Mohsen Makhmalbaf est connu en France comme cinéaste, mais son oeuvre écrite faite de poèmes et de romans n'avait jamais été traduite. Cet oubli vient d'être réparé avec la parution en français aux Editions Calman-Lévy du Jardin de cristal, paru en Iran en 1982 et qui a depuis été régulièrement réédité.
Une histoire de femmes
Le Jardin de cristal est avant tout une histoire de femmes comme aime les filmer Makhmalbaf. Quatre familles vivent dans une propriété réquisitionnée par le régime à Téhéran. Les femmes y sont tenues recluses et voilées selon les principes de la Révolution. Elles sont toutes épouses ou mères de martyrs. Tandis que la guerre contre l'Irak continue de leur enlever leurs hommes, ces femmes apprennent à se connaître et à s'entre-aider malgré la promiscuité, à surmonter ensemble leur douleur pour continuer d'élever leurs enfants...
Si l'auteur dresse un tableau extrêmement critique de la société iranienne post-révolutionnaire, il sait aussi peindre avec nuances le quotidien de ces familles. Les rires ne sont pas absents de ces vies de souffrance, les femmes savent quelques fois résister au joug masculin malgré leur isolement, et l'onirisme surgit au milieu de destinées broyées par la guerre. Un livre qui donne une image de la femme iranienne à cent lieux des stéréotypes occidentaux.
Amélie Charnay
Le Jardin de cristal, Mohsen Makhmalbaf, traduit du persan par Vincent Despagnet, Calmann-Lévy, 329 pages, 20 euros.