Martha... Martha raconte l'histoire d'une famille, un trio composé de Martha, la mère, Reymond, le père, et Lise, leur fille. Trio malmené par l'existence et par le lourd passé familial de Martha dont on ne découvrira que quelques bribes : des parents qui lui préfèrent sa soeur, Marie, cette même soeur qui la rejette, et un frère mort il y a longtemps. AlloCiné a rencontré sa réalisatrice Sandrine Veysset, qui revient sur la genèse et les thèmes du film.
AlloCiné : Quelle est l'origine de "Martha... Martha" ?
Sandrine Veysset : Le roman Disparu de Marry Mac Garry Morris, une écrivain américaine, que j'avais lu il y a un petit moment. J'ai lu plusieurs livres de cette femme que j'aime vraiment, qui comportent souvent des personnages assez en marge. J'avais commencé à en faire l'adaptation mais je n'ai pas obtenu les droits donc j'ai abandonné. J'ai juste gardé l'idée de départ : le trio. Il y a un autre livre qui m'a inspiré où figurait une scène de noyade avec un enfant.
La famille est l'un de vos thèmes de prédilection...
C'est plutôt les rapports humains qui m'intéressent. J'aime beaucoup travailler sur des liens affectifs entre les gens et il se trouve que dans la famille, les liens affectifs sont omniprésents, agréables ou désagréables. C'est même une espèce de laboratoire des liens affectifs. C'est cela qui m'intéresse, pas la notion de famille.
Comment avez-vous choisi les comédiens ?
Valérie Donzelli a passé un casting classique, je l'ai vu en cassette. Je ne suis pas là au début pour le casting : je fais d'abord remplir un questionnaire en rapport avec le film. J'ai procédé de la même manière pour Yann Goven que je n'avais pas vu dans De l'histoire ancienne d'Orso Miret.
L'enfant c'est la fille du scénariste Sébastien Régnier avec qui j'ai écrit Martha... Martha. Au départ, ce n'était pas du tout prévu que ce soit elle. En allant écrire chez Sébastien, on est devenu copines. Cela a évité de faire des castings enfants, qui sont en général très épuisants. Et puis je trouvais qu'elle correspondait bien au personnage, qu'elle avait quelque chose qui m'attirait. Je lui ai fait faire des essais et je l'ai trouvée assez convaincante.
Pour établir une certaine complicité, les acteurs ont passé du temps ensemble avant le tournage...
C'est une demande que je fais tout le temps dans mes films. Avant le tournage les acteurs doivent se rencontrer. Il faut qu'il y ait une complicité entre eux, qui ne peut pas s'acquérir devant une caméra. Au moment du tournage, on peaufine la scène mais il faut qu'on sente s'il y a une complicité déjà installée ou pas. J'estime que c'est 40% du travail d'acteurs que de se préparer aux rôles : se rencontrer, être souvent ensemble. J'ai également demandé au chef décorateur que l'appartement soit fonctionnel pour que les acteurs puissent vivre dedans, se faire à manger... Le camion que Reymond utilisait était aussi à leur disposition. Ils ont monté et démonté des stands sur les marchés.
J'ai travaillé de la même façon dans Y aura-t-il de la neige à Noël ?. Tous les jeux que faisaient les enfants avaient été répétés avant. Ils s'appelaient par les prénoms du scénario. Ils ont crée des liens entre eux. Même si cela peut paraître un peu idiot, c'est ma façon de travailler.
Comment avez-vous travaillé avec Julie Régnier, la petite fille ?
Elle est beaucoup restée avec Valérie Donzelli et Yann Goven, et a passé du temps dans la chambre du film. Elle a regardé tous les jouets, s'est familiarisée avec les objets. J'avais également demandé à son père, Sébastien Régnier, de lui lire chaque soir une partie du scénario. C'est une fillette qui aime beaucoup qu'on lui raconte des histoires. C'était un bon moyen pour la mettre en contact avec le scénario.
La scène qui se passe dans la douche est particulièrement violente. Comment l'avez-vous préparée ?
On en a beaucoup parlé. Julie l'appréhendait. Valérie lui a expliqué qu'il fallait qu'il y ait une totale coopération. Je lui ai dit de se laisser aller si elle avait envie de pleurer. C'est ce qu'elle a fait. Elle a de la volonté. Après trois prises, elle était très contente d'y être arrivée. Elle a compris ce que c'était que le travail d'actrice.
Le film s'appelait d'abord "Conte cruel de l'enfance". Avez-vous eu des difficultés pour trouver le titre ?
Conte cruel de l'enfance était une matière de départ pour le scénario. J'ai hésité entre plusieurs titres puis c'est Martha... Martha qui s'est imposé. Le prénom est important, car c'est un personnage qui n'a pas de place, qui a besoin de crier son prénom pour qu'on la reconnaisse. Mais ce titre m'est venu moins rapidement que ceux de mes deux précédents films où il y avait une évidence.
Propos recueillis par M-C.H.
Retrouvez toutes les informations sur Martha... Martha sur le site officiel du film.