Le Royaume-Uni vient de publier un premier bilan pour les films financés grâce à la loterie nationale. Sur 11 films produits grâce à ce système et sortis en salles, 10 n'ont pu rembourser totalement le prêt consenti par la loterie, faute de succès au box-office.
Depuis 1997, le gouvernement anglais a mis en place via le Film Council, équivalent de notre CNC, un système tout à fait particulier d'aides au financement des productions anglaises. Les recettes de la Loterie nationale alimentent un système de prêt, qui permet à de grosses entreprises franchisées de disposer de fonds pour produire leurs films. Ces sommes sont destinées à être remboursées suite à l'exploitation du film en salles. C'est donc un système proche de l'avance sur recettes mise en place par le CNC. A la différence que ce système ne se veut pas une aide aux films d'auteurs, mais à ceux ayant un certain potentiel commercial. Trois sociétés se sont ainsi vues attribuer une franchise pour distribuer ces fonds, pour un montant total de 92 millions de livres.
Un premier bilan vient d'être publié, sur les trois premières années de ce système. Il prend en compte les onze premiers films ayant bénéficié des fonds de la Loterie. Et le constat n'est guère encourageant au regard de l'objectif "commercial" affiché par le Film Council : sur ces 11 premiers prétendants au succès, 10 ont été des flops au box-office. Ainsi Love's Labour's lost, de Kenneth Brannagh, a coûté plus de 8,5 millions de livres, bénéficié d'une aide de la loterie à hauteur de 1,5 million de livres, mais n'a rapporté qu'à peine plus de 500 000 livres. C'est un sérieux revers pour le film, qui fatalement, n'a pas pu rembourser sa créance.
Second problème, la lenteur du développement des projets. Ainsi l'un des trois franchisés, The Film Consortium, avait reçu une enveloppe de 33,5 millions de livres, qu'il devait répartir entre 39 projets différents, sur une durée de six ans. A mi-parcours, The Film Consortium n'a produit que 5 films, dont le très onéreux Hold Back the night : ce film de Philip Davis a coûté la bagatelle de 16,75 millions de livres, dont 6,82 provenaient de la loterie, soit près de 40% du devis de ce film à très gros budget.
Pathé affiche un bilan un peu plus positif. La filiale anglaise du groupe au coq d'or avait pour objectif d'investir les 33 millions reçus de la loterie dans 12 films par an. Parmi les neufs films produits, seul Un Mari Idéal parvient à tirer son épingle du jeu. Malgré un coût global de 6,35 millions de livres, ses 2,89 millions de livres de recettes lui ont permis de rembourser intégralement le prêt de la loterie, qui se montait à 1 million de livres.
Enfin le troisième franchisé, DNA, n'a pas encore sorti un seul film ayant bénéficié des prêts de la loterie : la grande première sera le 19 janvier, avec Beautiful Creatures. Impossible donc de tirer un bilan dès maintenant.
Au total, sur 92 millions de livres avancés, seulement 42 ont été remboursés, ce qui représente un retour sur investissement de plus de 45%. Ce chiffre peut paraître minime, mais c'est le meilleur score européen, la plupart des systèmes identiques au sein de l'Union affichant des remboursements oscillant entre 2 et 10%. Le système n'est pas remis en question par ce résultat : les trois sociétés franchisées ont en effet passé avec succès le cap de la mi-mandat, et se sont vues accorder à nouveau la confiance du Film Council pour les trois années à venir.
De plus, ce premier bilan évoque le cas des onze premiers films, qui ont en quelque sorte "essuyé les plâtres" de cette nouvelle formule. Pour preuve, le succès récent d'un film aidé par la loterie : Billy Elliot, produit par Pathé. Le film, sorti en octobre et toujours en exploitation, a été LE succès de l'automne en Angleterre, et a d'ores et déjà rapporté 17 millions de livres en 14 semaines d'exploitation. Et démarré très fort à l'international... Notons que parmi les productions estampillées "loterie", on attend 51th State, de Ronny Yu, produit par The Film Consortium, avec en vedette Samuel L. Jackson et Robert Carlyle. Voilà qui devrait corriger le tir, et satisfaire à l'objectif "commercial" de ces prêts.
F.M.L