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    Va-t-on enfin connaître la vérité sur l'assassinat de JFK ?
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    54 ans après l'assassinat du président JFK, qui continue encore à hanter l'Amérique, Donald Trump vient de signer le décret autorisant la publication de 3100 documents inédits sur l'affaire, qui étaient maintenus sous scellés jusqu'en 2029.

    Samedi 21 octobre, le président des Etats-Unis Donald Trumpa a autorisé la publication ce jeudi de 3100 documents, la plupart inédits et non caviardés, liés à l'assassinat du président Kennedy le 22 novembre 1963. "Sous réserve de la réception de nouvelles informations, je vais autoriser, en tant que président, que les DOSSIERS JFK longtemps bloqués et classés top secret soient ouverts" a-t-il tweeté.

    Au total, cinq millions de documents environ sur l'assassinat de John F. Kennedy, provenant essentiellement des services de renseignement, de la police et du ministère de la Justice, sont conservés à Washington derrière les murs des Archives nationales. L'immense majorité - 88% - ont déjà été révélés au public, selon cette institution. 11% ont, quant à eux, été publiés après avoir été caviardés.

    Une décision importante et précieuse même pour les chercheurs et les historiens, dans la mesure où ces archives devaient être encore sous scellés jusqu'en 2029. De quoi faire enfin toute la lumière sur ce moment charnière de l'histoire américaine ?

    Cette décision -historique dans tous les sens du terme-, nous offre ainsi l'opportunité de revenir en profondeur sur un événement dont la fiction, TV et au cinéma, s'est emparé depuis longtemps.

    La tragédie nationale

    Le 21 novembre 1963, John Fitzgerald Kennedy s'envole à bord d'Air Force One à destination du Texas, première étape de sa campagne de réélection à la présidence des Etats-Unis. Un voyage à haut risque sur le plan politique. L'Etat est traversé par des courants ultra conservateurs et d'extrême-droite, qui reprochaient violemment aux Kennedy non seulement leur soutien à la population noire dans son combat pour les droits civiques, mais aussi d'être beaucoup trop tendre envers le communisme.

    22 Novembre 1963. Le cortège présidentiel fait route vers la Chambre de Commerce de la ville, passant par la place Dealey. A bord d'une berline découverte, JFK salue la foule. A 12h30, des coups de feu retentissent. Après avoir marqué un temps d'hésitation, la voiture présidentielle accélère, tandis que Jackie Kennedy semble vouloir s'en extraire en enjambant le coffre arrière. Un agent du Secret Service se précipite sur le marche-pied arrière de la voiture et empêche l'épouse du président de sortir du véhicule. Le 35e président des Etats-Unis a été assassiné.

    "Qui que vous soyez, vous vous souviendrez toujours du lieu où vous étiez et ce que vous faisiez lorsque vous avez appris la mort du président Kennedy" lance le présentateur du journal télévisé de la chaîne NBC, la voix étranglée par l'émotion. 54 ans après, le souvenir de cet assassinat continue de hanter la mémoire de l'Amérique.

    L'importance capitale du film d'Abraham Zapruder

    Dans l'histoire des images du XXe siècle, il y en a deux (trois en fait si on compte celles diffusées par les médias pendant la guerre du Viêtnam) qui constituent de profonds traumatismes aux Etats-Unis : les images de l'assassinat de JFK, filmé en direct, et celles, également en direct, des attentats du 11 septembre 2001.

    Abraham Zapruder, propriétaire d'un magasin de vêtements parti filmé en 8mm le passage du président sur Dealey Plaza, a fixé sur pellicule un moment unique dans l'histoire. Car il a fourni aux enquêteurs un élément qui existe rarement dans un crime : des images qui montrent les faits, qui permettent de voir ce qui s'est passé.

    Ci-dessous, le film de Zapruder, sensiblement ralenti :

    Des images qui ont effectivement fait le tour du monde. Pourtant, il faudra attendre des années avant que l'intégralité du film ne soit visible par le grand public. Et il ne sera diffusé pour la première fois à la TV américaine qu'en mars 1975, dans le cadre de l'émission Good Night America. Vous pouvez voir ici un extrait de cette fameuse émission, à partir de 05''00 : en hors-champ, on entend clairement la réaction du public, horrifié de découvrir les images. Avant cela, On n'en diffusa dans un premier temps que des photos, puis de très courts extraits. Zapruder vendit son film au magazine Life pour 250.000 $.

    Ces images furent remises à la Commission Warren, du nom du président de la Cour Suprême des Etats-Unis, chargée de faire la lumière sur l'assassinat. Le film de Zapruder resta dans ses coffres jusqu'en 1969, date à laquelle Jim Garrison, procureur de la Nouvelle Orléans, obtint sa communication et sa diffusion lors du procès qu'il intenta à un riche industriel, Clay Shaw, soupçonné par le procureur d'avoir trempé dans un complot visant à assassiner JFK.

    Journaliste-critique de cinéma, Jean-Baptiste Thoret évoquait avec passion ce petit film : "il s'agit du film le plus analysé, commenté et repris de toute l'histoire du cinéma américain" explique-t-il. "A l'époque, Kennedy avait comme conseiller technique le réalisateur Arthur Penn, qui rendra un hommage au fameux plan "Z313" (celui avec l'impact de la balle fatale sur le crâne de JFK) dans la séquence finale de son Bonnie and Clyde en 1967. Il y a aussi une référence évidente dans le Blow Out de Brian De Palma, dans lequel Travolta rajoute une bande-son qui permet d'identifier les tueurs. La violence des images de Zapruder est même la matrice du cinéma "gore réaliste", comme par exemple les effusions de sang dans la Horde sauvage de Sam Peckinpah...En fait, des années 60 jusqu'à la fin des années 90 - début 2000, le cinéma américain n'a jamais cessé de se nourrir du film de Zapruder".

    Ci-dessous, le désarroi de la population, le jour des funérailles de Kennedy, filmées par les caméras de l'émission Cinq colonnes à la une :

    La thèse du tireur isolé et la théorie de la "balle magique"

    Le 27 septembre 1964, la Commission Warren rendit son rapport au président Lyndon B. Johnson. Ses conclusions furent simples : Lee Harvey Oswald est l'assassin de JFK; il a agi seul pour des motifs personnel, et a tiré trois balles sur le cortège. Donc en agissant seul, il ne peut y avoir de complot. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, officiellement, c'est toujours cette version qui prévaut. Alors même que les témoignages et autres expertises les plus solides taillent en pièce depuis des années cette version. Et que l'analyse au peigne fin du film de Zapruder, ainsi que les trajectoires des balles et les angles de tirs montrent qu'il y avait plusieurs tireurs, et non un seul.

    Parmi les éléments retenus par la Commission Warren figure en effet ce que ses détracteurs ont appelé la "Théorie de la balle magique". Le rapport affirme que des trois balles tirées sur le cortège présidentiel, la seconde a traversé les corps de kennedy et Connally, le gouverneur du Texas : elle a frappé le président dans le dos, est ressortie par la gorge puis a traversé son torse, le poignet et la cuisse du gouverneur, finissant sa course dans les plis de son pantalon.

    Ci-dessous, le schéma reproduisant la trajectoire de la balle, telle que validée par la Commission :

    Cette balle a été retrouvée presque intacte, posée sur un chariot de l'hôpital Parkland... Une théorie et une trouvaille invraisemblable, ce qui lui a valu le surnom de "balle magique". En fait, aussi saugrenue soit-elle, cette théorie a surtout le mérite de conforter la thèse officielle : le tireur unique. Oswald n'aurait pu tirer quatre balles dans le temps de l'attentat, et il fallait que toutes les blessures soient causées par deux balles seulement.

    "Balle magique" aussi en raison de son invraisemblable trajectoire : touchant Kennedy de haut en bas dans le dos, elle remonte vers sa gorge, se déplace vers la droite de plusieurs centimètres et frappe Connally en trois endroits, après avoir une nouvelle fois modifié sa trajectoire...La commission Warren a pourtant retenu cette version, allant jusqu'à écrire : "il n'est nécessaire à aucune conclusion essentielle de la commission de déterminer quel est exactement le coup qui a frappé le gouverneur Connally".

    Pire, en dépit de toutes les contestations des experts et les multiples expériences qui prouvaient le contraire, le House Select Committee on Assassination (HSCA), une nouvelle commission chargé d'enquêter sur l'assassinat et qui travailla de 1976 à 1979, a pourtant retenu dans ses conclusions la théorie de la "balle magique".

    A l'aune de ces observations, notre entretien en septembre 2013 avec le réalisateur de Parkland, Peter Landesman, prend une saveur particulière. D'autant que l'intéressé est un ancien journaliste. "L'assassinat de Kennedy et le 11 septembre sont pour moi les 2 éléments les plus importants de la culture américaine, voire occidentale" nous disait-il. Et d'ajouter : "il y aura toujours un débat sur le vrai responsable, bien sûr, mais la vérité, c'est que l'acte a été commis par un tireur triste, solitaire et sociopathe". En l'occurence Lee Harvey Oswald.

    Ci-dessous, la bande-annonce de son film, "Parkland"...

    Un avis que ne partage évidemment pas les partisans -nombreux- du complot, à commencer par Oliver Stone.

    Les thèses conspirationnistes

    54 ans après les tragiques événements, le débat entre partisans de la thèse du tireur isolé -la version toujours officielle- et les adeptes de la théorie du complot fait toujours autant rage. En fait, les théories du complot sont déjà évoquées quelques mois à peine après l'assassinat de JFK, et même amplifiées après la publication des conclusions laborieuses de la Commission Warren. Auraient trempé dans le complot la Mafia, le FBI, les magnats texans du pétrole, le "complot mondial communiste", les "racistes" opposés à Kennedy et au Mouvement des droits civiques...

    Fait intéressant, un sondage publié aux Etats-Unis en avril 2013 révélait que 59% des américains pensaient que plusieurs personnes sont impliquées dans l'assassinat de JFK, tandis que 24% pensaient que Lee Harvey Oswald a agit seul. Un autre sondage, réalisé cette même année par l'Institut Gallup, révélait que pour 75% des américains, il y a eu conspiration(s).

    Lors de sa conférence de presse événement qui s'est tenue à Paris en 2013 pour promouvoir son roman Dr. Sleep, Stephen King fut questionné sur son ouvrage 22/11/63, qui évoque le destin d'un homme remontant le cours du temps pour empêcher l'assassinat de JFK. A la lecture de ses propos, on se doute qu'il n'est pas un adepte des thèses conspirationnistes.

    "Pour moi, c’est l’un des très rares cas où une personne à l’origine de changements majeurs n’est pas un politicien, un scientifique, un Prix Nobel ou un dirigeant dans le monde. Lee Harvey Oswald était un pauvre type, qui travaillait à la Texas School Book Depository [NDR : le bâtiment d’où Oswald aurait tiré, seul, selon la version officielle]. Il était dans le bâtiment ce jour-là, il avait de l’expérience en tant que tireur…Il était au bon endroit au bon moment. Ce jour-là, on avait aussi annoncé de la pluie qui n’est jamais venue. Au contraire il faisait très beau, ce qui fait que la voiture qui devait être fermée était découverte…Toutes ces choses viennent ensembles. Toutes les théories du complot oublient le fait que, parfois, les gens ont beaucoup de chances, tandis que d’autres nettement moins" expliquait-il.

    JFK, un film salutaire...

    De quoi donner du grain à moudre à celui qui fut à l'origine d'une bombe cinématographique et même politique : Oliver Stone, dont le brillant et contesté JFK se faisait largement écho des théories du complot. "Ce qui continue à générer l'intérêt, c'est que l'assassinat n'a jamais été vraiment élucidé. Par conséquent, toute personne intelligente doit se poser des questions, et cela a été fait sans relâche pendant 50 ans" dit-il. Et d'ajouter : "On a décidé qu'Oswald était le coupable et on a créé les preuves pour étayer cette thèse". Et même si son film est romancé, "c'était un film dramatique et non un documentaire. J'ai dû mélanger des personnages et des situations pour pouvoir tout dire en trois heures".

    Pour JFK, tout commence en 1987. Zachary Sklar, journaliste et professeur de journalisme à la Columbia University Graduate School of Journalism, rencontre Jim Garrison, et parvient à le convaincre d'écrire avec lui un manuscrit dans lequel Garrison se remémore son travail sur l'enquête. De cette collaboration naîtra l'ouvrage "On the Trail of the Assassins", publié aux Etats-Unis en 1988. Un exemplaire du livre parvient entre les mains du réalisateur Oliver Stone.

    "Le meurtre de Kennedy était un des événements de signal de la génération de l'après-guerre, ma génération" dira plus tard le cinéaste, qui sort enthousiaste de cette lecture. Il achète lui-même les droits d'adaptation de l'oeuvre, pour un montant de 250.000 dollars. Après avoir longuement rencontré Jim Garrison, et non désireux de mettre en scène un biopic, Stone s'intéresse à un autre ouvrage signé Jim Marrs : "Crossfire: The Plot That Killed Kennedy".

    Convoquez les dix meilleurs tireurs du monde. Trouvez celui qui était à Dallas le 22 novembre 1963, et vous aurez le coupable !

    En 1989, alors qu'il est en phase de pré-production de son prochain film, Les Doors, Stone propose à la Warner de faire un film sur JFK. Le PDG de la Major, Terry Semel, accepte. Doté d'un budget de 20 millions de dollars, qui sera revu à la hausse par la suite, Stone écrit le script avec le journaliste Sklar. Son ambition : faire un film d'investigation, dans la veine d'un Z de Costa-Gavras.

    Warner Bros.

    A sa sortie en 1991, JFK suscita une vive polémique. Walter Cronkite, célèbre journaliste télévisé américain qui a rythmé l’information dans les foyers US pendant plus de vingt ans (et qui apparait sous formes d’archives dans le film), déclarait alors au critique américain Roger Ebert : "il n’y a pas une once de vérité dans ce que je viens de voir".

    En fait, on a beaucoup reproché à Oliver Stone d’avoir intentionnellement rajouté des faits, et malmené les faits historiques. Il faut dire que la thèse défendue par le cinéaste et autres théoriciens du complot est pour le moins provoquante : JFK a en fait été victime d’un coup d’état, dans lequel le Vice-président, Lyndon B. Johnson, aurait trempé, dans le but avoué d’avoir les mains libres pour déclencher la guerre du Viêtnam. Pour tenter de se disculper de ces accusations, Stone a d’ailleurs publié peu après la sortie du film une version annotée de son scénario, où il justifie tous ses rajouts.

    ...a la portée éminemment politique

    En décembre 1991, Stone projeta son film aux membres du Congrès. Poussé par une Opinion réveillée par le succès retentissant du film, le Congrès réclama la publication de tous les dossiers sur l'affaire demeurés secrets. Le 27 octobre 1992, à quelques jours de l'élection présidentielle, George Bush signe une loi autorisant l'examen et la publication d'archives sur l'affaire Kennedy : l’Assassination Materials Disclosure Act.

    A l'époque, le directeur du FBI, William Sessions, déclara qu'il trouvait "essentiel" que les Américains puissent voir "le petit nombre" de documents non encore publiés. Sauf qu'en fait, ce nombre était tout sauf petit : on parle de près de 300.000 documents rien que pour le FBI. Mais les chercheurs doivent se conformer aux décisions prise par une commission de 5 membres chargés de la publication des pièces, le président des Etats-Unis gardant un droit de veto. Et rien n'indiquait que le FBI, la CIA ou les services secrets militaires allaient publier de facto des documents qu'ils avaient pris soin de ne pas publier, comme par exemple...leur dossier sur Lee Harvey Oswald.

    Même si depuis cette date, de nombreux documents furent déclassifiés, il reste encore beaucoup à faire. Des centaines de livres traitant de l'assassinat de JFK sont sortis. Et pourtant, une question demeure : connaitra-t-on un jour toute la vérité sur l'affaire Kennedy ? Une grande partie des documents devaient rester encore sous scellés jusqu'en 2029. L'autorisation d'ouverture des archives sur l'affaire par le président Trump ne devrait pas manquer de continuer à alimenter le débat et les interrogations sur ce qui reste, 54 ans après les faits, comme un profond traumatisme national.

    Dans le film Dalton Trumbo, JFK est aperçu sortant de l'avant-première du film Spartacus. Il est joué par le comédien Rick Kelly.

    Dans la série 11.22.63, JFK a les traits de Christopher Phipps.

    Cliff Robertson incarne le Lieutenant JFK dans Patrouilleur 109, basé sur l'expérience de JFK dans la guerre du Pacifique. Le film sorti à peine 5 mois avant la mort du président.

    Bruce Greenwood campe un très convaincant JFK dans "Treize jours" (2000)

    Le film revient sur la crise des missiles de Cuba. Pour Oliver Stone, il s'agit de la meilleure interprétation du président.

    Brett Stimely est un habitué du rôle. Il incarne JFK dans Watchmen, Parkland et Transformers 3 - La Face cachée de la Lune.

    James Marsden dans "Le Majordome" de Lee Daniels.

    Greg Kinnear est JFK dans la série "Les Kennedy", diffusée en France en 2011.

    Tom Hanks serrant la main de JFK (Jed Gillin) dans Forrest Gump.

    Rob Lowe incarne JFK dans le téléfilm "Killing Kennedy".

    C'est Martin Sheen qui prête ses traits à JFK dans la mini-série Kennedy, diffusée en 1983. Un signe avant À la Maison blanche ?

    Dans les scènes de reconstitutions de "JFK", c'est Steve Reed qui campe le président.

    William L. Petersen est JFK dans le téléfilm "Les Rois de Las Vegas", réalisé par Rob Cohen en 1998.

    William Devane est JFK dans le téléfilm The Missiles of October, diffusé en 1974, qui revient sur la crise des missiles de Cuba.

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