Mon compte
    Rapport sur le financement du cinéma

    Le groupe de travail sollicité par le CNC pour analyser le financement du cinéma français vient de rendre ses conclusions. Un bilan paradoxal...

    Le cinéma français vit actuellement un paradoxe. Il se porte à nouveau bien dans l'Hexagone et s'exporte de mieux en mieux à l'étranger, mais les professionnels du secteur s'inquiètent de son avenir à cause de son système de financement qui paraît fragile (voir notre article). C'est la raison pour laquelle le Centre National de la Cinématographie (CNC) a diligenté un rapport visant à aider la commision d'expertise mise en place par le Ministre de la Culture dans l'optique d'une réforme.

    Le prestige retrouvé du cinéma français

    Première chose sur laquelle insiste le rapport, le cinéma français se porte mieux et le catastrophisme n'est pas de mise même si, dans le pire des cas, les chaînes de télévision réduisaient leurs investissements dans le septième art : plusieurs signaux sont au vert. La fréquentation a augmenté au profit des films français dont la part de marché se situe autour de 40%. Le DVD a vite conquis l'Hexagone et les films français commencent à y trouver leur compte. Les recettes des productions françaises à l'étranger sont également en hausse (voir notre article ) et les investissements de notre pays à l'étranger sont plus fréquents. Enfin la France produit plus : la production est passée de 89 films en 1994 à 172 en 2001.

    Les points noirs du système de financement français

    Le montant des financements des films français ne cesse d'augmenter : il représentait 367 millions d'euros en 1991 et s'élève à 749 millions d'euros en 2001. Rappellons les différentes formes de financement :

    les aides de l'Etat : soutien automatique (concerne les producteurs, distributeurs et exploitants avec un système de reversement proportionel aux recettes) et soutien sélectif (couramment appelée avance sur recettes)

    les pré-achats des chaînes de télévision

    les investissements des chaînes de télévision sous forme de parts de coproduction

    les investissements des SOFICA : instrument fiscal incitant à financer les films français.

    les apports des distributeurs

    les apports de coproducteurs étrangers dans le cas d'une coproduction internationale

    Première faiblesse : certaines formes de financement sont sous-exploitées. Le soutien automatique a augmenté mais pas le soutien sélectif ni les SOFICA. Par ailleurs, les chaînes de télévision ont pris de plus en plus d'importance au cours des dix dernières années au point de représenter désormais 40% du financement.

    Deuxième point noir : si le nombre de films produits a augmenté, ce phénomène a surtout profité aux films à petit (moins de 1 millions d'euro) et à gros budget (plus de 10 millions d'euro). En contrepartie les oeuvres de buget moyen (entre 2 et 4 millions d'euro) sont en recul. Plus le budget d'un film est faible, moins il bénéficie de sources de financement et c'est l'inverse qui se produit pour les grosses productions. Un déséquilibre qui fragilise les petits films et qui met en danger à moyen terme les films de budget moyen.

    Troisième constat : la précarité des sociétés de production et de distribution dites "indépendantes". Elles sont ainsi désignées par opposition aux entreprises qui sont à la fois distributrices, productrices et exploitantes, ainsi qu'à celles qui ont des liens capitalistiques avec les télévisions. Les producteurs indépendants ne possèdent pas suffisamment de capitaux propres et sont donc très dépendants du volume des financements externes. Ils sont également de plus en plus touchés par l'endettement et subissent de plein fouet la réduction des pré-achats de Canal Plus. Même tableau chez les distributeurs : ils rentabilisent de moins en moins le coût de sortie des films en salles qui ne cesse d'augmenter.

    Les propositions

    "Le développement des instruments fiscaux"

    Priorité serait donnée aux incitations fiscales et en premier lieu aux SOFICA. Limitée jusqu'à maintenant à 46 millions d'euro, l'enveloppe des SOFICA pourrait être augmentée avec une orientation plus accentuée vers les productions indépendantes.

    "Le rééquilibrage du compte de soutien"

    En clair, il s'agirait de mieux tirer profit de la taxe sur les ventes et locations de vidéos. La TVA a été fixée à 2% en attendant que ce secteur se développe, et au vu de sa bonne santé, une hausse de la taxe serait envisageable.

    "L'encouragement au développement de nouvelles sources de financement"

    Cette proposition vise tout d'abord les aides dispensées par les collectivités territoriales qui sont actuellement de 6 millions d'euros. Un effort surtout supporté par l'Ile de France et la région Rhône-Alpes. L'objectif serait d'atteindre les 15 millions d'euro.

    Par ailleurs les financements internationaux sont également en ligne de mire. Leur participation est de 8%, un chiffre qui laisse de la marge et qui pourrait être dopé avec des incitations à la coproduction et la levée de certains obstacles juridiques.

    "La régulation des financements encadrés en vue d'assurer la diversité de la production"

    Il s'agirait d'étendre la clause de diversité de Canal Plus à d'autres acteurs comme TPS par exemple. Car la chaîne cryptée est obligée de consacrer 45% des pré-achats à des films dont le budget est égal ou inférieur à 5,34 millions d'euro). Dernière suggestion : créer un observatoire de la production cinématographique pour assurer une meilleure régulation des financements du cinéma français.

    Toutes ces mesures pourraient apporter au final entre 80 et 100 millions d'euro supplémentaires. Et le rapport de conclure : "La reconquête récente du public du cinéma par la pluralité, la richesse et l'invention de la production française dans son ensemble; le fait que le cinéma soit aujourd'hui la pratique culturelle la plus accessible à un large public, confondant toutes les catégories sociales; le constat enfin que la réputation et le succès des films français à l'étranger favorise très efficacement la connaissance de notre culture dans le monde : tous ces éléments justifient que l'on mobilise résolument en faveur de notre production des moyens qui restent à la mesure du poids économique de cette industrie -somme toute modeste au regard de son considérable impact culturel- mais qui lui sont néanmoins essentiels.

    Amélie Charnay

    FBwhatsapp facebook Tweet
    Sur le même sujet
    • 2002 : cinéma français : embellie durable ?
    • Le cinéma français explose à l'étranger
    Commentaires
    Back to Top