Baise-moi, l'itinéraire trash de deux prostituées avides de sexe, de drogues et de meurtres, vient d'être censuré en Ontario.
L'interdiction du film de Virginie Despentes et Coralie Trinh Ti a soulevé une polémique dans les milieux intellectuels canadiens.
Atom Egoyan (De beaux lendemains, Le voyage de Félicia) est monté au créneau, au nom de la liberté d'expression. Le réalisateur justifie son point de vue par son témoignage : " Plusieurs centaines de personnes ont assisté à une projection de Baise-moi lors du dernier festival du film de Toronto, en septembre. Certaines personnes ont été scandalisées par le film... Ces gens ont quitté la salle en étant secoués, tout comme d'autres sont repartis du cinéma excités, remués ou complètement neutres. Tous ces gens ont pu se faire leur propre opinion. C'est de cette façon qu'une société civilisée et démocratique fonctionne." Dans la même veine, Marcelle Lean, présidente de l'office de développement du film en Ontario, et ancienne membre de la commission de classification de la province, a déclaré que bien qu'ayant trouvé le film "hideux et révoltant", elle était fermement contre son interdiction.
De l'autre côté, les défenseurs de la censure argumentent sur la violence de la première scène du film, au cours de laquelle deux voyous violent sauvagement deux jeunes filles. Tout est montré. L'une hurle et se bat contre son agresseur. L'autre subit l'agression en restant passive. Cette scène, très dure, a justifié la décision d'interdire le film. La commission de classification se retranche également sur le fait que l'Ontario n'est pas le seul à avoir pris cette décision, puisque "il a déjà été interdit en France, ce qui signifie quelque chose". Le film a en effet été classé X dans l'hexagone. Ce qui revient à une interdiction, faute de l'existence de véritable cinéma porno sur le territoire, et ne jouira donc que d'une exploitation vidéo. En Belgique, il a été interdit aux moins de 18 ans. Tout comme au Québec et en Colombie Britannique, deux autres provinces canadiennes.
Baise-moi poursuit donc sa tumultueuse exploitation en salles sur le même registre, et continue de défrayer la chronique partout où les distributeurs tentent de l'exploiter. Reste le débat sur la censure. Où s'arrête le film d'auteur et où commence la pornographie ? Que doit-on montrer et que doit-on prohiber ? A quel public est destiné quel contenu ? Mais aussi et surtout, comment les marketeurs le vendent-ils ? Autant de questions soulevées par le cas Baise-moi. D'autant que les exemples de scènes crues et violentes dans les films sont légions, et Baise-moi est le seul film à avoir été classé X en France ces dernières années. Ca fait réfléchir...
F.M.L d'après le Toronto Star