Allociné : pouvez-vous nous parler de votre personnage de Louba ?
Elsa Zylberstein : Louba est une femme hantée par son passé. Une femme qui veut recoller les morceaux, qui essaie d'exister malgré ce passé très lourd à porter. Elle se cherche.
Comment avez-vous réagi à la lecture du scénario ?
Je n'ai pas hésité une seule seconde. C'est rare de se voir offrir des personnages tels que celui-ci. L'acteur n'existe pas sans un rôle fort. Ce film me rappelle certains films de Louis Malle avec ces thèmes de la mémoire et de la transmission de celle-ci. Ce film est très universel. Louba est juive, elle est hantée par le souvenir de la Seconde Guerre mondiale. Orpheline, elle s'est retrouvée placée dans une famille d'accueil avec Jeannie (Camille Japy). Elles sont très différentes. Elles vont se quitter, puis se retouver, grâce aux hasards de la ville.
Martine m'avait conseillé de regarder les films de Chaplin, Pas de printemps pour Marnie d'Alfred Hitchcock et L'Histoire d'Adèle H de François Truffaut. Elle voulait que le personnage ait un côté comique. Louba devait se déplacer comme un petit garçon. Cette jeune femme a perdu de sa féminité. C'est une fille qui se cherche en tant que femme.
Avez-vous rencontré des personnages comme Louba dans la vie ?
Oui parfois. De toutes façons nous avons tous un sac à dos à la naissance. On a toujours un passé à gérer. On nous distribue tous un jeu de cartes au départ, mais chaque jeu de cartes est différent. Certains sont mieux servis que d'autres. Mais il faut savoir se délester de ce poids du passé. Dans ce film, Louba n'arrive pas à le faire.
Ce film, c'est aussi une grande histoire d'amitié entre votre personnage et celui joué par Camille Japy ?
C'est un thème récurrent chez Martine Dugowson. Il s'agit souvent d'ailleurs d'amitié brisée ou de trahison. Comme dans Mina Tannenbaum, la problématique est : comment faire pour s'en sortir, malgré ce poids du passé ? Comment peut-on faire sa vie ? Mon personnage éprouve des difficultés dans cette quête d'une autre vie. Celui joué par Camille Japy y parvient mieux, même s'il se ment très souvent.
Dans Mina Tannenbaum, c'était l'inverse, mon personnage, Ethel, s'arrangeait avec la réalité alors que celui de Romane Bohringer était plombé par une histoire personnelle. Mais à la différence de ce film, Les Fantômes de Louba, s'attache surtout à l'idée de transmission de la mémoire et des racines.
Il s'agit de votre troisième collaboration avec Martine Dugowson après "Mina Tannenbaum" et "Portrait chinois". Vous avez un rapport privilégié avec cette réalisatrice, n'est-ce pas ?
Nous avons une grande connaissance l'une de l'autre. Nous avons toujours cette envie d'étonner l'autre. Entre chaque film, nous évoluons chacune de notre côté. A chaque collaboration, nous sommes "neuves".
Photo : © AlloCiné