refusant de se livrer, faisant semblant de ne pas avoir compris la question, allant à l'essentiel dans ses réponses, le cinéaste de Do The Right Thing et La 25ème Heure n'aime pas parler de son travail et l'a prouvé une fois de plus.
AlloCiné : Etiez-vous familier de l'histoire de Ron Stallworth avant de travailler sur le scénario ?
Spike Lee : Je n'en avais jamais entendu parler de ma vie. Je ne le connaissais pas.
Je vous pose la question car en France, elle n'est pas du tout connue.
Aux Etats-Unis non plus. Pas avant ce film.
A partir du moment où vous avez un sujet comme celui de la vie de Stallworth, comment choisissez-vous entre film de fiction et documentaire ?
Eh bien, BlacKkKlansman n'était pas un de mes projets, c'était celui de Jordan Peele. Il m'a appelé pour faire un film de fiction et pas un documentaire. C'est aussi simple que cela.
Ce que j'apprécie dans vos films, c'est la façon dont vous parlez de l'histoire de l'Amérique et de l'Histoire tout court d'ailleurs...
(il interrompt) Et de cinéma ! Avec Autant en emporte le vent et Naissance d'une Nation.
Justement j'y venais ! J'allais dire que par exemple dans BlacKkKlansman vous montrez des scènes de ces deux monuments du cinéma, je voulais que vous expliquiez aux internautes pourquoi vous avez choisi ces films-ci.
Dans certains cercles, ces deux films Naissance d'une Nation en 1915 et Autant en emporte le vent en 1939 sont considérés comme les plus grands films jamais fait. Et selon moi, ils posent problème. Quand vous essayez de comprendre les choses vous choisissez d'aller vers ce qui s'est fait de mieux. Mais [ces films] ont des défauts.
Vous explicitez d'ailleurs ces défauts dans "BlacKkKlansman". Une autre référence au cinéma dans votre film c'est la mention de beaucoup de films de la Blaxploitation (genre qui a permis à la population Afro-Américaine d'accéder à des rôles de premier plan). Quel regard portez-vous sur cette période ?
Le film se passe au début des années 70, c'était l'époque des films de la "Black-exploitation". Il semblait donc logique que Ron Stallworth et Patrice parlent de ce qu'ils ont regardé : Shaft avec Richard Roundtree et Super Fly avec Ron O'Neal !
Encore une référence au cinéma, il y a Harry Bellafonte [chanteur, acteur et militant] dans votre film !
Wouhou !
Il a 91 ans.
A 91 ans, il nous a fait cet honneur. Il devait être présent à Cannes, mais ses docteurs ne lui ont pas autorisé le voyage. Mais il est là avec nous par l'esprit ! (il lève l'index vers le ciel)
Vous lui avez offert le rôle ?
Bien sûr ! Il a aimé le scénario et a d'abord cru qu'il ne pourrait physiquement pas apparaître dans le film. Nous lui avons donc donné un mois et demi, il s'est préparé et a fait du bon boulot.
"BlacKkKlansman" sort le 22 août dans les salles :
Spike Lee et son Grand Prix pour "BlacKkKlansman"
Spike Lee, son producteur et l'actrice Laura Harrier
Spike Lee brandit son prix
Spike Lee entre Shaggy et Sting, venus chanter sur les marches cannoises
Spike Lee entouré de son casting
Adam Driver, Spike Lee, John David Washington, Laura Harrier)