Depuis la fusion entre Vivendi et le groupe de spiritueux Seagram, propriétaire des studios Universal, l'heure est à la réorganisation. Le pôle "cinéma" du groupe n'échappe pas à la règle : tous les partenariats du groupe sont passés au crible afin de déterminer ceux qui correspondent ou non à la politique du groupe, dont le maître mot est "synergie".
Depuis plusieurs années, Le Studio Canal a bâti une large toile relationnelle avec de nombreux acteurs de l'industrie cinématographique hollywoodienne. A travers ces accords de coproductions et de premier regard sur les catalogues de ses partenaires, Le Studio Canal alimentait son offre en films américains. Il était ainsi lié avec Bel Air, Mandalay, Spyglass... Dans une interview au Monde en date de ce week-end, Pierre Lescure indiquait que la plupart de ces accords privilégiés ne devraient pas être reconduits. Logique, ces sociétés étant respectivement liées aux studios Warner, Paramount et Disney... tous rivaux d'Universal. Voilà donc Canal projeté dans la logique de groupe...
Tous ces mouvements ne sont pas sans inquiéter les professionnels français du cinéma, qui craignent le passage de Studio Canal sous la coupe d'Universal. Au delà de la simple identité de l'un des principaux bailleurs de fonds du cinéma français, c'est aussi l'aspect financier qui est en jeu. Les professionnels craignent en effet que Le Studio Canal ne soit fondu dans le groupe, et ne finance plus qu'épisodiquement le cinéma français et européen, dont il est l'une des composantes majeures. Ils réclament l'assurance du maintien des investissements de Canal + dans le cinéma pour les dix prochaines années, et des garanties sur ces engagements en cas de rachat de Vivendi Universal par un groupe étranger. Pierre Lescure indique au contraire que les sommes épargnées dans les partenariats à Hollywood viendront en renfort des actions déjà menées en faveur du cinéma européen. Et s'étonne des requêtes des professionnels, qui réclament de plus en plus de garanties, "dans un environnement ultra-concurrentiel où personne ne peut prévoir le niveau de son chiffre d'affaires à échéance de dix ans".
Fantasme ou réalité de la menace, il est encore trop tôt pour le dire. Mais les professionnels ont choisi de prévenir plutôt que de guérir, en menaçant de poser début décembre un recours contre la fusion Vivendi Universal auprès du Conseil d'Etat. Ils seront reçus par le directeur général de Canal Plus le 10 janvier prochain. Suite à cette discussion, ils poseront ou non leur recours. La naissance de Vivendi Universal, effective officiellement depuis le 8 décembre, n'a pas fini de faire parler d'elle, et de susciter de vastes remous dans les rangs de l'industrie cinématographique française et européenne.
F.M.L