On connaissait CleanFlicks.com, une société américaine en plein développement proposant à ses clients la location ou la vente de films dans des version aseptisées, via un remontage : retrait de la violence graphique et verbale, suppression de l'érotisme et du sexe, coupes de scènes choquantes pour obtenir des films E-rated ou "classés E", susceptibles d'êtres vus par tous (voir notre article ).
"L'anti-CleanFlicks"
Désormais, il faudra également compter avec FilthyFlicks Ltd. (littéralement "films sales"), son antithèse la plus radicale. Implantée dans la ville de Resada dans la San Fernando Valley en Californie, cette société propose d'insérer dans n'importe quel film, à la demande de ses clients, diverses scènes violentes, de nudité, voire pornographiques ! Utilisant un procédé de "clonage virtuel" des acteurs principaux des longs métrages choisis, ce service permet de manipuler les images pour offrir toutes sortes de scènes... inédites.
FilthyFlicks ou l'ultime "director's cut"
"Nous adorons les films, mais nous préférons les regarder avec du sexe, de la nudité, du blasphème et de la violence extrême. Et comme nous pensons que d'autres peuvent avoir les mêmes envies que nous, nous leur proposons ce service. (...)Vous savez que vous les voulez. Ces films sont pour les gens qui disent 'Non', mais qui pensent 'Oui'. Je corrige certaines erreurs faites en salle de montage. On pourrait appeler ça l'ultime 'director's cut'". Ainsi s'exprime Rod Cumming, 34 ans, dirigeant d'une société de production, Ministre de son propre culte de "La Première Eglise d'Hollywood du 'Ils l'ont montré mais seulement pour une seconde'" (!) et fondateur de FilthyFlicks . Une idée qui lui vint, selon ses propres dires, de Dieu en personne, dans un message adressé à lui durant le tournage de son nouveau film Risky Libidinous, mettant en scène gymnastes, raquettes de ping-pong et kiwis (!).
De "Raging Bull" à "Spider-Man"
Fort de cette mission divine, Rod Cumming milite donc contre le "péché d'omission" ou "laisser de côté les bonnes choses", et offre la possibilité de voir enfin "ce que tout le monde sait qu'il se passe ou qu'il aurait dû se passer" dans les films.
Et de proposer une version plus épicée de Spider-Man ("Vous savez que vous vouliez voir Kirsten Dunst et Tobey Maguire le faire dans le film, et ce fut une vraie déception de ne rien voir. En fait nous n'allons pas seulement vous montrer Tobey et Kirsten. On va également vous montrer Cliff Robertson en Oncle Ben et Rosemary Harris en Tante May se lâcher"), Raging Bull version trash ("Ils continuent à se battre pendant des heures. Jusqu'à ce que la tête de Robert De Niro tombe") ou encore Casablanca ("Dans le film, Humphrey Bogart peut bien entendu laisser partir Ingrid Bergman et rester sur le tarmac de l'aéroport. Mais si vous le voulez, vous pouvez également les suivre tous deux dans l'avion et les regarder faire tanguer l'appareil jusqu'à ce que les pneus éclatent")... (!)
Tout un programme pour une petite société qui pourrait rapidement devenir grande. Après tout, qui aurait imaginé que la petite CleanFlicks.com, fondée dans l'Utah, soit désormais implantée dans quinze Etats à travers les Etats-Unis , via une soixantaine d'enseignes ?
Le problème du droit d'auteur
A t-on le droit de retoucher les oeuvres des autres ? La législation américaine est encore floue sur ce point. D'un côté, en raison du droit d'auteur, il est normalement interdit de vendre des oeuvres différentes du montage initial approuvé par son auteur. De l'autre, il existe des solutions pour contourner ce problème légal : ainsi, soit ces sociétés proposent de remonter les films appartenant à leurs clients (qui ont le droit de faire ce qu'ils souhaitent de leurs acquisitions, et donc de les remonter), soit elles proposent (c'est le cas de CleanFlicks) la location des films remontés leur appartenant...
Une telle situation est évidemment source de nombreux problèmes d'ordre légal. Ainsi, les membres du syndicat des réalisateurs américains (la DGA) protestent actuellement contre de tels agissements. Un affrontement qui ne fait que commencer...
Yoann Sardet