Les Rascals de Jimmy Laporal-Tresor
Avec Jonathan Feltre, Angelina Woreth, Missoum Slimani...
De quoi ça parle ? Les Rascals, une bande de jeunes de banlieue, profite de la vie insouciante des années 80. Chez un disquaire, l’un d’eux reconnait un skin qui l’avait agressé et décide de se faire justice lui-même. Témoin de la scène, la jeune sœur du skin se rapproche d’un étudiant extrémiste qui lui promet de se venger des Rascals. Alors que l’extrême droite gagne du terrain dans tout le pays, la bande d’amis est prise dans un engrenage. C’est la fin de l’innocence…
Les Black Dragons
Les Rascals se déroule en 1984, année où le FN fait son premier grand score à l’échelle nationale, avec près de 11 % aux élections européennes et 10 euro-députés. Alors que les Skinheads néo-nazis investissent les concerts et occupent la rue, en particulier plusieurs quartiers parisiens (Les Halles, Saint-Michel, Convention...), naissent en 1983 les Black Dragons.
Cette bande anti-fasciste formée dans la banlieue parisienne nord-ouest s'inspire de la branche afro-américaine fondée fin des années 70 et fortement influencée par le Black Panther Party. Elle se donne pour but de chasser les groupuscules racistes.
Du cinéma populaire
Jimmy Laporal-Tresor désirait se diriger vers un cinéma typique des années 80, à la fois populaire et porteur d'un message politique : "Aujourd’hui, on dirait que ce sont des films politiques mais à l’époque, ils étaient fabriqués comme des films populaires. Ce qui intéressait ces metteurs en scène, c’était, avant toute autre ambition, la relation avec le spectateur. Je pense à des cinéastes comme Costa-Gavras, qui ont toujours voulu faire du grand spectacle sans manquer d’y insuffler une vision du monde. On les classe du côté d’un cinéma très intellectuel, un cinéma d’idées, mais l’expérience du spectateur était cruciale chez eux."
Un personnage féminin ambigu
Avec le personnage de Frédérique, Jimmy Laporal-Tresor voulait dresser un personnage complexe, avec lequel le public entretient un rapport ambivalent. Il est rare de voir un personnage féminin faire le choix de la haine politique. Elle est d'abord présentée comme une victime, avant qu'elle entreprenne sa vengeance et se nourrisse de la haine : "Ce que le film montre, c’est qu’il y a des personnes qui manipulent les frustrations et les colères et les transforment en armes politiques. C’est le vrai danger."
La représentation de l'extrême-droite
Avec Frédérique, le visage de l’extrême droite change des représentations habituelles. "Dans les films, les politiques et les militants d’extrême droite sont souvent discrédités, comme si leur racisme venait du fait qu’ils étaient abrutis. C’est dangereux de laisser croire cela. Ils sont humains, traversés d’émotions et ils ont choisi de prendre le chemin de la haine", explique le réalisateur.
Il souligne : "En réalité, il est impossible de schématiser les gens qui épousent des convictions haineuses. Cela pourrait arriver à n’importe quel être humain qui aura vu sa confusion ou sa détresse instrumentalisées par des personnes mal intentionnées."
Former la bande des Rascals
Avec la directrice de casting Marine Albert, le réalisateur a démarré le casting très en amont du tournage, en octobre 2020 : "Nous avions profité du casting de Soldat Noir [son court-métrage précédent, ndlr] pour voir certains acteurs et certaines actrices et leur réserver une place dans Les Rascals. La première étape a été de trouver des individualités qui fonctionnaient seules. Nous avons longtemps entendu les comédiens individuellement et quand notre choix ne se portait plus que sur quatre ou cinq acteurs pour chaque rôle, nous avons commencé à travailler par groupe, sur des associations importantes, comme Mandale / Boboche, Mitch et sa grand-mère ou Mitch / Rudy."
Jimmy Laporal-Tresor a apporté un soin particulier au langage de ses personnages : "Dès le casting, j’y ai fait attention et j’ai parfois écarté des acteurs très bons mais dotés d’un accent trop actuel et probablement très difficile à effacer, même en y travaillant."