Contrairement à leurs aînés, les jeunes cinéastes chinois, avouent sans complexe préférer le business à l'art. Comme le dit Feng Xiaogang, le cinéaste chinois le plus rentable : "Le business d'abord, l'art ensuite". Dans un marché potentiel de 1,3 milliard de spectateurs potentiels, les cinéastes de la sixième génération du Beijing Film Studio ambitionnent donc de ratisser le plus large possible. Ce qui implique naturellement : intéresser le plus grand nombre, ne pas trop cibler les films... Bref, être "hollywoodien".
Pour mieux comprendre, analysons la situation économique de la Chine. Le pays prépare en ce moment son entrée dans l'OMC (Organisation mondiale du commerce). Si celle-ci n'est pas encore acquise -les négociations sont en effet un peu tendues en ce moment- la Chine devrait toutefois finalement rejoindre l'organisation. Ce qui implique de se plier à ses règles, comme par exemple limiter le protectionnisme. Le pays se prépare donc à recevoir au minimum 20 films étrangers par an, et a décidé de résister à l'invasion hollywoodienne en employant les mêmes méthodes. L'heure est donc à la compétition...
Les premiers à avoir pris conscience de ce phénomène, ce sont les producteurs. Ceux-ci réclament en effet un retour sur investissement. L'un d'eux va même jusqu'à dire que "plus un film est artistique, moins les gens l'apprécient". Du coup, il est relativement difficile pour les réalisateurs chinois d'obtenir des financements sans apporter la garantie d'un succès au box-office. Cette politique va jusqu'à composer avec la censure. C'est une évidence, car si un film est censuré, il ne peut pas être accessible au plus large public, et ne peut donc pas être un succès au box-office...
C'est évidemment différent pour la génération précédente, dont la figure la plus célèbre est Chen Kaige. Le réalisateur de L'empereur et l'assassin a révélé au monde le talent de l'Orient en remportant la palme d'or en 1993, avec Adieu ma concubine. Censuré par le gouvernement chinois, puis finalement autorisé à une sortie extrêmement limitée dans son pays d'origine, ce film n'a jamais eu l'occasion de faire de l'argent dans son propre pays. Chen Kaige a bâti sa carrière sur l'exportation. Désormais reconnu à l'étranger, squattant le festival de Cannes avec 5 films présentés depuis 1988, le cinéaste est aujourd'hui financé en majorité par des capitaux étrangers. Ce qui lui offre effectivement un marché en dehors de son pays... Difficile donc de comparer sa situation à celles de la majorité des réalisateurs chinois.
L'industrie cinématographique chinoise se prépare donc à produire des films à mi-chemin entre cinéma hollywoodien et culture asiatique, à l'image de Tigre et dragon *, d'Ang Lee. Espérons qu'elle parviendra à conserver le plus longtemps possible cette touche asiatique...
* Tigre et dragon est un film taïwanais
F.M.L d'après l'AP