Sur le bureau de Marcel Rogemont, député PS d'Ille-et-Vilaine, sont entassés un grand nombre de documents. A côté de textes de lois et de livres administratifs, des revues sur le cinéma. Le parlementaire est, depuis le 17 janvier, président d'une nouvelle mission d'information. Créée au sein de la commission des Affaires sociales et culturelles de l'Assemblée, elle est chargée de réfléchir à l'avenir du cinéma français.
"C'est l'actualité qui a guidé la décision de mettre en place cette mission. Le cinéma est en plein bouleversement : il y a l'apparition des cartes illimitées, les multiplexes, des réseaux de distribution et d'exploitation qui s'unifient. Nous nous sommes dit qu'il y avait matière à travailler", explique Marcel Rogemont.
La mission, qui comprend dix députés, se donne un an pour rendre un rapport. Elle vient de commencer à auditionner les premières personnes concernées par le sujet. Marcel Rogemont a déjà rencontré Catherine Tasca, ministre de la Culture, Jean-Pierre Hoss, président du Centre national de la cinématographie et Daniel Toscan du Plantier, président d'Unifrance, organisme chargé de la promotion du cinéma français à l'étranger.
Les députés auditionneront également leurs homologues italiens, espagnols, anglais et suédois et se rendront à la Commission européenne de Bruxelles. "Outre le cinéma français, nous souhaitons aussi nous intéresser à la place du cinéma européen dans le monde" explique André Schneider, député RPR du Bas-Rhin et membre de la mission.
Néanmoins, pour l'instant, les députés se concentrent sur les questions françaises et notamment les cartes d'abonnement illimité. Le 24 janvier dernier, l'Assemblée approuvait leur existence. Marcel Rogemont avait pris part au débat en déposant un amendement pour garantir un montant minimum de rémunération pour l'exploitant associé. "La notion d'abonnement n'est pas choquante, au contraire. Cela peut permettre d'élargir le public. Mais le risque est de tuer les cinémas indépendants. Soient ils n'entrent pas dans le système de la carte et meurent par assèchement du public, soient ils s'associent avec un exploitant et disparaissent en accumulant les déficits" explique Marcel Rogemont.
Les membres de la mission, qui appartiennent à des partis politiques différents, ont des avis divergents sur la question. Pierre-Christophe Baguet, député UDF des Hauts-de-Seine, préconise la prudence. "Ne condamnons pas la carte de façon précipitée", affirme-t-il.
Les députés auront également à étudier d'autres phénomènes, dont le développement croissant des multiplexes et les mouvements de concentration entre producteurs et distributeurs. "Nous allons aussi nous pencher sur les conséquences de la fusion Vivendi-Universal" explique Patrick Bloche, député PS de Paris.
A ceux qui diraient que la création de la mission d'information sur le cinéma arrive trop tard, Marcel Rogemont acquiesce. "C'est vrai que nous aurions pu agir avant. Mais il est encore temps." Le bilan qu'établira, dans un an, la mission servira de base pour moderniser le cadre légal entourant le cinéma.
M-C.H.