Hollywood décerne ses prix d'excellence. The Hollywood Reporter, l'une des sources majeures d'information de l'industrie cinématographique, vient de publier le Director Power, un classement des réalisateurs les plus puissants et les plus à même de mener un projet droit au succès. Pour établir la grille des "meilleurs réalisateurs" selon une optique clairement définie par des critères "business", The Hollywood Reporter a adressé un formulaire à quelques 80 professionnels de l'industrie hollywoodienne.
Parmi les critères de sélection figuraient la capacité à attirer les financiers, à obtenir une distribution digne de ce nom, à faire tenir un film sur leur seul nom, et en général toutes les données permettant à un film de trouver un marché. Des studios exécutives [les décideurs des studios, ndlr], des banquiers, des producteurs, des distributeurs, des acheteurs, et même quelques "indépendants" ont donc contribué à établir cette liste des réalisateurs les plus puissants d'Hollywood.
Au top du Director Power figure Steven Spielberg, avec le score maximum de 100 % de confiance. Auteur, réalisateur, et dirigeant de DreamWorks, il obtient une meilleure note qu'en 1998 où il ne totalisait "que" 99,38 % de chances de cartonner avec un film. Hollywood a trouvé son modèle en le roi Steven. Second sur le podium, James Cameron. Depuis Titanic, le réalisateur de Terminator s'est fait une place sur la colline enchantée, et totalise 99,06% de réussite. Pas mal, quand on sait que nombreux étaient les oiseaux de mauvaise augure qui présageaient un gouffre financier pour Titanic...
Georges Lucas se maintient à la troisième place, avec un score de 98,13%. Et comme il concocte les Episodes 2 et 3 de la saga Star Wars, nul doute qu'il restera encore quelques années dans les premières places du classement. Le petit Ritchie de Happy Days a bien grandi, et coule désormais des jours heureux (sic !) à la quatrième place de ce classement. L'heureux réalisateur du Grinch fait partie des bons élèves d'Hollywood depuis le succès d'Appollo 13, et ne cesse de progresser !
Juste derrière lui on trouve le premier élément perturbateur. Grâce à Sleepy Hollow, Tim Burton progresse de 13 places et arrive dans le top 5. Le réalisateur de Mars Attacks et d'Edward aux mains d'argent se voit enfin reconnu par ses pairs, tout en conservant un style artistique légèrement démarqué des canons hollywoodiens. Il est suivi par deux autres réalisateurs au style également très marqués : l'italo-américain Martin Scorsese, et le chinois John Woo.
Au regard de ce classement, qui recense 800 réalisateurs de toutes nationalités, on observe que le rêve américain survit à Hollywood. A l'instar de John Woo, plusieurs réalisateurs étrangers figurent parmi les chouchous d'Hollywood. Ainsi l'Allemand Roland Emmerich (The patriot, le chemin de la liberté), l'Anglais Anthony Minghella (Le talentueux Monsieur Ripley), le Français Luc Besson (Jeanne d'Arc), l'Australien Peter Weir (The Truman show), le Suédois Lasse Hallström (L'oeuvre de Dieu, la part du diable), et l'Espagnol Pedro Almodovar (Tout sur ma mère) ont la cote outre-Atlantique.
Hollywood se targue d'accueillir à bras ouverts tous les talents du monde, et fait figure d'une classe de surdoués où tiennent leur place tous les champions du box-office, quelles que soient leurs origines. La méritocratie a donc encore de belles années devant elles sur la colline aux dollars, et ancre encore un peu plus le mythe du rêve américain. A condition bien sûr de "correspondre aux canons hollywoodiens" et de "réaliser des films commerciaux", comme le dit très justement Amir Malin (!), l'un des dirigeants de la société de production "indépendante" Artisan Entertainment.
En revanche, il ne fait pas bon être une femme ou faire partie d'une minorité sur la colline enchantée. La première femme du classement n'obtient un résultat que de 70% de confiance, et c'est Jodie Foster, probablement un peu aidée par sa popularité d'actrice. Et en ce qui concerne les minorités, le constat est plus qu'alarmant : le réalisateur Spike Lee est bien loin avec un score de seulement 60, 94%.
Enfin pour terminer, l'article du Hollywood Reporter ne nie pas que d'autres critères que le business puissent expliquer le succès de films indépendants. En effet, si ce classement donne quelques indications, il oublie un concept économique fondamental. Si Hollywood tente d'appliquer un modèle unique au processus de production, il ne faut pas oublier qu'un film est un prototype, qui ne peut être complètement régi par des règles.
Ainsi chaque année plusieurs films étonnent par leurs résultats. L'an dernier, ce fut le phénomène Blair Witch : prévu par aucun analyste, il reste pourtant le film le plus rentable de l'histoire du cinéma. Cette année, Sixième Sens et Scary Movie ont réalisé de très bons résultats, et pourtant n'étaient pas "attendus". Les sujets, mais aussi la mise en scène et le sens artistique peuvent aussi, en effet, attirer le spectateur. Et concernant ces chapitres, aucune recette magique n'existe...
F.M.L d'après The Hollywood Reporter