Jean-François Lepetit est un producteur comblé. Depuis quelque temps, on le voit s'exprimer dans de nombreuses revues professionnelles, et sa société a retrouvé toute sa vigueur depuis le succès international de Romance, de Catherine Breillat. De quoi faire oublier les déconvenues subies il y a quelques années avec Le Brasier (1991), un film à très gros budget qui n'avait pas rencontré son public.
Depuis Romance, Jean-François Lepetit a retrouvé Catherine Breillat pour A ma soeur !. Chaleureusement, il évoque celle qui est pour lui une artiste complète : "la particularité de Catherine Breillat, c'est de ne pas être une réalisatrice, dans le sens où elle ne tourne pas forcément le scénario. Le film qu'elle veut faire se révèle parfois au montage, et n'est pas forcément évident à la lecture du scénario." Et en un mot, il résume leur relation : "je crois qu'il faut être assez proche d'elle, et comprendre ce qu'elle veut faire." L'entente est telle que les deux personnalités se font mutuellement des suggestions. Ainsi, Jean-François Lepetit a proposé à Catherine Breillat de faire des projections tests, et la réalisatrice a complètement adhéré au système : "elle s'est assise au milieu de la salle, elle a revu son film non encore achevé, et m'a dit : si tu me donnes une semaine de plus, je sais exactement où je vais couper, bouger des choses dans le montage. Elle a vécu cela comme un outil qui lui permettait de réajuster son film, pour qu'il soit mieux perçu par le public."
Après déjà deux films ensemble, Jean-François Lepetit est près à poursuivre l'aventure, et dans l'année qui vient, il développera deux projets avec la réalisatrice. Pornocratie sera l'adaptation du roman éponyme que publiera Catherine Breillat chez Denoël en septembre prochain. "Ce livre est très inspiré de La maladie de la mort une nouvelle de Marguerite Duras, dans laquelle un homme paie une prostituée chaque soir, dans l'espoir de percer le mystère qui entoure cette femme. Chez Breillat, c'est une femme qui paie un homme" explique Jean-François Lepetit. Catherine Breillat travaille parallèlement à l'écriture de ce roman et à son adaptation au cinéma. De l'aveu même du producteur, "le film devrait susciter beaucoup de polémiques". Ils tourneront également Scènes intimes, un film sur le tournage d'un film : "Catherine veut mettre en scène les relations entre le metteur en scène et les acteurs, en particulier au moment de la mise en scène de certaines séquences un peu dures."
Producteur de Catherine Breillat, Jean-François Lepetit est à l'origine du renouveau de la sexualité à l'écran. Lancée par hasard avec Romance, cette vague a vu depuis se succéder sur les écrans Baise-moi de Virginie Despentes et Coralie Trin Thi, et prochainement Intimité de Patrice Chéreau, qui sort en salles le 28 mars. Lorsqu'on lui demande s'il est content d'être à l'origine de ce courant, Jean-François Lepetit répond modestement : "ce phénomène existait avant dans la littérature. Le cinéma est, comme elle, le reflet des préoccupations d'une société à un moment donné. Je pense que ce qui se produit est quelque part assez logique." Quand on lui demande si c'est un argument marketing pour vendre les films plus facilement, le producteur explique que c'est une arme à double tranchant, qui peut servir le film comme en éloigner les spectateurs.
Décidément très intéressé par les adaptations cinématographiques de livres, Jean-François Lepetit travaille actuellement à deux autres projets, en dehors de ceux qu'il développe avec Catherine Breillat. Le premier s'intitule provisoirement Single once again, d'après un scénario de Joyce Sherman Buñuel, en collaboration avec Michèle Bernier. De l'avis même du producteur, "ce sera un film très féroce, sur les hommes, les femmes, et la solitude et encore une fois, sur les relations hommes femmes, dans la veine du cinéma de Woody Allen". Pour la petite histoire, le film était à l'origine prévu pour le marché américain, mais ce fera finalement en France.
Pour le moment, le producteur est à la recherche des acteurs susceptibles d'interpréter ce scénario, et souhaite le produire cette année, pour un tournage prévu à l'automne. Joyce Sherman Bunuel en serait le réalisateur. Enfin, Jean-François Lepetit prépare également l'adaptation de L'Anatomiste, le roman de Federico Andahazi. "Ce sera un film en anglais, doté d'un budget de 20 millions de dollars". Jean-François Lepetit est actuellement à la recherche d'un metteur en scène pour mener à bien ce projet très ambitieux.
F.M.L.