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    Festival de La Réunion 2014 - Jour 3 : d'Abd Al Malik à Viggo Mortensen, un combat de culture et de nature
    Laetitia Ratane
    Laetitia Ratane
    -Rédactrice en chef adjointe
    Très tôt fascinée par le grand écran et très vite accro au petit, Laetitia grandit aux côtés des héros ciné-séries culte des années 80-90. Elle nourrit son goût des autres au contact des génies du drame psychologique, des pépites du cinéma français et... des journalistes passionnés qu’elle encadre.

    Troisième jour de compétition ensoleillé, qui a tissé un lien entre deux films que tout semblait opposer : "Qu'Allah bénisse la France" d'Abd Al Malik porté par Marc Zinga et "Loin des hommes" de David Oelhoffen, emmené par Viggo Mortensen...

    laurent capmas / festival du film de la réunion 2014

    Le mot clef de cette troisième journée de festival ? Réunion. Des cultures, des natures, des individus et des problématiques. Celles qui nourrissent Qu'Allah bénisse la France et Loin des hommes, deux films opposés, réunis ici autour de Camus et de la question de l'engagement. Religieux ou politique.

    Les films du jour

    Ad Vitam

    Qu'Allah bénisse la France d'Abd Al Malik avec Marc Zinga, Sabrina Ouazani...

    Date de sortie : 10 décembre 2014

    La fureur est là et bien là, sous la plume et la caméra inspirées d'un poète, chanteur et réalisateur qui n'a pas fini d'utiliser toutes les formes d'art pour crier son engagement. Cadre virtuose, usage du noir et blanc sublime, séquences clipées, Abd Al Malik réunit toutes les qualités, mises au service de l'adaptation tant attendue de son autobiographie Qu'Allah bénisse la France.

    Suivant le parcours d'un jeune de banlieue déterminé à changer sa condition à coup de bagage culturel et d'esprit aguerri, ce récit initiatique s'impose en digne héritier de La Haine dans ce qu'il éteint de préjugés et enrichit d'humanité. Celle qui invite à la tolérance, au vivre ensemble, à une forme quelle qu'elle soit de spiritualité et d'amour, en un mot à la liberté.

    Michaël Crotto

    Loin des hommes de David Oelhoffen avec Viggo Mortensen, Reda Kateb...

    Date de sortie : 14 janvier 2015

    Après la culture, c'est la nature qui un temps commence à séparer les êtres avant de les réunir dans une même lutte. Celle menée contre l'environnement hostile, indifférent au sort des hommes confrontés malgré eux à la société, aux guerres politiques ou de religion.

    Il y a trois personnages principaux dans Loin des hommes : d'un côté les talentueux Kateb/Mortensen qui n'ont jamais été aussi charismatiques, de l'autre les sublimes espaces, prétextes à un beau western de son temps. Quête initiatique au coeur des étendues de plaines, cri contre l'intolérance et le manque de solidarité, engagement et apprentissage sont les maîtres mots de l'ample film de David Oelhoffen.

    Au micro

    1. Artiste total

    laurent capmas / festival du film de la réunion 2014

    Abd Al Malik : "Le cinéma est un art total, qui contient les sept arts, et permet d'aller très loin dans l'émotion. On est dans de l'immédiateté. Ce film est un cri comme vous le dites, mais un cri que les gens entendent parce qu'ils ont payé pour.

    Un cri donc dans le fond et un hommage au cinéma dans la forme...

    "Aujourd'hui, le cinéma est capable de bouleverser encore plus que la littérature et la musique. Je suis un passionné qui a aussi beaucoup travaillé sur des clips, qui ont été en quelque sorte mes courts métrages. J'aime raconter des histoires en choisissant pour elles l'écrin qui leur correspond le mieux. Dans le film, il y a de la musique, de la poésie, de la littérature donc cela me permet d'aller plus loin. D'une certaine façon, moi qui suis un homme des mots, c'est ici comme si la caméra devenait mon stylo et l'écran une grande feuille."

    Confondre la spiritualité avec les gens qui l'instrumentalise à des fins politiques, c'est indigne...

    " ...d'un pays qui a vu naître Rousseau, Derrida, Bourdieu, Sartre, Camus. Je voulais parler de ces amalgames-là. Quand un prêtre se révèle pédophile, l'amalgame ne se fait pas systématiquement et on ne demande pas à tous les chrétiens de se justifier."

    "Mon histoire est celle de quelqu'un venant d'une cité, ayant vécu des choses dures, et qui par le savoir, la culture et la spiritualité va réussir à transcender sa condition. Moi j'ai réussi parce que j'ai eu de la chance mais ça n'est pas normal. Quand on est dans un pays qui s'appelle la France, avec ses institutions merveilleuses permettant le vivre ensemble, ça devrait être juste normal. Un pays qui n'arrive pas à s'occuper de la même manière de ses enfants, c'est un problème."

    J'ai choisi le noir et blanc dès l'écriture...

    ... en hommage à La Haine mais aussi à Rocco et ses frères. Je voulais aussi que le spectateur en s'asseyant dans la salle se dise d'emblée : je suis devant un film. Le noir et blanc souligne les émotions, l'intemporalité."

    Marc Zinga : "J'aime les histoires et l'idée d'être l'outil permettant de les raconter. Le film parle de la nécessité de se libérer de ses peurs, ce qui permet d'aller à la rencontre de soi puis des autres. Sans conflit. Le point de départ est la peur, motivée bien sûr par plein de choses."

    2. Acteur magistral

    laurent capmas / festival du film de la réunion 2014
    J'ai écrit en pensant à Viggo Mortensen et Reda Kateb devait jouer dans mon premier film

    David Oelhoffen : "J'ai écrit en pensant à Viggo Mortensen et à son visage taillé pour le western. J'ai appris plus tard qu'il parlait français et ai osé lui envoyer le script. Il a accepté très vite et a toujours été là, investi tout au long du film.

    Reda m'avait plu lors du casting mais devait jouer un boxeur et n'en était pas un, contrairement à ce qu'il avait annoncé. De ce moment-là, j'ai su qu'on travaillerait un jour ensemble.

    Reda et Viggo se sont retrouvés avant le tournage de Loin des hommes pour préparer leur rôle ensemble. Ils sont tous les deux généreux, non égocentriques, ils n'essaient jamais de tirer la caméra à eux, ce sont des partenaires."

    Paroles de jurés

    laurent capmas / festival du film de la réunion 2014

    Déborah François :

    Un premier film, c'est un univers, une promesse.

    "Un premier jet permettant de repérer les réalisateurs. Nous attendons encore tous les points de comparaison avant de parler réellement des films. Il ne faut pas que l'ordre de présentation influe sur notre jugement. On prend tous des notes chacun de notre côté pour l'instant. La sélection est costaude en émotions, qui parle de soutien, d'exclusion et de sujets très forts. Des films chargés que l'on ressent intensément bien que sans larmes."

    "Je découvre Claude Lelouch et suis honorée de faire partie de son jury. Il a une énergie dingue, il a fait plus de 40 films et continue à y aller. Quand on parle de façon informelle au déjeuner, il parle simplement de cinéma, avec générosité."

    La Réunion mon amour

    laurent capmas / festival du film de la réunion 2014

    La bien nommée

    Abd Al Malik : "J'aime La Réunion. J'ai l'impression qu'ici la France est à la hauteur d'elle-même. Dans le rapport à la diversité, au bien vivre ensemble. Il y a quelque chose de beau, on a l'impression que la France a réussi ce qu'en Métropole elle a seulement en projet ou en puissance."

    Marc Zinga : "Je ne connaissais pas du tout La Réunion. Je suis heureux dans l'absolu de voir du pays et je suis impressionné de me rendre compte à quel point ce coin de terre porte bien son nom. La Réunion d'ethnie. C'est impressionnant."

    Terre de tournage ?

    Fabienne Redt, présidente du festival : "On est au début d'une histoire de cinéma à la Réunion. Il y a pas mal de séries qui se sont tournées ici. Un premier long métrage s'est tourné l'année dernière. On a plus de matériel, des techniciens performants. Il faut laisser le temps au temps car les financements d'un film sont longs et que nous sommes à 12000 km du centre économique du cinéma qu'est Paris. Il faut faire découvrir notre île. Si on tournait ici, j'aimerais qu'on évite la question ethnique et qu'on utilise ses décors, qu'on fasse un James Bond, un film de genre qui sortirait de l'idée préconçue d'une île."

    Marianne Denicourt, membre du jury : "A la Réunion, on a envie de faire une comédie qui se passe sur la mer, on a envie de faire un drame qui se passe sur le volcan comme Rossellini, on a envie d'une histoire d'amour. Moi je ferais les deux : une histoire d'amour autour du volcan et dans ses terres sauvages puis une comédie romantique avec la mer et le soleil. Et avec ces nuages qui descendent vite sur les terres, c'est impressionnant...

    Abd Al Malik : "Je suis très fleur bleue. Nora Ephron, Nuits Blanches à Seattle, Quand Harry rencontre Sally. Je trouve qu'une belle histoire d'amour ici, sur fond de France réussie, ça pourrait faire une comédie romantique parfaite."

    David Oelhoffen : "La Réunion a d'extraordinaire sa nature, ses cirques. C'est spectaculaire, encaissé, changeant. Je ferais un film à l'intérieur de l'île, dans les Hauts, dans les cirques et non ici. Loin des hommes m'a donné envie de continuer à faire des films où des personnages sont perdus dans la nature. Mon héros s'est mis volontairement à l'écart du monde pour s'en protéger et faire son bien comme il peut. Or on ne peut se mettre à l'écart de l'Histoire. Le vent de l'Histoire vous rattrape..."

    Le saviez-vous?

    Christophe Lamotte, réalisateur de Disparue en hiver, va tourner son prochain film en partie à La Réunion.

    "Je repars avec le même scénario et le même producteur, Stéphane Marsil pour ce nouveau projet ambitieux avec des thèmes qui reviennent, qui m'appartiennent. Ce sera un film sur le dépassement de soi, le rapport à l'amour et à l'amitié, la question de la culpabilité. Ce film se passera à la Réunion au début et à la fin. J'ai vu des images de l'île et cela m'a inspiré. Le fait de la découvrir maintenant, c'est encore mieux. Le rapport à la nature, à sa beauté et à sa sauvagerie. Ce qui m'intéresse aussi de manière un peu annexe, c'est la vie des insulaires."

    Ça tweete sur la plage...

    A suivre....

    Un nouveau focus sur le cinéma à la plage, le soleil toujours, les deux derniers films de la compétition et la rencontre avec ceux qui les font...

    La Vie pure de Jeremy Banster

    L'Art de la fugue de Brice Cauvin

    La bande-annonce de "Qu'Allah bénisse la France"

     

    Le jury au soleil

    Plage de Boucan Canot

    Déborah François

    Plage de Boucan Canot

    Soirée hommage à Claude Lelouch

    Présentation de Roman de gare.

    Zinedine Soualem et son complice Claude Lelouch

    Zinedine Soualem et son complice Claude Lelouch

    Abd Al Malik et son acteur Marc Zinga

    Laurent Veil sur la scène du Cinéma de Cambaie

    Abd Al Malik présente "Qu'Allah bénisse la France"

    Abd Al Malik et son acteur Marc Zinga

    David Oelhoffen présente "Loin des hommes"

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