AlloCiné : Si vous n'aviez pas été dans la profession, qu'auriez-vous fait ?
Patrick Braoudé : J'aurais été vétérinaire. J'ai fait des études pour ça, à Maison-Alfort. J'ai exercé pendant quatre ans. L'envie d'être acteur et de faire du cinéma m'est venue très tardivement. Donc, si je n'avais pas fait du cinéma, j'aurais été véto.
Votre réalisateur de référence
Joseph Mankiewicz, parce que c'est un metteur en scène qui travaille vraiment sur les acteurs. Il ne priviligie pas les mouvements de caméra pour le jeu des acteurs. Pour moi, un film de référence: L'aventure de Mme Muir avec Gene Tierney et Rex Harrison qui est pour moi un film plein de tendresse, de fantastique, d'humour et ça réunit tout ce que j'aime.
Votre meilleur souvenir professionnel
J'ai beaucoup de bons souvenirs. Je ne sais pas quel est le meilleur... Je me souviens de l'ambiance du premier film, Génial mes parents divorcent, avec tous les enfants qui découvraient ce qu'était un film. C'était un moment fabuleux.
Je me souviens aussi du remake US de Neuf Mois quand j'étais à San Francisco pour rencontrer le metteur en scène et les acteurs ; c'est un grand moment de ma carrière.
Votre film de chevet
L'anventure de Mme Muir de Mankiewicz qui est vraiment un film que j'adore.
Votre désir professionnel
Continuer mon petit bonhomme de chemin.
La rencontre déterminante dans votre carrière
La rencontre avec le café-théâtre. J'étais véto et c'était l'époque où le café-théâtre explosait ; des tas de jeunes acteurs débutaient et avaient écrit un truc, ça s'appellait, je crois, Le secret de Zonga écrit par Martin Lamotte. Il y avait dans l'équipe Roland Giraud, Dominique Lavanant, Renaud, Gérard Lanvin et je me suis dit : "moi j'ai envie de faire ça". Ce fut une rencontre déterminante.
Il y en a eu d'autre. Tout s'est passé par écran interposé : mon père me disait "on va acheter ta clinique", et moi, à ce moment là, j'avais envie d'être acteur. Et il y a eu "Le Grand Echiquier", l'émission de Jacques Chancel qui avait invité deux grands acteurs de la comédie française : Francis Huster et Jacques Weber. Francis Huster était en train de lire un texte de Pirandello, La fleur à la bouche et pendant que mon père me parlait de la clinique j'écoutait Francis Huster qui jouait cette pièce. A cet instant, je me suis dit : "si je ne fais pas ce métier là, je le regretterais toute ma vie". Ce fut une rencontre tout à fait par hasard et je lui ai dit un jour. C'est à ce moment là que j'ai choisi d'être acteur.
Vous souvenez-vous de votre première réplique ?
Le premier film dans lequel j'ai joué, j'étais trois-quart-dos. Je donnais la réplique à Patrick Chesnais ; j'étais au téléphone et j'ai dû lui dire un truc dans le genre "c'est pour toi". C'est tout.
Et de votre premier casting
Pour une pub, un thé à la mandarine.
"Deuxième vie", en résumé...
C'est l'histoire d'un type qui ne veut pas faire de choix ; il a une trentaine d'année, et par ce refus, le destin va lui montrer ce qu'il est devenu, un type épouvantable. Il veut donc absolument retourner en arrière pour faire ses choix, décider de sa vie.
Comment définiriez vous le personnage?
Un jeune type qui est incapable de choisir, de dire oui ou non. C'est un écolo qui a rencontré une jeune femme qui est la femme de sa vie. Il a tout, des copains avec qui il partage des choses très fortes mais il est incapable de choisir. Le destin va lui montrer ce qu'il va être pour l'obliger à choisir. Le choix est ce qu'il y a de plus terrible, le non-choix c'est facile.
Quand j'achète une paire de chaussures, je me dis toujours : est-ce que j'ai fait le bon choix ? Pareil au restaurant. Je trouve que choisir est épouvantable.
Etes vous, comme le personnage, hésitant dans la vie ?
Toujours, mais quand je fais un film, je ne le suis pas. C'est le seul moment peut-être où je décide des choses, parce qu'on n'a pas le droit d'avoir des doutes. Vraiment, je sais ce que je veux lorsque je fais un film. Mais, quand le film est fini, les doutes reviennent.
Votre personnage se réveille le soir de la victoire des Bleus à la Coupe du Monde de footbal 98. Pourquoi ?
Il fallait que le passage de ces 16 ans soit en image, quelque chose de fort. Donc j'ai pensé que la finale de la Coupe du Monde était un moment tellement fort que cela marquerait les gens. Tout le monde a vécu cela pour l'amitié, la chaleur, dans les rues. Un moment fort.
Donc j'avais besoin de situer le film sur des grandes années de différence. Je me suis souvenu de la demi-finale de foot en 82 contre l'Allemagne à Séville où Patrick Battiston avait été descendu par l'ignoble Schumacher. C'était une image très forte que les français ont gardé en tête parce que c'était une injustice totale, on devait aller à cette finale. Je me suis dit, si je fais passer 16 ans comme ça, c'est un truc gigantesque, il s'est passé beaucoup de choses, pour le film c'était très riche. La vie n'est plus la même à ce moment là : portables, micro-ondes, l'ordinateur... Tout a évolué.
Etes-vous fan de foot ?
Non, je ne suis pas très fan de foot, simplement un spectateur. Par contre, dans les Coupes du Monde, je trouve qu'il y a toujours quelque chose de très fort, des émotions. Dans les Coupes du Monde de foot, il y a des choses intenses, des dramatisations.
La dernière a été au summum du monde du drame et de la joie ; chaque match reste quelque chose d'incroyable, les pénalties, les buts en or. C'est un scénario extraordinaire.
L'ambiance du tournage
Une ambiance extraordinaire, une cohésion, une entente entre les techniciens, les acteurs, une vraie cohésion. Donc des souvenirs, des choses drôles et émouvantes. Il y a beaucoup de choses entre chaque acteur, le film au Maroc... Ce sont des choses magiques.
Mais un moment a été pour moi très bouleversant : mon personnage après un accident de voiture va passer de 82 à 98 en tamponnant subitement une colonne Morris. Juste avant, en mettant l'auto-radio, un truc bizzare a été dit et je devais filmer celui-ci. On ne pouvait pas laisser passer cela. Incroyable, ce qui se disait à la radio était le thème du film. L'ingénieur du son m'a dit laisse tourner, plan de radio. Le type parlait d'un voyage dans le temps, je l'ai donc gardé. Le type m'a dit : c'est un signe.
Vos projets
J'ai rarement des projets à l'avance, j'ai toujours des scénarios en tête. J'ai envie de réécrire pour le théâtre, et pour le cinéma, c'est vraiment une envie. Après je ne sais pas.