Hausse de la fréquentation des spectateurs dans les salles (145 millions de spectateurs en 2001), succès des films comme Les Autres ou Torrente 2, Mision en Marbella et consécration internationale d'artistes hispaniques (Alejandro Amenabar, Penélope Cruz, Javier Bardem ou Alex de la Iglesia) : l'année écoulée s'était avérée fructueuse pour le cinéma ibérique. Pourtant, ce bilan n'est pas aussi reluisant qu'il n'y paraît. Malgré des records de production (117 films en 2001) et le doublement de sa part de marché au niveau national qui atteint désormais 19 %, le rapport sur l'état du cinéma espagnol en 2001, publié chaque année au mois de janvier par la revue Academia, revista del cine espanol souligne des "problèmes structurels endémiques" au sein de son industrie.
Des inégalités flagrantes
La bonne santé du cinéma espagnol n'a pas permis de réduire les inégalités entre les différents acteurs du système. De fait, ce document dévoile que 78,5 % des producteurs nationaux se contentent de réaliser un film par an, alors que moins de 8% sont en mesure d'en produire plus de trois. Un petit groupe de producteurs occupe une place prépondérante dans le système et bénéficie de larges avantages financiers comme Lola Films (onze films en 2001 dont The Dancer upstairs, première oeuvre de John Malkovich en tant que réalisateur). Les producteurs ne bénéficiant pas de l'appui de grands groupes de communication affichent ainsi de réelles diffucultés à monter leurs projets.
Par ailleurs, le rapport rappelle que les droits de distribution de la plupart des films espagnols sont détenus par des entreprises nord-américaines contrôlant 84,4 % du marché. Enfin, les recettes sont concentrées entre un petit nombre d'acteurs du marché : les dix films espagnols les plus rentables s'octroient ainsi 73 % des 601 millions d'euros de recettes annuelles.
Une bonne année ?
Dans un article du journal El Pais daté du 17 janvier, le vice-président de l'Académie des sciences et des arts cinématographiques Antonio Chavarrias a voulu dédramatiser ce bilan en rappelant que "c'est une bonne année pour le cinéma espagnol", et que "c'est un bon symptôme que les entreprises nord-américaines se tournent vers lui, parce que cela signifie que le cinéma espagnol intéresse et qu'il va bien".
Ce paradoxe d'une production créative attirant les spectateurs et pourtant pleine d'inégalité n'est pas une spécificité espagnole, et touche d'autres industries comme celle du cinéma français et même celle des Etats-Unis. En fait, le cinéma ibérique souffre de problèmes classiques comme le manque de promotion et une distribution inadéquate qui fragilisent souvent les productions nationales. Néanmoins, les bons résultats de l'année écoulée augurent un avenir prometteur (voir notre article ).
David Custodio