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    Tasca : retour sur les abonnements cinéma

    Lors de la présentation du budget de la culture et de la communication pour 2001, Catherine Tasca est revenue sur les abonnements cinéma.

    Lors de la présentation mercredi du budget de la culture pour l'année 2001, Catherine Tasca a été conviée à s'exprimer à nouveau sur les mutations induites par l'apparition des cartes UGC et Le Pass. Fidèle à sa ligne, la ministre s'est élevée contre les initiatives individuelles menées par les enseignes UGC, Gaumont-MK2, et Pathé, qui vont selon elle à l'encontre de la politique menée par le gouvernement dans le domaine du cinéma depuis des années : "Le lancement d'une carte d'abonnement, puis d'autres, est un acte en solo des grands groupes d'exploitation du cinéma qui rompt avec le principe de solidarité défini par l'Etat. Je regrette la rupture avec cette règle du jeu qui s'est avérée extrêmement bénéfique à la production cinématographique et du cinéma en général."

    Cependant, le ministère semble avoir pris toute la mesure de la mutation en cours dans le mode de consommation du cinéma. La ministre a en effet déclaré : " Les choses étant ce qu'elles sont, si la profession considère que la politique d'abonnement pour amener un nouveau public est la bonne, nous devons nous donner les moyens d'ouvrir ces systèmes de cartes à l'ensemble des exploitants, y compris les indépendants." En clair, si la politique des abonnements cinéma devait se poursuivre –et on voit mal comment l'élan actuel pourrait subitement s'interrompre- l'Etat interviendrait en faveur des indépendants, pour leur permettre d'intégrer eux aussi ce système. La ministre a d'ailleurs regretté que les abonnements soient dirigés vers des enseignes et non vers le cinéma tout simplement. L'idéal, selon elle, serait donc l'instauration d'un pass valable dans tous les cinémas, y-compris indépendants. Le système de carte orange, tel qu'il existe pour les transports en commun parisiens, pourrait alors être appliqué. On en rêve déjà...

    Ce dossier fera l'objet d'une concertation entre les professionnels et les pouvoirs publics au CNC, lieu privilégié de l'échange entre les acteurs de l'industrie cinématographique. Cependant aucun calendrier n'a été évoqué. Au delà de cette déclaration d'intention, qui indique que le ministère entend bien mener son rôle d'arbitre dans les mutations qui sont en train de s'opérer, aucune modalité concrète de cette intervention n'a été évoquée. Le soutien aux indépendants, qu'on imagine financier, n'est absolument pas prévu au budget 2001. Une fois de plus, l'annualisation du budget pose un problème concret à la résolution des questions d'actualités : les indépendants ont-ils vraiment les moyens d'attendre ? Ne vont-ils alors pas plutôt privilégier le ralliement à l'une des deux cartes, afin de se préserver au plus vite ? Quelques indépendants ont déjà fait ce choix. Et des rumeurs de plus en plus persistantes indiquent que les cinémas Majestic, filiale de Bac Films, pourraient adhérer à la carte UGC.

    Second chapitre de ce dossier, la rémunération des ayants-droits. Catherine Tasca a en effet soulevé le problème de la remontée des recettes dans le système des cartes d'abonnement. Les recettes dégagées par les entrées sont réparties à égalité entre l'exploitant et le distributeur.

    Elles sont toutefois amputées de diverses taxes : les droits musicaux, et surtout la TSA, une taxe retenue sur chaque billet. La TSA alimente le compte de soutien du producteur. Cette taxe, qui n'est pas calculée au pourcentage mais fixée selon le prix du billet, est gérée par le CNC, et permet aux producteurs de disposer, en fonction des entrées réalisées sur un film, d'une somme pour leur long-métrage suivant. La TSA n'est pas une aide, mais une épargne. Une fois la part des recettes établies, les exploitants ont réalisé leur chiffre d'affaires. Les distributeurs en revanche doivent encore répartir les recettes aux autres ayants-droits. En effet, la plupart des contrats de distribution prévoient une rémunération des producteurs au delà d'un certain nombre d'entrées. Les réalisateurs et comédiens principaux touchent également parfois un pourcentage sur les recettes.

    Tous ces ayants-droits -distributeurs, producteurs, et autres- sont concernés par la mise en place des abonnements cinéma. Et dans ce système d'abonnement, la répartition des recettes manque cruellement de transparence. Officiellement, comme l'avait promis UGC, la remontée des recettes est calculée sur la base du ticket à tarif réduit. Ce qui signifie que chaque place vendue dans le cadre d'un abonnement UGC devrait être rétribuée au distributeur à environ 50% du tarif réduit. Mais comment être sûr de ces chiffres ? Chez UGC par exemple, il semble qu'il n'y ait pas encore d'informatisation de l'utilisation des cartes illimitées par le public –les numéros de cartes d'abonnement sont écrits à la main et souvent très hâtivement par des caissiers débordés- et pas d'information sur le ticket attribué à chaque usager excepté la mention tarif réduit. Si l'on peut être certain que les exploitants y trouvent leur compte, puisque ce sont eux qui ont mis en place ce système, il est en revanche plus difficile d'être certains que les distributeurs et autres ayants-droits soient tout à fait justement rémunérés. Ils n'ont en tout cas aucun moyen de le vérifier. Catherine Tasca a donc affirmé sa volonté de résoudre ce problème de transparence : "Je compte également demander comment nous pourrons garantir la transparence et la remontée des recettes pour une juste rémunération des ayants-droits. En effet, la politique qui s'est amorcée, soit ne mentionne pas le prix d'entrée sur le billet, soit la mentionne à un prix fictif." Ce débat sera donc lui aussi au centre de la concertation inter-professionnelle.

    A quelques mois d'échéances électorales importantes –les municipales auront lieu en 2001, les présidentielles et les législatives en 2002- il n'est pas étonnant que Catherine Tasca ait mis de "l'eau dans son vin", et accepte désormais l'idée d'une initiative commune, même si elle pose ses conditions. Il serait en effet risqué de s'opposer définitivement au principe des abonnements cinéma. Aussi devra-t-elle composer entre l'opinion publique, favorable aux abonnements cinéma (UGC a dépassé les 100 000 abonnés), et les contreparties nécessaires à l'instauration de la carte, à savoir : la sauvegarde de l'offre, en préservant les exploitants, et la garantie d'une transparence sur la rémunération des ayants-droits.

    Enfin pour terminer, peu de nouveautés dans le budget alloué au cinéma pour 2001. Si le budget global de la culture approche l'objectif des 1% du budget de l'Etat, puisqu'il est pour 2001 de 0,994%, peu d'évolutions sont à noter en faveur du septième art. L'augmentation du budget Cinéma-Audiovisuel, de 4,29% par rapport à 2000, sera en effet essentiellement tourné vers l'audiovisuel public. Le Centre national de la cinématographie poursuivra quant à lui les grandes lignes de la politique culturelle établie par le ministère, à savoir : maintenir la pluralité de l'offre, préserver la diversité culturelle, et favoriser le développement industriel. Ces opérations seront menées grâce aux aides automatiques (TSA ) et sélectives actuellement en place, mais aucun crédit supplémentaire n'a été annoncé en faveur du cinéma, les priorités étant le multimédia et la sauvegarde du patrimoine. En revanche, 4 millions de francs ont été attribués pour l'aménagement du futur musée du cinéma, à Paris.

    F.M.L

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