La Conspiration du Caire de Tarik Saleh
Avec Tawfeek Barhom, Fares Fares, Mohammad Bakri ...
De quoi ça parle ? Adam, simple fils de pêcheur, intègre la prestigieuse université Al-Azhar du Caire, épicentre du pouvoir de l'Islam sunnite. Le jour de la rentrée, le Grand Imam à la tête de l'institution meurt soudainement. Adam se retrouve alors, à son insu, au cœur d'une lutte de pouvoir implacable entre les élites religieuse et politique du pays.
Une université mythique
La Conspiration du Caire est un thriller politique qui se déroule à Al-Azhar, une université mythique du Caire qui est aussi l'épicentre du pouvoir de l'islam sunnite. Le grand-père de Tarik Saleh, né dans un petit village au cœur du Delta du Nil, a été admis à Al-Azhar (à l’époque la plus prestigieuse université de l’Afrique et du Moyen-Orient). Le metteur en scène se rappelle : "Il a été le premier dans son village à recevoir une véritable éducation. Al-Azhar a été bâtie par les Fatimides au cours du Xème siècle et a représenté, dès le début, le lieu fondamental des études islamiques. Les Fatimides étaient des musulmans chiites mais, quand Salah ad-Din – chez vous, Saladin – a pris le pouvoir au XIIème siècle, la première mesure qu’il prit fut de convertir Al-Azhar en institution sunnite."
Naissance du projet
Tarik Saleh a relu Le Nom de la Rose, le thriller médiéval d’Umberto Eco qui se déroule dans un monastère, en se posant les questions suivantes : "Et si je racontais une histoire de ce genre mais dans un contexte musulman ? Est-ce que ce serait possible ? Est-ce que j’en aurais le droit ? Est-ce que c’est dangereux ? La même sensation que celle de jouer avec le feu lorsqu’on est enfant. Une fois que j’ai eu commencé à suivre cette pensée, je n’ai pas pu m’arrêter. Non seulement je pouvais le faire, mais je devais le faire. J’ai donc commencé à imaginer une histoire qui se déroulerait à notre époque. J’ai imaginé un jeune homme, Adam, fils de pêcheur, qui obtiendrait une bourse pour partir étudier à Al-Azhar."
Tournage en Turquie
Tarik Saleh n'a pas pu tourner La Conspiration du Caire en Égypte. En 2015, trois jours avant le début du tournage du Caire confidentiel, les services de sécurité égyptiens lui ont ordonné de quitter le pays. Depuis, le réalisateur fait partie d’une liste d’indésirables qui, s’ils reposaient le pied sur le sol égyptien, seraient immédiatement arrêtés. Il explique : "La décision a même été rendue publique à la télévision égyptienne. (...) Nous avons tourné La Conspiration du Caire en Turquie. Pour représenter Al-Azhar, nous avons pu tourner dans la Mosquée Süleymanye d’Istanbul, un bâtiment magnifique bâti au XVIème siècle, dont le maître d’œuvre, Sinan, a formé l’architecte de la Mosquée Bleue."
Référence carcérale
Tarik Saleh, le directeur de la photographie Pierre Aïm et le chef décorateur Roger Rosenberg avaient pour référence visuelle le film de prison : "À Al- Azhar, comme dans une prison, il y a la cour, la cantine, etc. Tous les lieux balisés du genre. Je ne sais pas ce que penseront du film les autorités égyptiennes et les étudiants et professeurs de l’université Al-Azhar. Les opinions officielle et officieuse seront probablement très différentes. Le Caire confidentiel a été officiellement perçu comme une attaque contre la police égyptienne, mais j'ai reçu beaucoup de courriers de policiers égyptiens qui ont adoré le film..."
Le colonel Ibrahim
Fares Fares, qui pour l'occasion retrouve Tarik Saleh après The Contractor (2022), Le Caire Confidentiel (2017) et Metropia (2009) a lui-même travaillé le look d'Ibrahim, en s’inspirant d’un de ses oncles. Tarik Saleh se rappelle : "Je lui ai demandé s’il était sûr de vouloir aller aussi loin, et puis j’ai adoré le résultat. En voyant Ibrahim, on imagine d’emblée qu’il a des problèmes d’hypertension, peut-être qu’il a subi un pontage. Comme avec Adam, tout le monde sous-estime Ibrahim. Il a l’air de quelqu’un qui ne sait pas ce qu’il fait. Mais il a compris avant tout le monde la stratégie du Cheikh aveugle, et il est prêt à le laisser faire parce qu’au fond, c’est peut-être sa dernière mission. Évidemment, il ne le dit pas..."